28 décembre 2015 | Mise à jour le 22 février 2017
Par
Dee Brooks
| Photo(s) : Patrice Normand/Leemage
La vie de l'actrice Frances Farmer avait déjà fait l'objet du film Frances. En lui consacrant son beau roman, Notre désir est sans remède, Mathieu Larnaudie interroge la femme enfermée dans l'image.
Si elle se destina d'abord au journalisme après avoir écrit un petit essai remarqué, Frances Farmer deviendra vite l'une de ces jolies blondes au visage parfait et au corps sculptural que les studios hollywoodiens consommaient avec voracité. Mais Frances était une rebelle et n'entendait pas se conformer à l'image lisse qu'on attendait d'elle. Dans un monde d'hommes, elle se comportait comme eux, fumant, buvant, ayant des aventures. Une émancipation qui, dans les années 1930, fut un peu trop pour une Amérique puritaine.
Prisonnière des débuts de la société du spectacle, la jeune femme – qui fut magnifiquement incarnée par Jessica Lange au cinéma – commit des écarts qui l'envoyèrent tout droit dans une institution psychiatrique. On ne badinait pas avec l'ordre et la morale… Elle y subit des traitements de choc, peut-être des viols, quoi qu'elle ait elle-même donné des versions différentes de ses séjours dans quelques « nids de coucous » aux méthodes radicales.
Transcendé par l'écriture très ciselée de Mathieu Larnaudie, ce roman inscrit la vie plus ou moins romancée de la belle Frances dans une problématique plus large. Son dégoût du système, sa liaison avec le dramaturge « rouge » Clifford Odets et ses frasques s'inscrivent dans la description, d'une très belle eau littéraire, de l'enfermement d'une femme dans une image où elle refuse de se laisser piéger. Et Frances Farmer paya au prix fort sa modernité et sa révolte.
Notre désir est sans remède, de Mathieu Larnaudie. Actes Sud. 240 p., 19,30 €