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LICENCIEMENTS

La maltraitance du social

19 février 2015 | Mise à jour le 20 mars 2017
Par | Photo(s) : AFP
La maltraitance du social

Après le passage en force du projet de loi Macron par le gouvernement, Marie-Laurence Bertrand, membre de la direction confédérale de la CGT, revient sur les mesures concernant les licenciements collectifs.

nvo – Le gouvernement a annoncé user du 49-3 pour faire passer la loi Macron en évitant le vote des députés. La CGT dénonce un acte anti-démocratique. Qu’en est-il ?

Marie-Laurence Bertrand – Il s'agit d'un véritable déni de démocratie et, en même temps, d'un terrible constat d'échec pour le gouvernement. Une loi présentée comme fondatrice aurait été mal votée et finalement ne sera pas votée du tout. Dans les faits, elle s'appliquera. Mais elle aura perdu toute la légitimité du vote. Emmanuel Macron s'est enorgueilli d'heures de débats à l'Assemblée. Ce n'est pas le cas de la seconde partie du texte, qui concerne le volet social, ce qui pose une vraie question sur la considération apportée à la vie des salariés. Il en a été de même dans la phase de pré-élaboration de la loi, qui aurait dû faire l'objet de discussions avec les organisations syndicales de salariés. Ce n'a pas été le cas; et même, concernant le travail du dimanche, les douze dimanches ouvrables retenus dans la loi avaient été présentés comme une fourchette haute.

 

nvo – Deux éléments phares du texte ont été mis en lumière: l’extension du travail du dimanche et de nuit, la réforme des professions réglementées. Nombre d’autres articles remettent aussi en cause le droit du travail, de la dépénalisation du délit d’entrave à la réforme des prud’hommes. On a beaucoup moins parlé des articles débattus le week-end dernier à l’Assemblée concernant les licenciements collectifs.
De quoi s’agit-il ?

Marie-Laurence Bertrand – C'est l'un des éléments importants de ce texte, qui complète la loi dite de sécurisation de l'emploi de 2013 en réduisant un peu plus encore les droits des salariés. Plusieurs dispositions du projet de loi vont profondément bouleverser le cadre des licenciements économiques. La première disposition concerne le périmètre des licenciements.

Aujourd'hui, lorsque l'employeur veut licencier des salariés pour motif économique, il doit respecter des critères d'ordre des licenciements (âge, situation de famille etc.) à l'échelle de toute l'entreprise, sauf si un accord d'entreprise en décide autrement. Toute décision unilatérale de l'employeur peut être refusée par l'administration, comme ce fut le cas pour l'entreprise Mory-Ducros.

Dans le projet de loi Macron inital, avant la révision par la commission, l'employeur aurait pu décider seul du périmètre des licenciements et choisir en toute discrétion qui reste, qui part: une porte ouverte à toutes les discriminations et inégalités de traitement. Toutes les organisations syndicales ont condamné une telle mesure, amenant la commission à la réviser. Dans la nouvelle version, le périmètre ne peut être inférieur à une «zone d'emploi».Mais cette notion est très floue.

La seconde disposition porte sur le PSE dans un groupe. Aujourd'hui, le licenciement de dix salariés ou plus pour motif économique impose un Plan dit de sauvegarde de l'emploi (PSE), avec propositions de reclassements, formations… dont le financement dépend des moyens du groupe auquel l'entreprise appartient, soumis à vérification et accord de l'administration du travail (Direccte). Avec le projet de loi d'Emmanuel Macron, en cas de redressement ou de liquidation judiciaires, le PSE est proportionnel aux moyens de la seule entreprise en difficulté et non du groupe même en bonne santé, et même si c'est lui qui choisit de sacrifier telle entreprise ou telle filiale. La CGT revendique au contraire une réelle responsabilisation des groupes vis-à-vis de leurs filiales.

Troisième point: le reclassement à l'étranger. Jusqu'à maintenant, c'est à l'employeur de rechercher un reclassement dans les entreprises ou établissements à l'international. Avec la loi, c'est le salarié qui doit le rechercher. La CGT, pour sa part, propose des droits renforcés pour les représentants des salariés, notamment pour les comités d'entreprise. Ce n'est pas en flexibilisant davantage que l'on créera de l'emploi. Au contraire.