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Habillement

Camaïeu, La Halle, NAF NAF : plusieurs enseignes menacées après la fermeture imposée par le confinement

4 juin 2020 | Mise à jour le 11 juin 2020
Par | Photo(s) : Riccardo Milani / AFP
Camaïeu, La Halle, NAF NAF : plusieurs enseignes menacées après la fermeture imposée par le confinement

Camaïeu, La Halle, Orchestra… Plusieurs enseignes de prêt-à-porter déjà fragiles sont menacées après la fermeture imposée par le confinement. Des milliers d'emplois sont menacés. Et des qualifications précieuses pourraient disparaitre. Entretien avec Karl Ghazi, porte-parole de l'Union syndicale CGT du commerce de Paris.

Le 26 mai dernier, Camaïeu, enseigne de prêt-à-porter féminin qui emploie 3 900 salariés en France, était placée en redressement judiciaire, apparaissant comme une victime directe de la crise sanitaire.

Thierry Siwik, délégué CGT, a dénoncé « un plan social déguisé » à l'œuvre « depuis plusieurs années ». « Chaque mois, depuis trois ans, on nous annonce, sous motif d'une baisse d'activité, entre quatre et cinq fermetures de magasins, cela évite de procéder à un plan social », a-t-il argüé. Et de conclure : « pour nous, ce placement en redressement judiciaire va servir à restructurer en profondeur l'entreprise et on craint de nombreux licenciements. »

Dans le sillon de Camaïeu, plusieurs magasins de vêtements se sont déclarés en grande difficulté après plus de deux mois de fermeture imposée, ce qui laisse craindre des licenciements massifs dans le secteur. Le point avec Karl Ghazi, Secrétaire général de l'Union syndicale CGT du Commerce de Paris.

Le secteur de l'habillement était-il déjà en difficulté avant la crise sanitaire ?

C'est un secteur hyperconcurrentiel où la pression sur les marges est très forte. On assiste à une multiplication des enseignes qui sont en même temps soumises à des loyers colossaux en centres-villes et à une baisse des prix constante, notamment depuis le début des années 2000 avec la fin des quotas avec la Chine — ce qui a mené à des approvisionnent massifs en Asie. Dans ce contexte, seules les plus solides peuvent survivre. La crise sanitaire est arrivée et a frappé de plein fouet les plus en difficulté.

Au-delà de Camaïeu, le groupe Vivarte qui regroupe La Halle, NAF NAF, André… Quelle analyse faites-vous de la situation ?

Là, c'est un double phénomène. C'est d'une part le recours massif aux LBO (Leveraged buy-out, rachat avec effet de levier. Montage financier permettant le rachat d'une entreprise par le biais d'une société holding) qui coûtent très cher à l'entreprise parce qu'elle doit rembourser sa dette à des taux très importants, et de l'autre celui d'une erreur stratégique au milieu de la décennie quand elle a décidé une montée en gamme, ce qui lui a valu de perde une bonne partie de sa clientèle plutôt populaire.

Que peut faire le syndicalisme ?

Continuer de batailler pour revendiquer la sauvegarde des emplois et des qualifications qui sont en jeu. Mais c'est compliqué. L'exercice du syndicalisme est très difficile dans ces entreprises. Elles sont de très grande taille, mais éclatées dans des centaines de sites qui regroupent très peu de salariés. Le délégué syndical va pouvoir rayonner sur très peu de magasins. Sans compter qu'il y a une très grande répression syndicale. Il y a souvent une hyper-concentration des élus avec des mandats centraux.

Du coup, la construction d'un rapport de force est quasi impossible et le droit du travail tel qu'il existe aujourd'hui ne permet pas de contourner ces difficultés. Chez Kiabi, par exemple, il faudrait à un délégué syndical, l’équivalent de 8 ans en heures de délégation pour pouvoir faire le tour de tous les magasins…

Qu'est-ce qui est en jeu ?

On parle de 14 000 emplois immédiatement menacés dans l'habillement succursaliste, ce qui représente 11 % du total de la branche (près de 120 000 salariés). On risque une casse sociale importante et la perte de savoir-faire, d'un professionnalisme mal considéré. Il s'agit de compétences très diverses et de qualifications trop peu reconnues. Une vendeuse doit savoir accueillir, mettre en rayon, faire du merchandising, gérer des stocks, conseiller, gérer une caisse, tout cela en même temps, c'est-à-dire en sachant gérer son temps de travail.

Or, c'est un milieu ultra-précaire, où le SMIC est la norme et les temps partiels généralisés. Les salaires à 700 € mensuels sont légion. L'éloignement entre le logement et le lieu de travail est un classique et les contraintes liées au métier sont également lourdes. L'exposition au bruit, les ports de charges, le travail debout, les traitements d'une clientèle parfois mal aimable… Bref, tout devrait concourir à une augmentation des salaires et une amélioration des conditions de travail. Or, c'est le contraire qui se produit. Et les femmes sont en première ligne. Elles constituent la grande majorité des salariés du secteur (90 % dans l'habillement de détail).

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