Simon Delétang, planches de salut
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Dans un décor grandiose, reproduisant une gare de Varsovie, la famille Gombrowicz accompagne le petit dernier, Witold (Erwan Ha Kyoon Larcher), écrivain en herbe, en partance pour l'Argentine, l'été 1939. La mère s’étant trompée sur les horaires, la famille devra y patienter toute une nuit. Au milieu des chamailleries familiales, pointe la montée du nazisme alors que la Pologne ne va pas tarder à être envahie. Le père reproche à un de ses fils son nez trop long et à sa femme, son judaïsme malgré sa conversion. Il se réjouit par contre de la liaison de Witold avec une prétendue jeune Allemande.
Jusqu’ici, tout se tient mais le metteur en scène Christophe Honoré va vite tout faire éclater. La fille (géniale Marlène Saldana) va partir dans une transe mystique des plus délirantes qui nous déroute autant qu’elle nous fait rire. Et voilà les comédiens déchaînés sur un morceau rock du groupe Queen.
À la loufoquerie succède maintenant une conférence philosophique sur la fin de l’Histoire où sont convoqués Hegel, Marx, Jacques Derrida ou Francis Fukuyama. Soyons honnêtes, on ne comprend pas tout mais on s’accroche en ces temps d’incertitudes, en quête de réponses quant au devenir d’un monde en pleine tourmente. La thèse de Fukuyama, selon laquelle l’Histoire s’achèvera le jour où un consensus universel sur la démocratie libérale mettra un point final aux conflits idéologiques, nous inquiète. D’autres nous interpellent comme celle qui suggère que « la fin de l’Histoire ne signifie pas la fin des évènements mondiaux, mais la fin de l’évolution de la pensée humaine à propos des principes fondamentaux qui gouvernent l’organisation politique et sociale ».
Mais trêve de réflexions, nous sommes replongés dans l’histoire avec un grand H ou plutôt dans ce qu’elle fût et aurait pu être. La conférence de Munich de septembre 1938 réunissant Hitler, Mussolini, Édouard Daladier et Neville Chamberlain, tous deux affublés de têtes d’autruches, est revisitée. S’y joignent Staline et le président tchécoslovaque Edvard Benes. Et là, tout est permis, parce que la pièce ose tout, mêlant les accords de Munich comme ceux de Yalta. Les grands se partagent le monde et se tapent une sacrée beuverie. Staline chante du Cabrel, Daladier entonne Fréhel… Que répondre au jeune Witold, le fils rouge de la pièce, qui voudrait refaire l’histoire pour éviter la barbarie ? Que sans la seconde guerre mondiale ne seraient pas nées les éditions de Minuit, et que l'œuvre de Samuel Beckett nous serait restée inconnue, que sans Hiroshima, Marguerite Duras n’aurait pu réaliser un de ses plus grands romans ? Un brin réticents au départ pour rire sur la tragédie historique, on se laisse vite transporter trois heures durant dans cette clownerie sans limite et on salue une telle audace.
« Fin de l’Histoire »,
mise en scène de Christophe Honoré.
Au théâtre de La Colline,
jusqu’au 28 novembre,
puis en tournée jusqu’à fin février 2016
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