Les syndicats, le Labour et Corbyn
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D'abord, quel est ce contexte social et économique particulier ? Et quelles sont les dispositions précises de cette « loi sur les syndicats » (Trade Union Bill) qualifiées de « plus grande répression syndicale lancée par les conservateurs depuis 30 ans » par le quotidien The Guardian ? Ensuite, qui est ce candidat inattendu, ancien syndicaliste, à l'opposé des « Blairistes », à la gauche de la gauche, qui s'attire la sympathie d'un large spectre partisan et qui remplit les salles de meetings ? Quelles sont ses propositions concrètes et que signifie le phénomène « Corbyn » alors que plusieurs mouvements citoyens de gauche essaiment en Europe ?
Un décryptage en deux volets, à la veille du verdict des élections internes du Labour, samedi 12 septembre. Le premier, aujourd'hui, sur La peau de l'État social et La peau du droit de grève.
Dans ce contexte social tendu, le Royaume-Uni a connu une série de conflits : plus de 700 000 jours de grève d'avril 2014 à avril 2015, essentiellement dans le secteur public. Le secteur des transports (train, métro) est en première ligne. Le « Tube » londonien était en grève début août contre un plan d'extension du service durant toute la nuit, les syndicats – RMT en tête – dénonçant une aggravation des conditions de travail et une détérioration de l'équilibre vie au travail/vie familiale.
Les services de santé ne sont pas en reste… Projetant de durcir encore les conditions sociales dans le pays à de multiples sujets, les conservateurs prévoient de se prémunir contre les probables réactions à venir. En s'attaquant directement au droit de grève.
« Le droit de grève, depuis l'ère Thatcher, est lié à un vote postal de la part des salariés potentiellement concernés : 50 % des salariés doivent participer et la majorité d'entre eux s'exprimer favorablement, explique le chercheur. Ces exigences avaient été dénoncées par les syndicats, puis utilisées par eux pour montrer la force des demandes des salariés prêts à y répondre pour pouvoir faire grève. Le nouveau gouvernement conservateur veut faire dépendre l'accès à la grève dans la quasi-totalité des services publics d'une réponse de 50 % au moins des salariés concernés et d'une réponse favorable par 40 % des salariés concernés ».
Pour 1 000 salariés concernés, 500 réponses dont 400 favorables devront être retournées au syndicat. En outre, le courrier d'appel au vote devra comprendre une « description claire » des enjeux de la confrontation et des termes de la grève envisagée. Le vote devra être renouvelé tous les quatre mois pour que l'action de grève puisse être entreprise ou continuée. Le début de la grève devra être signalé deux semaines à l'avance et ses formes annoncées, « y compris les messages sur Facebook », s'indignent des universitaires qui signent une lettre publique de dénonciation sous le titre « La loi sur les syndicats menace le droit de grève » (TUC, « Trade Union Bill threatens right to strike »).
<>A contrario, les employeurs, eux, seront autorisés à recourir à des salariés de remplacement des grévistes. Les piquets de grève jugés « menaçants » relèveront de poursuites criminelles et non plus du civil ; le syndicat gréviste devra mettre un de ses membres à disposition de la police pour surveiller conjointement les pratiques des piquets.
Des limites individuelles aux disponibilités horaires accordées aux délégués syndicaux seraient également envisagées dans le projet de loi. Le service de certification syndicale (Certification Officer), qui contrôle les déclarations syndicales concernant les effectifs d'adhérents, pourra exiger des syndicats des rapports détaillés sur leurs activités grévistes et éventuellement leur infliger des amendes allant jusqu'à 25 000 £ (35 200 €) en cas de manquement à cette requête.
Enfin, « ce projet exigera de tous les syndicats qu'ils demandent l'approbation de tous leurs membres au versement d'une partie de leur cotisation aux fonds politiques que la plupart des organisations ont constitués, note Christian Dufour. Ces fonds se montant à environ 25 millions de livres (35,3 millions €) par an et provenant de 4,5 millions de contributeurs ». La plupart des fonds sont gérés par des syndicats affiliés au TUC et sont destinés au Parti travailliste. Ou comment faire d'une pierre, deux coups, la peau aux syndicats et au Labour… Mais le Labour réserverait-il des surprises ?
Demain, la suite de notre dossier : « Le nouvel homme du Old Labour »
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