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RÉPRESSION SYNDICALE

Fonderies du Nord : Le patron à côté de la plaque

13 avril 2016 | Mise à jour le 15 février 2017
Par | Photo(s) : Maxppp
Fonderies du Nord : Le patron à côté de la plaque

S'il fallait décerner une médaille de la bêtise patronale, François Segard, PDG des Fonderies du Nord, à Hazebrouck, serait sans doute lauréat. Trois salariés de son entreprise ont en effet reçu une convocation préalable à licenciement pour avoir fait grève le 31 mars. Le patron ignorait qu'il y avait un appel à la grève et un million de personnes dans la rue ce jour-là…

Si c'était un poisson d'avril, il était de très mauvais goût. C'est en effet le 1er avril que trois syndiqués CGT des Fonderies du Nord à Hazebrouck ont reçu une convocation à entretien préalable à licenciement éventuel pour faute grave avec mise à pied conservatoire.

L'argumentaire de la lettre a de quoi faire tomber à la renverse : « Avec deux autres salariés, vous nous indiquez devoir vous rendre à une grève et vous nous donnez comme justificatif le document joint. Or nous n'avons connaissance d'aucun avis de grève ni au plan national ni au niveau de la branche et il n'y a, et pour cause, aucune grève interne à l'entreprise. Et de fait, s'il y a des mouvements sociaux ce jour, aucun ne permet en réalité aux salariés de notre entreprise comme vous de se soustraire à la nécessité vitale d'accomplir les commandes. Explications données, vous n'avez apporté aucun justificatif supplémentaire, et vous vous êtes effectivement absenté. Nous sommes acculés, et je me battrai pour la survie de mon entreprise. »

Ainsi donc, pour le signataire de cette missive, M. François Segard, PDG des Fonderies du Nord, le fait qu'il n'ait pas eu connaissance des appels à la grande journée nationale de grève et de manifestations du 31 mars 2016 contre la loi El Khomri pouvait justifier le licenciement de trois gêneurs…

Sans doute, la nouvelle de la plus grande journée d'action depuis une décennie n'était-elle pas parvenue jusqu'à Hazebrouck… Le plaidoyer patronal sur sa bataille pour la survie de son entreprise avait aussi, semble-t-il, également toutes ses chances de convaincre les syndicalistes que M Segard entendait jeter à la rue.

UNE RÉACTION IMMÉDIATE

Il va sans dire qu'un tel motif de licenciement ne tiendrait pas une minute devant n'importe quelle juridiction. Immédiatement, la région métallurgie CGT Nord-Pas-de-Calais appelle à multiplier les motions de syndicats.

Pendant une semaine, celles-ci affluent par centaines auprès de la direction des fonderies afin de condamner les procédures de licenciement et dénoncer les atteintes au droit de grève. C'est ainsi que le 8 avril, jour de l'entretien préalable des trois salariés, quelque 200 métallos se rassemblent devant l'entreprise.

Affolé, François Segard craque et fait part à l'AFP d'un nouveau morceau d'anthologie patronale : « Je n'ai pas supporté ce décalage entre la réalité dans laquelle nous nous battons et cette atmosphère, que je ne comprends pas (…). Je n'ai pas supporté que trois personnes de l'entreprise, quand tout le monde est sur le pont pour défendre ce qu'il nous reste, choisissent, au plus mauvais moment, de quitter le navire pour aller manifester contre cette mesure (…) Après avoir longuement réfléchi (…),  j'annonce que j'ai décidé de renoncer purement et simplement au projet de licenciement pour faute grave. »

Décidément, ce monsieur ne comprend pas grand-chose… et assez lentement. Heureusement que le rapport de force est là pour l'aider un peu dans ses grands efforts de réflexion. Ludovic Bouvier, responsable régional de la métallurgie CGT se délecte de cette victoire qu'il considère être une tentative d'anticipation de la loi El Khomri.

Ludovic se marre aussi à l'évocation de François Segard : « Le PDG a déclaré à la presse – on ne sait pas si ça a été repris – qu'il ne pensait pas que cette histoire allait prendre une telle ampleur et qu'il avait été très mal conseillé par l'UIMM locale… » Sur ce dernier point, ce n'est pas la CGT qui le contredira.