À venir
Votre identifiant correspond à l'email que vous avez renseigné lors de l'abonnement. Vous avez besoin d'aide ? Contactez-nous au 01.49.88.68.50 ou par email en cliquant ici.
HAUT
SANTÉ

Les Bluets : l’accès à la santé des femmes en danger

21 septembre 2023 | Mise à jour le 21 septembre 2023
Par | Photo(s) : Photo by HUMBERT / BSIP / BSIP via AFP
Les Bluets : l’accès à la santé des femmes en danger

La maternité des Bluets, fondée en 1947 par la CGT, fait face à un manque de financements qui remet en cause sa pérennité. Elle initie une mobilisation en faveur d'un meilleur accès à la santé des femmes. Par Christine Lamiable

C'est le début d'une mobilisation en faveur de l'accès à la santé des femmes. Mercredi 20 septembre, s'est tenue à l'hôpital Pierre Rouquès-Les Bluets (Paris XII) une conférence de presse destinée à alerter sur les difficultés rencontrées par l'établissement. Frédéric Sanchez, secrétaire général de la fédération CGT de la métallurgie, a pris plaisir à rappeler que la maternité avait été fondée en 1947 par les Métallurgistes parisiens, également à l'origine d'un dispensaire dix années auparavant. « Elle est un symbole important qui s'inscrit dans les valeurs humanistes prônées par la CGT », a-t-il insisté. L'association Ambroise Croizat Santé gère cet établissement de santé privé d'intérêt collectif (ESPIC), conventionné secteur 1, mais également un centre de santé sexuelle pour les IVG, des unités gynécologiques et une unité d'assistance médicale à la procréation.

La maternité connaît « des problèmes financiers lourds et réguliers, admet Daniel Pellet-Robert, président de l'association gestionnaire. Nous ne disposons pas de fonds propres. L'an dernier, il a fallu solliciter l'ARS en décembre pour le paiement des salaires des personnels de santé. ». Même si elle est sortie d'un plan de retour à l'équilibre décidé en 2018, le déficit annuel reste de « 3 à 3,5 millions d'euros par an », précise Brice Martin, son directeur. Depuis 2021, une série de mesures de revalorisation ont été réservées aux hôpitaux publics, creusant l'écart avec les salariés des ESPICs. Ceux de la maternité des Bluets touchent jusqu'à 30 % de moins que ceux des hôpitaux publics. De quoi décourager les vocations les plus affirmées. Sophie Binet, secrétaire générale de la CGT, dénonce « une politique d'austérité catastrophique. On a l'impression que la stratégie consiste à garder les Bluets juste à flot. Il faut changer le financement des secteurs associatif et mutualiste, moins favorable que celui du public, alors qu'ils en respectent les obligations en matière de tarification. Le privé va chercher des marges en faisant payer des suppléments petit déjeuner ou lit pour les pères. Ici, les patient·es ne payent aucun supplément. ». En janvier dernier, Emmanuel Macron avait promis que le projet de loi de financement de la Sécurité sociale de 2024 serait l'occasion de commencer à « sortir de la tarification à l'activité ». Pour l'heure, Brice Martin souligne que « des groupes de travail commencent à s'organiser au Ministère de la Santé. Pour les maternités, une modélisation d'une future tarification est à l'étude. Mais on ne sait pas encore à quelle sauce on sera mangé. ».

Les financements manquent également pour développer des projets innovants. Dirigée par le docteur Fernand Lamaze, la maternité a été la première à proposer la méthode de l'accouchement sans douleur. Aujourd'hui, elle propose aux parturientes un système de péridurale déambulatoire. Elle travaille également avec la maison de naissance Comme À La Maison (CALM). Une disposition de la loi de bioéthique permet depuis le 1er janvier 2022 aux femmes de 29 à 37 ans de conserver leurs ovocytes hors raison médicale. Elle répond à une réelle demande puisque 11 500 femmes ont sollicité un premier rendez-vous dans ce cadre en 2022, selon le dernier bilan de l'Agence de biomédecine (ABM). Problème : il existe peu de centres agréés. « Le centre de PMA des Bluets est en mesure d'accueillir ces femmes, révèle Jessica Dahan-Saal, sa directrice médicale. Il ne nous manque que l'agrément qui doit être donné par nos autorités de tutelle et qui tardent un peu ! ». Un comble pour un établissement qui se veut entièrement dédié à la santé des femmes à toutes les étapes de leur vie et réalise jusqu'à 3200 naissances par an.

La mobilisation des équipes des Bluets a reçu le soutien de la Fondation des femmes. Anne-Cécile Mailfert, sa présidente, y voit « un enjeu féministe parce que cette maternité a toujours fait en sorte que les femmes aient accès à la connaissance de leur corps. ». Elle lance que « si les hommes accouchaient, les maternités ressembleraient à des cathédrales. ». Sarah Durocher, présidente du Planning Familial, regrette quant à elle que « la santé des femmes soit sacrifiée dans l'hôpital public parce que ça ne rapporte pas. ». Myriam Lebkiri, membre du Bureau confédéral de la CGT en charge des questions relatives à l'égalité femme / homme suggère que le gouvernement « mette la main au porte-monnaie » pour maintenir des structures qui s'occupent de la santé des femmes. « On ne lâchera pas », a-t-elle conclu.