Institut Paris Région : péril en la demeure régionale
Mardi 19 décembre, mobilisation au siège du Conseil Régional : « L'IPR est notre bien commun, nous sommes prêts à ramer pour le sauver »
Révoltés, déterminés et « prêts à ramer pour sauver leur bien commun », les salariés de l'IPR se sont à nouveau mobilisés, mardi 19 décembre, devant et au sein du Conseil régional, à Saint-Ouen. Depuis deux mois, ils protestent contre un plan d'austérité budgétaire qui menace non seulement la qualité des travaux d'expertise du célèbre institut, mais son existence même. Il faut dire que le plan d'économies concocté par la Région – son principal financeur à hauteur de 80 % – ne laisse guère de place à l'optimisme : « Après avoir réduit de 5 % nos budgets en 2022, la présidente (du conseil régional d'Ile de France, NDLR), Madame Pécresse, exige à présent une baisse de 15 % de notre budget de fonctionnement d'ici 2025, soit 3 millions d'euros en moins, alors même que nos expertises et compétences sont plus sollicités que jamais par tous les services et organismes du Conseil régional», déplore Léo Mariasine, délégué syndical CGT de l'IPR.
Un outil inestimable, unique au monde
Méconnu du grand public mais tenu en haute estime par les élus de tous horizons politiques qui louent unanimement la qualité, « jamais démentie » de ses travaux d'expertise, l'IPR est un outil d'aide à la décision, indispensable à la définition de grands objectifs d'utilité publique et d'orientations stratégiques pilotés par la Région. Regroupant quelques 220 experts scientifiques (urbanistes, économistes, rudologues, architectes, écologues, démographes, sociologues, géomaticiens, statisticiens…), cette agence d'urbanisme et d'environnement – la plus ancienne de France et d'Europe – aide les élus à relever des défis cruciaux dans tous les domaines de la vie d'une métropole : aménagement du territoire, urbanisme, gestion des déchets, réduction des émissions de gaz à effet de serre, maîtrise de la demande d'énergie, transports, développement des renouvelables, qualité de l'air, adaptation au changement climatique .. « C'est un outil inestimable, unique au monde par la richesse des données cumulées depuis sa création en 1960 », fait valoir Léo Mariasine.
Certes, le plan d'austérité imposé aujourd'hui à l'IPR s'inscrit dans une stratégie générale qui affecte tous les services de la Région capitale. Mais, au regard des défis à relever, ne serait-ce qu'en matière de transports dans le cadre des J.O. ou de transition écologique, comment ne pas soupçonner ces « chères économies » brandies par Madame Pécresse de n'être qu'un prétexte au démantèlement de l'institut ? Du reste, en intensifiant depuis quelques années le recours à des cabinets privés – notamment Ernst & Young – pour des prestations de conseil telles que la définition d'un scénario énergétique, la présidente de Région n'a fait qu'accréditer la thèse d'une mise à mort programmée de l'Agence.
L'indépendance qui dérange
« Ce qui gêne Madame Pécresse, c'est avant tout notre indépendance totale vis-à-vis du politique », analyse Léo Mariasine. Car à la différence d'un cabinet de conseil privé qui répond au pied levé à la demande du moment de son commanditaire, les expertises et études émanant de l'IPR répondent, elles, à des objectifs d'intérêt général inscrits sur le long terme. Il n'est d'ailleurs pas rare que les principes défendus par l'Agence se heurtent aux ambitions politiques du moment. « Pour vous donner un exemple récent, Valérie Pécresse souhaitait développer un projet de taxis volants (sorte d'hybride entre l'hélicoptère et le drone) afin d'assurer des petits déplacements de clients fortunés entre les aéroports et le centre de la capitale, tandis que nous défendions plutôt des projets orientés « dé-mobilité », réduction de l'automobile et des émissions de CO2, développement des mobilités légères, qualité de l'air, etc. Ce qui lui a fortement déplu », évoque le syndicaliste.
Rassemblés et mobilisés en nombre devant le siège du Conseil régional de 14h à 18 h pour dire « Non » à la baisse de leur subvention, les salariés de l'IPR et leurs syndicats CGT-CFDT ont été rejoints par de nombreux élus régionaux venus soutenir leur cause. «Quel que soit leur bord politique, ils savent pertinemment que si l'agence et ses expertises, uniques au monde, devaient disparaître, ce serait une catastrophe pour tous les services de la Région, ne serait-ce que pour remplir leur obligation de mise en œuvre».
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