À venir
Votre identifiant correspond à l'email que vous avez renseigné lors de l'abonnement. Vous avez besoin d'aide ? Contactez-nous au 01.49.88.68.50 ou par email en cliquant ici.
HAUT
Tourisme

Le secteur du tourisme en quête de soutien

2 novembre 2020 | Mise à jour le 3 novembre 2020
Par | Photo(s) : Valentino Belloni/Hans Lucas
Le secteur du tourisme en quête de soutien

À Paris le 6 octobre 2020, premier jour de fermeture des bars. Une terrasse en soirée.

La chute du tourisme provoquée par la crise sanitaire frappe de plein fouet Paris et sa région. Après le déconfinement, le retour des visiteurs français et étrangers prendra du temps, ce qui menace l'emploi dans des secteurs jusque-là préservés.

C'est en Île-de-France que sont concentrés 27 % des emplois touristiques de France métropolitaine. Les deux tiers de ces emplois sont directement liés à la présence des touristes à Paris et ses alentours. Parmi eux, six sur dix concernent l'hébergement et la restauration. Au premier semestre 2020, les quelque 50 millions de touristes annuels habituels, français et étrangers, se sont quasiment évaporés pour cause d'épidémie et ils mettront probablement des mois, voire des années à revenir.

D'où les inquiétudes pour tous les métiers dépendant de leur venue, tels ceux de l'hôtellerie-restauration et des arts et des spectacles. À fortiori depuis que le couvre-feu à 21 heures annihile tout espoir de relance à court terme.

Côté hébergement et restauration, depuis mars, « les créneaux les plus touchés à Paris sont le luxe et le haut de gamme », observe Arnaud Chemain, secrétaire fédéral à la CGT Commerce et services. L'emblématique Bristol, palace du faubourg Saint-Honoré, dans le VIIIe arrondissement, a fermé cinq mois pour ne rouvrir que le 1er septembre, le Four-Season-Georges V, lui, ne reprenant que le 22 septembre…

« Ces établissements travaillent en majorité avec une clientèle internationale qui participe à des séminaires ou à des activités évènementielles », poursuit le secrétaire fédéral ; autant de rendez-vous en grande partie annulés ces derniers mois. Résultat : « un taux d'occupation autour de 20, 25 % », voire moins. « La situation est catastrophique, s'alarme Arnaud Chemain, alors qu'en province, la clientèle française a permis de relancer l'été et a bien re-rempli les hôtels, au moins les weekends. » Les cafés et bars parisiens encaissent aussi un coup sérieux. « On estime qu'un tiers des bars sont menacés de faillite », assure Arnaud Chemain.

L'emploi et les salaires touchés au premier chef

Les premières conséquences de ce trou d'air inédit portent sur l'emploi. « On évalue à 150 000 le nombre de postes déjà perdus, tous de la convention collective des hôtels, cafés, restaurants (HCR) », indique le secrétaire fédéral, qui n'exclut pas non plus que « des employeurs de grosses brasseries parisiennes par exemple voient dans cette crise un effet d'aubaine pour dégraisser à bas coût ».

Un coup dur pour ce pan de l'emploi francilien qui, jusqu'à la crise sanitaire, s'illustrait plutôt dans ce secteur par ses difficultés de recrutement. « C'est une nouvelle donnée dans nos métiers, comme dans l'aéroportuaire », note Arnaud Chemain.

Les salariés en poste en subissent directement les conséquences. Les réductions d'effectifs « obligent à la polyvalence et créent des difficultés professionnelles et techniques ». Le chômage partiel, auquel l'hôtellerie-restauration recourt abondamment, laisse des traces sur les rémunérations. « Le salaire moyen, chez nous, c'est entre 1 200 et 1 300 euros net mensuels, rappelle Arnaud Chemain. À cause de l'activité partielle, les salariés n'ont perçu que 84 % de leur rémunération habituelle, soit une perte de 200 à 400 euros. Pour des petits salaires comme les nôtres, c'est énorme », et d'autant plus, compte tenu du niveau de vie élevé en Île-de-France.

La CGT Commerce et services demande le maintien à 100 % du salaire dans la restauration. « Certains groupes hôteliers et entreprises du secteur l'ont fait, mais cela reste ultraminoritaire », souligne le secrétaire fédéral. Ce dernier réclame aussi que les périodes d'activité partielle soient mises à profit pour développer la formation des salariés, « pour leur permettre de progresser ou, pourquoi pas, de se réorienter ».

Autres établissements durement atteints par la désertion des visiteurs : les salles de spectacle. Prisés par un public international et provincial, mais aussi par des groupes et spectateurs plutôt âgés, les cabarets et music-halls parisiens comptent parmi les premières victimes. Le Crazy Horse n'a rouvert que le 1er octobre et désormais se produit en journée avec une jauge de remplissage de la salle réduite. L'iconique Moulin Rouge demeure clos depuis le 13 mars et ses salariés sont en chômage partiel de même que ceux du Lido, sous peine d'opérer à perte. « Même les établissements rouverts ne tournent qu'à environ 25 % de l'activité habituelle », prévient Denis Gravouil, secrétaire général de la fédération CGT du spectacle.

Prolonger les droits des intermittents

La baisse de fréquentation n'épargne pas les théâtres. « L'obligation de distanciation physique a réduit la jauge de remplissage des salles de 40 à 50 % et elles ne sont remplies qu'à 80-90 %, illustre Karyl Lessman, agent de billetterie et syndicaliste CGT à la Comédie française. Les touristes internationaux, présents surtout l'été ont disparu. Les spectateurs de province demandent régulièrement que l'on déplace ou annule leur commande. On ne voit plus venir au guichet que des Parisiens ou des Franciliens. Le personnel, dit-il, a été plutôt préservé, car la Comédie française combine activités de programmation et de création. »

« Même lorsque l'on ne jouait pas, la création a pu se poursuivre, réduite et en télétravail, précise Karyl Lessman. Les salaires ont été maintenus à 100 % pendant le confinement, même si une part variable, liée aux heures supplémentaires, aux weekends, etc., a disparu. »

Pour sauver le secteur, la CGT Spectacle demande notamment d'améliorer l'accès à l'activité partielle et de prolonger les droits à l'assurance chômage – « l'année blanche » – au-delà du 31 août 2021, pour les intermittents dont le travail n'aurait pu reprendre normalement.

Les monuments et musées de notoriété internationale tournent aussi au ralenti. Le Louvre a vu sa fréquentation dégringoler de 75 % en juillet et de 60 % en août par rapport à la même période un an plus tôt. Le musée d'Orsay aurait perdu 70 % de ses visiteurs et le domaine de Versailles près de 80 %.

« Il y a une part de financement public qui tient, mais la conséquence des billetteries en baisse, c'est que les musées vont prévoir moins d'activités, moins de grosses expositions et donc moins d'embauches », prévient Denis Gravouil. « Notre modèle économique, c'est 70 % de ressources propres », complète Damien Bodereau, secrétaire de la CGT du domaine de Versailles. Pour les agents, l'impossibilité de travailler les dimanches ou les jours fériés entraîne la perte de leurs primes.

L'activité des guides-conférenciers est aussi menacée, alors que la réforme de l'assurance chômage pénalisait déjà ceux dont l'activité fluctue. Début août, 500 d'entre eux prévenaient dans une tribune parue dans Le Monde qu'ils étaient 45 % à envisager de changer d'activité. « Il y en a aujourd'hui très peu au château, d'autant plus que la plupart des grands tour-opérateurs étrangers restent fermés », confirme Damien Bodereau.

Des modèles économiques à revoir

Le domaine de Versailles devrait bénéficier, comme d'autres, du plan de relance. « Mais le modèle économique est à revoir, estime Damien Bodereau, car on dépend beaucoup de l'étranger et il n'y a pas de signe de reprise rapide de ce côté-là. On était tourné vers les activités les plus lucratives, mais il est temps de se recentrer sur autre chose. »

Car si les établissements culturels en province, à l'instar des hôtels, ont compensé une partie de l'absence des visiteurs étrangers par un regain de la clientèle française, les musées franciliens, eux, y sont moins bien parvenus, alors même qu'ils offrent aujourd'hui des conditions de visite optimales… « Avant le Covid, les polémiques sur l'engorgement du Louvre et d'autres musées, l'obligation de recourir à l'horodatage, ont fait que les gens ont perdu l'habitude de venir, glisse-t-on à la CGT du ministère de la Culture. Sans parler des freins sociaux aux visites de musées. On pourrait en fait imaginer de miser sur ce tourisme de proximité. Un plan de relance du secteur doit se faire sur ce changement de paradigme. Les premiers visiteurs de la France restent de loin les Français et ça peut être un élément fort du redémarrage. »

Côté hébergement et restauration, depuis mars, « les créneaux les plus touchés à Paris sont le luxe et le haut de gamme », observe Arnaud Chemain, secrétaire fédéral à la CGT Commerce et services. L'emblématique Bristol, palace du faubourg Saint-Honoré, dans le VIIIe arrondissement, a fermé cinq mois pour ne rouvrir que le 1er septembre, le Four-Season-Georges V, lui, ne reprenant que le 22 septembre…

« Ces établissements travaillent en majorité avec une clientèle internationale qui participe à des séminaires ou à des activités évènementielles » poursuit le secrétaire fédéral ; autant de rendez-vous en grande partie annulés ces derniers mois. Résultat : « un taux d'occupation autour de 20, 25 % », voire moins.

« La situation est catastrophique, s'alarme Arnaud Chemain, alors qu'en province, la clientèle française a permis de relancer l'été et a bien re-rempli les hôtels, au moins les weekends. » Les cafés et bars parisiens encaissent aussi un coup sérieux. « On estime qu'un tiers des bars sont menacés de faillite », assure Arnaud Chemain.

Suivez la NVO sur FacebookTwitterInstagram