1 avril 2019 | Mise à jour le 2 avril 2019
Plus de 1 500 personnes devant le ministère de la Solidarité et de la Santé à Paris, des rassemblements devant une bonne quarantaine de préfectures à travers la France et des crèches fermées partout, en villes comme à la campagne. L'appel de la CGT et du collectif Pas de bébés à la consigne ! du 28 mars dernier a été largement entendu. Delphine Depay, animatrice du collectif médico-social pour la CGT-Services publics revient sur ce mouvement.
Pourquoi cette manifestation ?
La politique de la petite enfance, c'est de proposer des modes d'accueil de qualité pour tous les enfants auxquels chacun doit pouvoir avoir accès avec un coût modéré. Or, sous couvert de mesures d'austérité financière, les moyens alloués sont de plus en plus restreints et les villes ou les intercommunalités sont amenées à fermer des crèches.
D'autre part, avec la suppression des 70 000 postes dans les collectivités territoriales déjà en marche, on est sur des situations de personnel très tendues alors que les demandes pour des places en crèches publiques sont nombreuses et qu'il en manque. La CGT estime qu'il faudrait créer 200 000 nouvelles places pour satisfaire les besoins réels.
Loi EssocAdoptée fin juillet 2018, la loi pour un État au service d'une société de confiance prévoit, dans son article 50, de simplifier les législations applicables aux modes d'accueil de la petite enfance, mais aussi d'accorder certaines dérogations à ces législations.
La loi Essoc ne va rien améliorer ?
La proposition du gouvernement n'est pas de répondre aux besoins des enfants, mais de faire que les crèches coûtent le moins cher possible. Les mesures avancées restent encore floues, mais, avec des moyens en baisse, il faut s'attendre à une nouvelle détérioration des conditions de travail des personnels et d'accueil des enfants.
Ce qui a été annoncé concrètement, par contre, c'est que le gouvernement fera passer son texte par ordonnances avant l'été et que le collectif et les syndicats recevront la proposition de texte de loi d'ici un mois.
La délégation reçue au ministère lors de la manifestation a-t-elle permis de sortir de ce flou ?
Même si cela doit rester au conditionnel, le premier point qui pêche concerne le taux d'encadrement, c'est-à-dire le nombre d'enfants par professionnelle. Aujourd'hui, on est sur des critères individualisés basés sur l'âge de marche et il est désormais question de prendre l'âge réel de l'enfant, fixé à 15 mois, pour définir ce nombre. Que l'enfant marche ou pas, il y aura une professionnelle pour cinq enfants pour les moins de 15 mois et une pour huit pour les autres.
On parle aussi d'un accueil possible en surnombre de façon exceptionnelle, mais sans savoir ce que recouvrent ces termes, ce qui laisse craindre le pire puisque les crèches sont toujours en surnombre et que l'exceptionnel y est déjà quotidien. Ensuite, il y a la surface d'accueil pour les enfants. Aujourd'hui de 7 m² par enfant, les textes envisageraient de la ramener à 5,5 m² ! Une loi de 1999 sur la réglementation de l'accueil des chiens dans les chenils accorde 5 m² par animal ! À terme cela veut donc dire moins de professionnelles par enfant et des conditions d'accueil bien dégradées.
Rien de positif ?
Il semblerait qu'ils reviennent en arrière sur un point, celui du ratio d'encadrement. Dans les crèches publiques travaillent à la fois des éducatrices, des puéricultrices, des auxiliaires de puériculture formées et diplômées et des personnes qui n'ont aucune qualification spécifique. Après avoir été de 50-50, ce ratio est aujourd'hui de 40 % de professionnelles diplômées pour 60 % de personnes sans qualification. Il devait être à nouveau modulé, mais le gouvernement s'est engagé à le maintenir à 40-60.
Quelle suite pour le mouvement ?
Le collectif Pas de bébés à la consigne ! dont fait partie la CGT va lancer prochainement une pétition qui sera, on l'espère, signée largement et massivement en attendant que le gouvernement daigne bien nous faire parvenir son texte. Au vu de ces propositions, on appellera ou pas à une nouvelle mobilisation. Mais au-delà des professionnels, c'est aussi aux parents de faire entendre leur voix. L'avenir de nos enfants concerne tout le monde.