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COMMERCE ET SERVICES

Espagne : femmes de chambre en colère

18 juillet 2019 | Mise à jour le 18 juillet 2019
Par | Photo(s) : © Pau Barrena / AFP
Espagne : femmes de chambre en colère

Manifestation des femmes de ménage devant l'hôtel de ville de Barcelone, le 25 août 2018. L'une d'entre elles tient une pancarte où il est inscrit "Pour le droit à un travail décent".

Si l'Espagne reste pour beaucoup d'entre nous synonyme de soleil et de vacances, les conditions de travail des femmes de ménage dans les hôtels locaux sont, elles, loin d'être paradisiaques…

Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Avec 82 millions de visiteurs accueillis en 2017, derniers chiffres officiels, l'Espagne est devenue la deuxième destination touristique mondiale. Une activité qui génère désormais 14,9 % du produit intérieur brut du pays mais surtout, dans une Espagne où le taux de chômage tutoie les 15 %, emploie quelque 2,5 millions de personnes rien que dans l'hôtellerie. Bref, un secteur loin d'être anodin dans l'économie espagnole, dont l'embellie et les bons résultats de ces dernières années ne semblent pas pour autant profiter à tous. En témoigne la colère grandissante des plus humbles, des plus invisibles de ses salariés : les femmes de ménage.

Services externalisés

« Les problèmes ont commencé après la réforme du Code de travail qui a eu lieu en 2012 », explique Mari Carmen Casin, elle-même femme de ménage dans un quatre étoiles de la capitale et membre du syndicat espagnol UGT. « En favorisant les conventions d'entreprise aux dépends des conventions nationales par branche, cette réforme a permis aux hôteliers de commencer à externaliser certains services avec des coûts beaucoup moins chers. Et les plus touchés par cette externalisation ont été ceux du nettoyage et des femmes de ménage dans les hôtels. »

Résultat, elles ne sont plus aujourd'hui que 60 % à bénéficier d'un CDI quand les autres sont employées avec des contrats temporaires par des entreprises « multiservices ». Des sociétés dont les conditions de travail sont largement revues à la baisse. « Même si le salaire dépend aussi du nombre d'étoiles des hôtels, les femmes de ménage « externalisées » gagnent 40 % de moins que celles qui travaillent en CDI, soit entre 600 et 700 euros par mois. Pour des journées de 10 heures de travail et sur six ou sept jours par semaine, poursuit Mari Carmen. Ça, c'est quand elles sont salariées. Car d'autres sont payées à la chambre : 2,50 euros la chambre ! Quand tu sais qu'il faut un minimum de 30 minutes par chambre… »

Le salaire n'est pas le seul problème. Congés, Sécurité sociale, retraite, contrats frauduleux et/ou non respect des horaires, les irrégularités commises par les sous-traitants sont en effet nombreuses. Sans oublier les maux de dos et autres troubles musculo-squelettiques dont elles sont, pour le coup, toutes victimes, CDI et « externalisées ».

Des améliorations obtenues

Autant de raisons qui ont poussé ces femmes d'habitude invisibles à faire entendre leur voix. Au travers d'associations comme les Kellys, contraction espagnole de « celles qui nettoient », mais aussi avec les syndicats. Des améliorations ont été obtenues. « Le 30 août 2018, lors d'une table ronde sur la qualité du tourisme, nous avons réussi à faire reconnaître certaines maladies comme maladies professionnelles », rappelle Mari Carmen Casin, qui a dû se faire opérer des tendons des épaules.  « Et aujourd'hui, 50 conventions d'entreprises externalisées ont été dénoncées et ont disparues. » Mais elles veulent plus. « Ce que l'UGT demande au gouvernement, c'est que la loi de 2012 soit éliminée ou, à défaut d'être éliminée, qu'elle soit modifié pour revenir à ce qu'il y avait avant 2012 et que les conventions par branche redeviennent la référence. »