Forum social : la NVO rencontre les acteurs du mouvement social
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« Si rien n'est fait pour inverser les choses, on comptera pour chaque match joué lors de la coupe du monde de foot au Qatar pas moins de 63 travailleurs morts lors des chantiers. »
C'est par cette effarante menace que s'est ouverte la table ronde de la soirée du vendredi 11 septembre au Forum social de la Fête de l'Humanité. À l'initiative de sa fédération de la construction, du bois et de l'ameublement, la CGT souhaitait donner un nouvel élan à la campagne « Carton rouge contre la FIFA » de l'Internationale du Bois et du Bâtiment.
Sur le plateau du débat animé par Laurent Mossino, rédacteur en chef d'Ensemble, étaient réunis l'ex-ministre de la Jeunesse et des Sports, Marie-George Buffet ; deux syndicalistes népalaises, Binda Pandey et Beli Maiya Ghale ; Marie-Laure Guislain, de l'association de juristes Sherpa ; François Davoust, conseiller de la CGT ; Serge Pléchot, secrétaire général de la CGT construction.
Ce dernier a souligné que les atteintes à la dignité et aux droits des travailleurs, qui construisent les équipements sportifs et culturels pour les grandes manifestations internationales et pour le compte de multinationales comme Vinci, ne datent pas du chantier de la coupe du monde de foot au Qatar, mais qu'elles s'y sont aggravées et amplifiées.
Serge Pléchot n'a pas craint de parler « d'esclavagisme moderne » pour qualifier les conditions imposées à ces travailleurs, dont beaucoup sont des ressortissants népalais. À l'appui de cette affirmation, l'avocate Marie-Laure Guislain a témoigné de ce que l'association Sherpa a constaté sur place en se rendant sur les chantiers avec une délégation syndicale de la CGT.
Elle explique notamment en quoi ces travailleurs sont considérés comme « victimes de crime économique » à l'instar des 1 138 morts lors de l'effondrement du Rana Plazza, au Pakistan. Se fondant sur des critères dont elle a vérifié sur place qu'ils étaient remplis, l'association a déposé plainte contre le groupe Vinci pour « travail forcé ou réduction en servitude » : ces travailleurs sont « victimes de menaces, leurs passeports étaient confisqués sur place, au moins jusqu'en janvier 2015. Ce sont des travailleurs vulnérables, payés à des salaires sans rapport avec le travail fourni, que l'on fait vivre et travailler dans des conditions incompatibles avec la dignité humaine. »
Certains ont témoigné qu'ils travaillaient 66 heures par semaine, alors que la loi qatarie fixe une limite de 60 heures hebdomadaires. Ils triment sans protection au soleil, par plus de 40 °C ou sous terre sans aération. Ils vivent à huit par chambrée, alors que la loi locale fixe un maximum de quatre personnes.
La représentante de Sherpa a insisté sur le « besoin d'une loi qui responsabilise les multinationales pour les dommages et les violations de droits humains qu'elles occasionnent à l'étranger sur les salariés et sur les communautés ».
Dans des conditions qu'on imagine très difficiles, les syndicats népalais sont intervenus d'abord quasi clandestinement, puis de manière plus officielle, avec le soutien notamment de la Confédération syndicale internationale (CSI) ou d'ONG afin d'obtenir des informations et surtout des améliorations des conditions de vie et de travail.
Les syndicats népalais ont aussi alerté les médias sur les conditions faites à ces travailleurs. Binda Pandey a témoigné « d'améliorations », même si les atteintes à la dignité et aux droits humains se perpétuent.
Pour Serge Pléchot, la campagne initiée en France par la CGT construction fait son chemin et renforce l'idée d'un « label éthique, social et humain dans tout acte de construction d'édifices sportifs, culturels ou de biens publics ou privés ».
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