De l'usage de la violence pour faire taire
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Un certain flou règne sur le contenu exact du programme du Rassemblement national (RN). La conséquence d’un très grand nombre de mesures annoncées dans son programme comme urgentes et finalement reportées (suppression de la TVA sur certains produits de nécessité) ou purement abandonnées (augmentation du salaires des enseignants). Mais la colonne vertébrale du Rassemblement national, elle, reste, bien perceptible : une focalisation sur la thématique migratoire et une matrice raciste, présentes depuis la création du parti et toujours d’actualité en dépit de sa supposée dédiabolisation. « Le Rassemblement national ne fait pas mystère de sa philosophie vis-à-vis des personnes migrantes et étrangères. Le rejet de l’autre, le racisme et la xénophobie sont au fondement de leur idéologie, analyse Fanélie Carrey-Conte, secrétaire générale de La Cimade. Il défend une conception complètement fantasmée d’une nation uniquement ouverte aux Français « pure souche ». » Sans surprise, en cas de victoire du Rassemblement national le 7 juillet, le parti prévoit une première loi d’urgence sur l’immigration d’ici l’automne.
La ligne du RN consiste à tarir les flux migratoires et remettre en cause drastiquement les droits des personnes étrangères présentes sur le territoire. En clair, leur pourrir la vie. Parmi les mesures envisagées dans son projet de loi d’urgence, le Rassemblement national prévoit « la suppression de toutes les dérogations qui empêchent les expulsions d'étrangers », en dépit des situations de vulnérabilité des personnes ou de leurs attaches personnelles et familiales en France, ou encore le « retour du délit de séjour irrégulier ». Prévu initialement dans le projet de loi relatif à immigration défendu par Gérald Darmanin, le RN défend le « remplacement de l'aide médicale d'Etat par une aide d'urgence vitale ». Lors de l’examen du projet de loi immigration, cette mesure a réunit contre elle la quasi intégralité du corps médical : supprimer l’aide médicale d’État (AME), qui permet à des personnes étrangères en situation irrégulière et présente en France depuis au moins trois mois d’avoir accès aux soins de base aurait des conséquences délétères pour la santé publique, alertaient les soignants. Ainsi, l’Espagne qui avait restreint l’accès aux soins des étrangers en situation irrégulière en 2012 a finalement fait marche arrière face à la recrudescence de maladies infectieuses. Le RN entend, par ailleurs, vider de sa substance le droit d’asile, en instaurant « l'obligation de dépôt des demandes d'asile dans les ambassades et consulats », c’est-à-dire, en traitant l’examen de la demande d’asile hors des frontières hexagonales.
Le Rassemblement national prévoit également la suppression du droit du sol, en exigeant la fin de « l'automaticité» de l'acquisition de la nationalité française pour les enfants de parents étrangers nés en France. Là encore, il s’agit d’une annonce hors-sol, puisque les enfants nés en France de parents étrangers n’acquièrent pas du tout automatiquement la nationalité française à la naissance. Ces enfants peuvent obtenir la nationalité française à 13 ans, 16 ans ou 18 ans, sous réserve que soient respectées un certain nombre de conditions, la scolarisation et la présence sur le territoire pendant plusieurs années notamment.
Le parti d’extrême droite prévoit également une « restriction du regroupement familial par le durcissement des conditions » de logement et d'emplois permettant d’y avoir accès. « C’est complètement contre productif, explique Gérard Ré, membre du bureau confédéral de la CGT. Les personnes étrangères travaillant régulièrement en France seront tout simplement tentées d’aller travailler ailleurs si elles ne peuvent pas faire venir leur conjoint.e, ce qui contribuera à faire partir des compétences et des savoirs dont on a besoin. »
Le Rassemblement national prévoit enfin la « suspension de toutes les régularisations de clandestins par les préfets », que l’on peut interpréter comme la suppression de « la circulaire Valls ». Ce texte de 2012 prévoit, entre autres, la possibilité d’une régularisation à titre exceptionnel pour les travailleurs étrangers présents en France depuis plus de cinq ans et justifiant d’une activité professionnelle depuis au moins huit mois. « Cela concerne des travailleurs qui, pour certains, paient des impôts et des cotisations sociales, qui ne bénéficient de rien, ne coûtent rien à notre pays mais au contraire créent de la richesse, explique Gérard Ré. C’est tout autant de travailleurs qui n’auront jamais accès aux droits. Cela va continuer à alimenter leur surexploitation et créer un dumping social pour tous les travailleurs. »
Pierre angulaire du programme, renommée « priorité nationale » pour l’occasion, le Rassemblement national entend réserver l’accès à certains emplois, au logement social ou encore aux prestations sociales aux seuls ressortissants français. Pour mener à bien son projet, il entend, dès l’automne prochain, engager une réforme visant à instaurer «la priorité nationale, si nécessaire par référendum constitutionnel. » « Selon nous, cela est non seulement contraire à la constitution mais également aux textes européens, explique la secrétaire générale de La Cimade.
Enfin, le sort réservé aux binationaux reste flou dans le programme du RN. De son côté, son président, Jordan Bardella, a fait savoir que les postes exclus pour les binationaux ne seraient que « les plus stratégiques de l'État ». La proposition de loi constitutionnelle déposée le 25 janvier 2024 par le Rassemblement national laisse, pourtant, apparaître une réalité plus sombre : le texte prévoit que les emplois dans les administrations, les entreprises publiques et les personnes morales chargées de mission de service public pourraient être interdits par la loi aux personnes qui possèdent la nationalité d’un autre État. Une telle formulation permet d’exclure les binationaux des emplois à l’université, dans les ministères, à l’hôpital, à Pôle emploi… Le même texte prévoit que les « fonctions inséparables de l'exercice de la souveraineté nationale ne peuvent être confiées à des personnes de nationalité étrangère ou représentant une institution internationale. » Ces fonctions recouvrent toutes les fonctions d’élus, préfets, ambassadeurs. Une atteinte aux droits massives pour les 3,3 millions de binationaux en France.
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