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Santé au travail

Banalisation des risques cancérogènes : les sapeurs-pompiers CGT des SDIS portent plainte

8 décembre 2023 | Mise à jour le 8 décembre 2023
Par | Photo(s) : GERARD JULIEN / AFP
Banalisation des risques cancérogènes : les sapeurs-pompiers CGT des SDIS portent plainte

Le collectif des agents CGT des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) a déposé plainte le 1er décembre au pôle santé publique du tribunal de Paris. Les sapeurs-pompiers dénoncent un mépris de leurs employeurs et du gouvernement n'agissant pas pour la santé des agents alors que l'exposition à diverses substances est reconnue comme « cancérogène pour l'homme ».

« Les sapeurs-pompiers sont les premiers exposés aux risques de cancer et rien n'est fait. ». Le temps d'une conférence de presse au siège de la CGT à Montreuil (93), le 4 décembre dernier, le collectif des agents CGT des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) a annoncé avoir porté plainte contre X pour « mise en danger d'autrui » auprès du pôle de santé publique du tribunal judiciaire de Paris. Identifiés depuis 20 ans par la profession, les risques de contamination liés à l'inhalation des fumées et à l'exposition à des matières toxiques comme l'amiante ou la suie ne sont pas pris en compte. Le syndicat a décidé d'en appeler à la justice constatant que la prise en charge de la santé des soldats du feu est inexistante ou inappropriée. « En 1986 on retrouve des publications qui alertent sur la toxicité des feux de forêts. Alors quand il s'agit d'un feu domestique hautement plus toxique dû à la multiplicité des agents chimiques, les risques de contamination sont élevés. Mais en France le gouvernement reste inerte sur le sujet et les solutions à apporter sont toujours absentes ! », alerte Sébastien Delavoux, animateur du collectif Sdis de la CGT. Pourtant les études sur le sujet ne manquent pas. En 2003, le rapport Pourny émettait 200 recommandations pour améliorer les conditions de travail des sapeurs-pompiers. C'est ensuite la Caisse Nationale de Retraite des Agents des Collectivités Locales (CNARCL), en 2017, qui détaillait 43 mesures de prévention pour lutter contre les risques liés à l'inhalation de fumée d'incendie lors de l'exercice professionnel. Malgré ces études, les pompiers dénoncent l'absence de mise en place d'un diagnostic efficace pour déceler les substances toxiques dans leur corps. « On va au feu, c'est notre métier, nous connaissons les risques. Mais rien n'est fait pour évaluer notre contamination ! On a enterré un camarade de 39 ans la semaine dernière, c'est vous dire que rien n'a changé. » déplore Angelo Carlucci, représentant du SDIS de Lille (59).

« Nos employeurs nous prennent pour de la chair à canon »

Lors des interventions pour un incendie, les sapeurs-pompiers ont bien entendu un appareil respiratoire et une combinaison thermique. Mais ces tenues ne protègent pas contre les composants chimiques qui passent à travers le tissu et attaquent les pores de la peau. On retrouve l'amiante et la suie, deux substances hautement toxiques que les pompiers connaissent bien et qui, avec le temps, à force d’exposition, détériorent la santé. Mais Annie Thébaud-Mony, directrice de recherche honoraire à l'Institut national de la santé et de la recherche médicale, rappelle que « l'amiante ne doit pas être être l'arbre qui cache la forêt. Des hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), un cancérogène, sont présents dans tous les feux ». Une étude menée en 2022 par le Centre international de rechercher sur le cancer (CIRC) concluait logiquement que l'exposition professionnelle des pompiers était reconnue comme «cancérogène pour l'homme ».

Mépris des conditions d’exercice

Pourtant là encore, rien ne s'est passé, les sapeurs-pompiers travaillent toujours dans les mêmes conditions. « Quand il y a eu les violences urbaines, en juin, on éteignait 20 feux de voitures par garde, se rappelle Benjamin Calvario, de la CGT Sdis 59. Les tenues étaient polluées mais on les a gardées. Ensuite, on a pollué le véhicule et le centre de secours. Il n'y a eu aucune procédure de décontamination. ». Le président de la Fédération autonome des sapeurs-pompiers professionnels, Xavier Boy abonde « Il y a un mépris total des conditions d'exercice. Les temps d'exposition ne devraient qu'être de 20 à 25 minutes par agents avec des effectifs suffisants pour chaque intervention. Rien de tout cela n'est respecté par nos employeurs qui nous prennent pour de la chair à canon. » Même constat chez l'avocat, maître Philippe de Castro qui représente la CGT : « Les règles élémentaires du droit du travail pour les sapeurs-pompiers ne sont pas respectées, les employeurs qui mettent en danger la santé et la vie de ces personnes doivent répondre de leurs responsabilités ». Pour Sébastien Delavoux  le combat doit devenir national, « l'heure n'est plus aux mesurettes, les pompiers mérite eux aussi de vivre en bonne santé. »