12 mars 2021 | Mise à jour le 15 mars 2021
Accusé d'avoir giflé un policier lors d'une manifestation, le secrétaire général de l'UD CGT 93 a été relaxé par le Tribunal de Bobigny grâce à une vidéo. Dans le contexte de la loi Sécurité globale, le procureur fait appel du jugement. La CGT dénonce un acharnement « dont le caractère politique est évident. »
Le 22 février 2021, le Tribunal de Bobigny relaxait Hervé Ossant, secrétaire général de l'UD CGT 93. Accusé de faits de violence envers un policier durant une manifestation, le syndicaliste avait pu démontrer son innocence grâce à une vidéo. »
Face aux images incontestables, l'accusation s'est alors muée en « outrage » à policier. Et le Tribunal n'a pu que constater la vacuité du dossier. Mais ceci était sans compter sur l'acharnement politique du pouvoir et de la justice de classe.
Le secrétaire général CGT 93 relaxé des accusations de violence sur un policier grâce à une vidéo
Le pouvoir veut-il des exemples ?
Nous sommes dans le contexte d'un état d'urgence sanitaire qui s'éternise, et où le Conseil de défense se substitue de fait pour une grande part au Parlement. Au détriment des libertés. La toute puissance de l'exécutif s'affirme davantage et le projet de loi de Sécurité globale vient encore envenimer le climat, puisque l'un de ses articles entrave la possibilité de filmer les interventions policières notamment lors des manifestations. Et en l'absence de preuves visuelles, la parole qui compterait serait celle des agents, assermentés.
« Le cas d'Hervé Ossant, secrétaire général de l'UD CGT 93 est emblématique, explique Céline Verzelleti, secrétaire confédérale de la CGT. Hervé participait à une manifestation où il était parfaitement identifié comme le responsable de la manif. Cela n'a pas empêché des membres des forces de l'ordre de le tirer, de l'interpeler, de le menotter. En plus, c'était une manifestation tout à fait pacifique. La disproportion est énorme, il ne s'agit pas de maintien de l'ordre, mais de répression visant à faire des exemples. »
Le procureur fait appel sans en justifier la raison
Alors que les syndicalistes, se félicitent de la décision de relaxe, la décision du procureur de la République d'interjeter appel annoncée le 10 mars 2021 sonne comme une provocation.
Maître Laurence Camboni, avocate d'Hervé Ossant n'en revient pas : « Dès l'origine, on n'a pas compris la position du parquet. Nous avions des poursuites pour violences volontaires. Or avec la vidéo, on a vu que ces poursuites ne tenaient pas la route. Du coup, le parquet a voulu requalifier en outrage. C'est incompréhensible. Le Parquet a dû instruire sur un dossier tronqué parce que les déclarations des policiers ne donnent pas une vraie version des faits, enduisant des poursuites pour violence. Et quand ce constat est établi, on efface tout ça et on instruit pour un outrage. Cela, déjà, n'est pas tolérable et on aurait compris qu'ils abandonnent les poursuites. Aujourd'hui le procureur fait appel, mais sans dire pourquoi parce que contrairement au civil, en pénal on ne dit pas pourquoi on fait appel », explique-t-elle, dénonçant une décision politique.
Acharnement
Pour Hervé Ossant, il s'agit d'un acharnement « On a du mal à comprendre pourquoi, si ce n'est pour gagner du temps et empêcher que nous portions plainte pour dénonciation calomnieuse. Pour le moment, le jugement de février n'a été rendu qu'oralement, il faut entre un et six mois pour l'obtenir et on ne sait même pas sur quoi va porter la procédure d'appel du ministère public. »
Bobigny : une vidéo démontre un mensonge policier pour criminaliser une manifestation syndicale
Un caractère politique évident
Dans une déclaration commune, l'UD CGT 93 et la Confédération CGT qualifient la décision du procureur d'interjeter appel d'« acharnement répressif dont le caractère politique est évident. »
Et d'analyser : « Dans le contexte d'examen du projet de loi Sécurité globale, marqué notamment par un fort débat citoyen sur la liberté de filmer les membres des forces de l'ordre dans l'exercice de leurs fonctions, il s'agit d'entretenir le doute s'agissant d'une affaire bien embarrassante pour les forces de l'ordre. Enfin, ce nouvel épisode judiciaire s'inscrit dans un contexte global de répression antisyndicale accrue et de judiciarisation des conflits sociaux. »
Face à la montée inquiétante des cas de répression antisyndicale, des violences policières lors des manifestations, des attaques contre les femmes, les hommes, les locaux mis à disposition des syndicats, des remises en cause de détachements syndicaux, la CGT a récemment décidé de rencontrer la défenseuse des Droits, d'interpeler le Medef et le ministre du Travail. Un cap semble être franchi avec les attaques contre des dirigeants de premier plan la CGT.