Les négociations des routiers au point mort
C'est LE point de blocage de ces négociations : l'augmentation des salaires et du pouvoir d'achat des professionnels de la route (transport de marchandises, de voyageurs et salariés sédentaires de la logistique). Alors que l'intersyndicale (CGT, FO, CFTC, CFE-CGC) et la CFDT revendiquent depuis le début des négociations, il y a plus de quatre mois, 5% d'augmentation de salaire pour tous, le patronat, représenté par la FNTR, l'OTRE, le TLF et l’UNOSTRA*, campe sur ses positions : 2% d'augmentation sur les plus bas salaires et 1% sur les plus hauts. «En fait, il ne s'agit pas d'une réelle augmentation, c'est juste un rattrapage au taux national du Smic horaire. Selon notre grille conventionnelle, les salaires les plus bas sont à 9,51 euros de l'heure. Avec les 2% d'augmentation qu'ils nous proposent, on arriverait donc à 9,61 euros, soit le Smic horaire en 2015. Merci! Les patrons se mettent juste en règle, c'est tout», décrypte Jean-Louis Delaunay, négociateur de la CGT sur ce dossier et responsable du transport marchandises la fédération des transports CGT.
Toutefois, une petite brèche s'est ouverte hier du côté de l'OTRE. La fédération des TPE et des PME du transport consentirait à monter de 2,2% les plus bas salaires et de 1,4% les plus hauts. Mais sa position est loin de faire l'unanimité des autres fédérations, plus puissantes. Encore moins de l'intersyndicale.
«On est conscient d'être très loin de ce qu'on demande mais, dans le même temps, on est satisfait qu'il y ait des petites ouvertures comme le délai de carence maladie, la mutuelle et la GAR (la garantie de rémunération annuelle)», explique Jérôme Vérité, secrétaire général de la fédération CGT des transports et meneur en chef de ces négociations.
Les «petites ouvertures» dont parle Jérôme Vérité, c'est par exemple la diminution de 5 à 3 jours du délai de carence lors des arrêts maladie. «Il y a déjà beaucoup d'entreprises qui offrent ce type de prestations à leurs salariés, mais ça aurait permis de généraliser le système. Nous, on demandait à ce qu'il n'y ait aucun jour de carence», tempère Jean-Louis Delaunay.
Autre avancée : la part de la mutuelle des salariés prise en charge par l'employeur qui pourrait passer de 50 à 60%. Là encore, on est loin de ce que demandait l'intersyndicale –une prise en charge totale – mais c'est déjà ça.
Enfin, il y a la garantie de rémunération annuelle, une forme de salaire minimum obtenue de haute lutte après les grèves de 1996-1997, qui pourrait être revue à la hausse, passant de 3,3% à 4%.
Mais de treizième mois et d'augmentation de salaires, la FNTR, première fédération patronale du secteur, ne veut pas entendre parler.
«Si on met bout à bout toutes ces petites avancées, ça fait environ 30 euros d'augmentation mensuelle par salarié. On est loin des 100 euros gagnés en pouvoir d'achat que l'on souhaitait», rappelle Jean-Louis Delaunay.
Organisations syndicales et patronales se sont donc donné rendez-vous lundi prochain pour conclure, tous l'espèrent, ces discussions. Pour Jérôme Vérité, «l'objectif, c'était déjà, de ne pas briser une nouvelle fois les négociations». La séance du 20 janvier s'était soldée par un échec, le patronat ayant abandonné brutalement la table des discussions. De ce point de vue, les dix heures de pourparlers du 3 février sont une réussite. Mais la CGT prévient, «on n'écarte pas une nouvelle mobilisation s'il ne se passe rien», faisant planer la possibilité d'une nouvelle mobilisation de terrain, comme ce qui a été pratiqué partout en France entre le 18 et le 28 janvier.
* Fédération nationale des transports routiers (FNTR), Organisation des TPE et PME du transport routier (OTRE), Transport et logistique de France (TLF), Union nationale des organisations syndicales des transporteurs routiers automobiles (UNOSTRA).
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EN SAVOIR+
– SORTIR DE L’IMPASSE
Tribune de Jérôme Vérité, secrétaire général de la fédération CGT des Transports
– GRÈVE MASSIVE DES ROUTIERS PARTOUT EN FRANCE
20/01/2015 Action coup de poing des routiers de France, en grève depuis dimanche soir pour des augmentations de salaire. Hier, de nombreux sites industriels étaient bloqués partout en France, provoquant près de 800 kilomètres de bouchon sur les routes et une grosse pression pour leurs patrons en pleines Négociation Annuelles Obligatoires.