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Revitaliser notre système sanitaire en convergence avec une filière industrielle

14 août 2020 | Mise à jour le 19 août 2020
Par
Deux universitaires (Jean-Pierre Escaffre et Jean-Michel Toulouse) et un syndicaliste (Jean-Luc Malétras) analysent le déclin de la branche industrielle dédiée à la santé. Les auteurs préconisent la reconstruction de cette filière française d'excellence et un pilotage démocratisé de la santé publique.

Pénurie de masques, de médicaments, de gants, de respirateurs… Le moins qu'on puisse dire est que la crise de la Covid-19 a montré à quel point les stratégies industrielles de recentrage sur le cœur de métier, de délocalisation, d'externalisation, le flux tendu et le zéro stock consubstantiel du lean manufacturing ont mis à genoux la sixième économie mondiale. Comment la France, qui se targuait du meilleur système santé du monde, a-t-elle pu en arriver là ?

Jean-Pierre Escaffre, docteur en sciences économiques et auteur d'ouvrages sur la gestion hospitalière, Jean-Michel Toulouse, docteur en droit public et ancien dirigeant de grands hôpitaux publics, ainsi que Jean-Luc Malétras, qui fut directeur de l'ISERES-CGT et coordinateur de la CGT du groupe Thales, ont uni leurs réflexions dans un ouvrage qui retrace les abandons politiques qui ont mené à ce fiasco.

Les dégâts de la désindustrialisation

Le savoir-faire français en matière de production d'équipements de santé était reconnu mondialement, or au cours de décennies de désindustrialisation, la France a abandonné toute vision stratégique nationale et bradé sa maîtrise technologique et ses brevets à des acteurs étrangers. L'un des cas les plus emblématiques de cette excellence dilapidée est celui de la CGR et de l'expertise désormais perdue dans l'imagerie médicale.

Les auteurs soulignent le processus mis en œuvre avec des normes et équipements étrangers. En remplacement de nos fleurons, les équipements standardisés livrés sur étagère génèrent une dépendance se révélant à la fois coûteuse et inadaptée aux besoins de notre système.

Pis, l'utilisation de ces technologies – qui n'ont rien de neutre – avec des professionnels de plus en plus contraints à des tâches de numérisation ou de reporting – ont profondément modifié le sens du travail des professionnels de la santé. Et les dangers ne s'arrêtent pas là, ne serait-ce que pour les risques de sécurisation des données mises entre les mains de sociétés américaines.

Une autre organisation de la santé

Ces évolutions se conjuguent avec un système de santé public miné par les politiques d'austérité et les dérives managériales comme celles qui a conduit à la mise en place de la tarification à l'acte (T2A) dans les hôpitaux. De leur côté, les hôpitaux privés ont accru leurs parts de marché.

Tous ces ingrédients se sont cumulés pour arriver à la catastrophe sanitaire que nous traversons. En référence au programme du Conseil National de la Résistance, les auteurs estiment nécessaire de reconstruire la santé publique en lien avec une industrie répondant aux besoins nationaux.

Cela implique une nouvelle organisation de l'hôpital et de sa gouvernance, une politique de santé qui laisserait plus de place à la démocratie, notamment au niveau local avec l'implication des citoyens pour la définition des choix de gestion guidés par les besoins. Pour les auteurs, l'hôpital doit notamment retrouver son autonomie financière.

Un système sanitaire en lien avec l'industrie

Convaincus que ce qui fut possible dans un pays ruiné à l'issue de la guerre l'est toujours aujourd'hui, les auteurs plaident pour la refondation d'un système sanitaire national en interaction avec la création d'une filière industrielle dédiée au soin. Ils préconisent à cet égard la création de centres de recherche, d'innovation et de prototypages qui permettraient de développer un lien direct, répondant au mieux aux besoins entre le système de soins et l'industrie.

Dénonçant le gaspillage actuel des fonds publics (au travers du CIR), les auteurs enjoignent d’adopter une autre politique pour créer des champions industriels, mutualiser ou regrouper les start-ups. « Créer un Siemens français ne coûterait que 500 millions d'euros en regroupant 200 start-ups (…) C'est ce type d'action qui a permis la création de la SNCF, d'EDF etc. après la guerre. »

Les solutions préconisées par les auteurs sont évidemment à contre-courant de la politique actuelle. D'aucuns pourront décrier certaines de leurs propositions comme de veilles recettes. En ceci, ils pourront s'appuyer sur la modernité et les excellents résultats des réformes successives de ces quarante dernières années.

Sommaire de l’ouvrage
Le livre s’articule autour de deux grands chapitres :
Partie 01 – Conditions d'une industrie de santé souveraine
Rappels historiques
I. Toute politique sanitaire s'exécute sur la base de branches industrielles souveraines
II. Le contexte français actuel
III. Le cas des technologies de l'imagerie médicale : les enjeux aujourd'hui
IV. Les effets de la financiarisation sur la distribution de médicaments
V. Le potentiel encore important d'investissements du système hospitalier public en France
VI. La destruction du système hospitalier public
Partie 02 – Propositions de mesures immédiates pour reconstruire une filière santé souveraine maîtrisée par la nation
I. Les technologies au service de qui ?
II. Créer une branche industrielle dédiée au domaine sanitaire
III. Propositions de démocratisation
Conclusion
De Jean-Pierre Escaffre, Jean-Luc Malétras, Jean-Michel Toulouse, juin 2020,
Éditions « Manifeste » 119 pages, 15 euros
https://dessoinssansindustrie.fr/Lire les premières page gratuitement en PDF
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