13 juillet 2019 | Mise à jour le 8 juillet 2019
La Tour de Malévoz est le livre d'un ouvrier métallurgiste, salarié dans l'automobile, écrivain contemporain et syndiqué à la CGT. « J'appartiens au monde du travail ! Et suis fier d'être ouvrier ! » revendique Silien Larios, son auteur.
La Tour de Malévoz de Silien Larios, avec les peintures de Philippe Fagherazzi, éditions Crises et tentations, avril 2019, 112 pages, 13 euros.
Silien Larios travaille aujourd'hui à l'usine PSA de Saint-Ouen, qu’il nomme « Saint-Quentin » dans son livre. Une usine d'emboutissage dont le site aiguise l’appétit de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris, qui veut le récupérer pour construire l'hôpital Grand Paris-Nord.
On le voit travaillant à la chaîne, manipuler des pièces d'automobile à la sortie de l'emboutissage, dans le film documentaire C'est quoi ce travail ?, coréalisé en 2015 par Luc Joulé et Sébastien Jousse, tourné dans cette usine à l'occasion de la création musicale du compositeur Nicolas Frize.
Son livre ne s'inscrit pas dans la « littérature prolétarienne » mais dans la littérature tout court. L'auteur, Silien Larios, est à la recherche du « style ».
Silien Larios a participé à la grève de quatre mois en 2013 contre la fermeture de l'usine PSA à Aulnay-sous-Bois, qu'il surnomme « Bagnoles-les-Rancy ». Et aussi à celle de 2007, pour les salaires, pendant l’élection présidentielle. Il en a tiré un premier ouvrage, L'Usine des cadavres – Ou la fin d'une usine automobile au nord de Paris, en 2013. C'est ce qui lui a valu d'être invité en résidence à l'Hôpital psychiatrique de Malévoz , à Monthey dans le Valais, en Suisse, dans le cadre de « Malévoz quartier culturel », qui a pour but, entre autres, de « favoriser les liens entre le monde de la psychiatrie et la société ».
Cette épisode lui permet de respirer, de rencontrer des personnages dont il ne se moque jamais, qui ont chacun leur philosophie de la vie. Il en profite pour calmer ses propres névroses et respirer. C'est un pessimiste, mais un humaniste avant tout. S'il a parfois des désillusion profondes, sa boussole reste toujours orientée vers ceux qui luttent pour un monde fraternel, vers « les exclus de tous coins ».
Par moment, il est dans le rêve et l'hallucination, il laisse son esprit vagabonder, porté par les arbres parfois plus que centenaires et les « destins étranges ». Les frontières entre patients, visiteurs, soignants, voisins s'estompent et la poésie s'installe en toute liberté.
L'usine le nourrit mais sa respiration c'est l'art, le piano qui joue sans son, les discussions sur le cinéma, ses souvenirs d'un séjour en Argentine avec ceux qui reprennent en main leurs usines lâchées par des capitalistes nord-américains, à Buenos Aires (notamment Donnelly et Lear Corporation).
En contrepoint de son récit, figurent onze reproductions de peintures de Philippe Fagherazzi, qui a partagé cette résidence et livre son ressenti tout en couleurs et art brut des personnages qu'il a croisés, de la Tour de Malévoz, des fous et de ceux qui le sont moins. Un style qui résonne bien avec celui de Silien Larios.