Mai 68 : sous les clichés, la grève
Aujourd’hui, nombre de ses « experts » autoproclamés en détournent le sens, dans une France où ils entendent faire régner un nouvel ordre libéral. Lire la suite
C'est un pavé au sens littéraire du terme. Et ça tombe bien quand on parle de Mai 68. Un bel ouvrage compact qui rappelle le projectile emblématique de cette période historique. C'est surtout une somme de quelque 300 témoignages et près de 2000 feuillets comme autant de récits de vie d'une richesse formidable. Des paroles libres, des souvenirs, des anecdotes qui se dévorent au fil des 477 pages du livre Mai 68 par celles et ceux qui l'ont vécu. Les mots ont leur importance et le parti pris éditorial aussi. Il nous donne à lire des anonymes qui l'ont vécu – par opposition à ceux qui, devenus célèbres pendant ou après Mai, revendiquent haut et fort de « l'avoir fait ».
Cet ouvrage singulier et pluriel fait entendre avec justesse la polyphonie d'une AG, le tourbillon révolutionnaire, les petits riens au lendemain de grands matins, le foisonnement de créativité et de liberté qu'a été Mai 68 pour toute une partie de la jeunesse étudiante et ouvrière.Certains qui ne se sentaient pas à leur place dans un lycée un peu chic ou dans les couloirs de la Sorbonne ont mis des mots sur la reproduction sociale des élites, certaines se sont affranchies des interdits familiaux, osant discuter avec des inconnus dans la rue, « même sans avoir été présentés », d'autres encartés qui à l'Unef, qui dans des organisations trotskistes ou communistes… ont parfois pris des chemins de traverse, refusant un mot d'ordre, une injonction pour se faire sa propre opinion, pour suivre son instinct, pour s'ouvrir l'esprit.
En filigrane se découvrent les rapports sociaux fermés, les petits chefs autoritaires, le machiste ordinaire de la société française, la peur de la répression policière, le poids de la Résistance et des collabos, l'appréhension, la réprobation ou le soutien des parents face aux paroles et aux actes de leurs enfants terribles…«Les témoignages rassemblés ici, dans tout leur bariolé, disent, à hauteur d'homme, à hauteur de femme, à hauteur d'enfant, ce que fut la chair concrète de l'événement », note dans la préface les coordinateurs de l'ouvrage, Christelle Dormoy-Rajramanan, Boris Gobille et Erik Neveu. Une belle moisson de mai.
Aujourd’hui, nombre de ses « experts » autoproclamés en détournent le sens, dans une France où ils entendent faire régner un nouvel ordre libéral. Lire la suite
Démocratie, unité syndicale, relations au politique… les questions qui se posent en 1968 au mouvement syndical résonnent toujours aujourd’hui. Lire la suite