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ÉCOLOGIE

La police de l'environnement ne veut plus servir de bouc émissaire

22 janvier 2025 | Mise à jour le 22 janvier 2025
Par | Photo(s) : © Guy Leroy / Collectif DR
La police de l'environnement ne veut plus servir de bouc émissaire

Remis en cause par le Premier ministre lors de son discours de politique générale, les syndicats d'agents de l'Office français de la biodiversité (OFB) ont appelé à la grève des contrôles. Victimes d'attaques répétées depuis un an sous la pression des lobbies agricoles, ils attendent des excuses publiques et la reconnaissance de l'utilité de leurs missions de police de l'environnement.

Pas de constats en cas d'attaque de troupeau par un prédateur ou en cas de pollution d'un cours d'eau, plus aucun avis technique ni aucune mission de police jusqu'à ce que des excuses publiques soient formulées… Depuis le 17 janvier, une grande majorité des agents publics de l'Office français de la biodiversité (OFB) ont répondu au mot d'ordre de grève partielle lancé par leur intersyndicale (CGT Environnement, FSU, FO OFB, Unsa Ecologie…) en guise de protestation contre les propos tenus à l'encontre de leurs missions par le nouveau locataire de Matignon. Lors de son discours de politique générale, François Bayrou a beaucoup choqué les fonctionnaires de police en charge de la préservation du vivant.

Le Premier ministre, par ailleurs peu prolixe sur les questions d'écologie dans son discours, s'est livré à un réquisitoire contre les agents publics, qualifiant de « faute » le fait de se présenter sur les exploitations agricoles « avec une arme à la ceinture, dans une ferme déjà mise à cran ». Des propos qui ne passent pas du côté des syndicats de l'OFB. « C'est une trahison, un gros désaveu de nos agents dont la mission est de faire respecter la loi. C'est extrêmement choquant », s'indigne Sylvain Michel, responsable CGT à l'OFB.

En charge de la protection de la biodiversité dans les milieux aquatiques, terrestres et marins, les syndicats déplorent les nombreuses attaques dont les agents font l'objet de la part, notamment, des gros syndicats agricoles. « Cela fait un an qu'on fait le dos rond alors qu'on subit des calomnies, avec une cinquantaine de nos implantations qui ont été saccagées ou taguées. Les propos du Premier ministre sont démagogiques et populistes, ils peuvent attiser la méfiance vis-à-vis des agents et les mettre en danger en discréditant leur action. Par ailleurs ils ne reflètent pas la réalité : on a généralement de bonnes relations sur le terrain avec les agriculteurs, avec des agents qui ne verbalisent pas systématiquement et font œuvre de pédagogie », fait valoir Paul-Emilien Toucry, secrétaire général adjoint de FO OFB.

Les propos de François Bayrou interviennent dans un contexte déjà tendu. « La crise agricole de janvier 2024 a montré que les conditions pour que de nouvelles agressions surviennent sont largement réunies », alertaient en septembre l'intersyndicale lors d'un hommage rendu à deux agents décédés dans l'exercice de leur fonction. La profession, encore très marquée par la mort de deux fonctionnaires de l'OFB abattus en 2004 en Dordogne par un agriculteur, s'est vue imposée en décembre par une circulaire « un port d'arme discret ». Une concession à la puissante FNSEA (Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles), qui souhaite le désarmement complet des agents. « Les armes sont conçues pour protéger les agents, elles ont une fonction de dissuasion. Certains agriculteurs sont aussi chasseurs et disposent d'un fusil, on en a aussi vu foncer sur des agents avec un tracteur. Sans cet équipement, les agressions seraient plus fréquentes », plaide Sylvain Michel.

Pour le syndicaliste, les déclarations du Premier ministre sont avant tout un « écran de fumée » pour éviter d'aborder les véritables problèmes de la profession agricole : écarts dans les niveaux de revenu ; dépendance aux produits phytosanitaires et phytopharmaceutiques ; impact de la course au machinisme sur la biodiversité (arrachages de haies, arasement des talus…).

Des sujets soigneusement évités par François Bayrou lors de son intervention publique. Le Premier ministre ayant préféré interroger l'utilité de conserver « 1 000 agences, organes ou opérateurs » qui « exercent l'action publique ». Des agences sans « contrôle démocratique réel », pour François Bayrou, qualifiées de « labyrinthe dont un pays rigoureux et sérieux peut difficilement se satisfaire ». Des propos qui pourraient être le prélude à une nouvelle rationalisation des moyens alors que les dotations de l'OFB ont déjà enregistré une baisse de 28 millions l'an dernier avec la suppression à la clef de 25 équivalents temps plein.