Les entreprises sous emprise de la finance
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Vieille de plus d'un siècle, l'imprimerie de fabrication des billets de banque, sise à Chamalières (Puy-de-Dôme), nécessitait une modernisation de son outil industriel. Depuis 2018, un projet nommé « Refondation » approuvé et même plébiscité par les syndicats de la BDF gisait pourtant dans les alcôves de la banque qui en a maintes fois reporté la mise en oeuvre.
Resurgi en 2022 au détour de la nomination d'un nouveau directeur de l'imprimerie, l'exécution du projet « Refondation », qui nécessite désormais 250 millions d'euros d'investissement, fait alors l'objet d'un classique chantage à l'emploi : » soit on acceptait un plan de compétitivité avec réduction du nombre d'imprimeurs, de 4 à 3 autour des nouvelles machines, soit on serait tenu pour responsable de l'abandon du projet« , explique Jérôme Dargent, secrétaire du syndicat CGT-BDF de l'imprimerie de Chamarlières.
Osé mais grotesque, ce chantage à l'emploi aura produit les effets inverses de ceux espérés par la direction : une mise en grève immédiate des imprimeurs qui a entraîné l'ouverture d'un conflit social d'ampleur, d'une durée de sept mois. « On a fait une sorte de grève perlée de 59 minutes par jour – car au-delà, c'est illégal – à chaque fin de poste, ce qui implique l'assèchement de l'encre et la nécessité de procéder à un nettoyage de la machine avant chaque prise de poste», précise Jérôme Dargent qui se félicite de cette réappropriation de l'outil de travail par les salariés.
Déjà en lutte, et de longue date, pour l'amélioration de leurs conditions de travail très pénibles, les imprimeurs ont vite été rejoints par les ouvriers de la chaîne graphique. Ensemble, ils ont élaboré un cahier revendicatif fondé sur un argument imparable : la souveraineté nationale dans la production de billets de banque. Pour l'Etat français, premier pôle européen assurant la production de 2,5 milliards de billets par an (50% d’euros et 50% de devises étrangères), perdre la main sur cette activité fiduciaire hautement stratégique serait en effet lourd de conséquences, politiques, économiques et sociales.
Bien conscients de l'importance de cet enjeu, les grévistes ont donc à leur tour posé leurs conditions de sortie de conflit:
Alors que la direction de l'imprimerie de Chamarlières annonçait, le 9 juin, son intention d'abandonner le projet « Refondation » en raison, officiellement, de son désaccord avec la CGT-BDF, les salariés réunis en assemblée générale ont voté à une écrasante majorité (75 %) les conditions de sortie de conflit portées par leur syndicat CGT-BDF (syndicat ultra-majoritaire, devant CFDT et FO). Conditions acceptées, in fine, par le gouverneur de la Banque de France sollicité in extremis par la CGT-BDF au terme de sept mois de « dialogue social » infructueux avec la direction locale de Chamarlières.
Soutenus par les élus locaux du Puy-de-Dôme, ainsi que par la secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet, qui s'est adressée au ministre de l'économie et des finances publiques, Bruno Le Maire, les salariés de l'imprimerie ne cachent pas leur satisfaction : « nous avons mené une lutte admirable, exemplaire en solidarité et en unité syndicale, du jamais vu depuis 25 ans à la BDF. Nous nous sommes battus pour une cause noble : la souveraineté nationale dans le domaine fiduciaire, le maintien d'une activité essentielle et le maintien des emplois dans un département dévasté par la désindustrialisation », conclut Jérôme Dargent.
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