Hard-discount : la sueur de l’affront
Derrière les miniprix : les cadences d’enfer, l’ultrapolyvalence, les bas salaires, le management brutal… Salués pour leur engagement pendant la pandémie, les salariés... Lire la suite
« En trente ans de travail en caisse, j'ai vu notre quotidien se dégrader. On est en sous-effectifs, les clients attendent plus longtemps. Nos chaises sont pourries, on n'a pas de cale-pieds, pas de climatisation l'été. Cela fait trente ans que je travaille pour Carrefour, je n'ai jamais eu d'augmentation », témoigne la plus ancienne d'entre elles. Pour la majorité de ces invisibles, c'est la première fois qu'elles se mobilisent, entourées de militants de la CGT venus leur prêter main-forte.
À ce paisible carrefour bordé de maisons cossues, les clients s'arrêtent volontiers pour papoter avec elles et signer une pétition de soutien à l'entrée du magasin qui fait face au très prisé lycée privé Sainte-Geneviève.
Ouvertement en guerre contre leur hiérarchie, les grévistes, pour la plupart embauchées en CDI à 37,5 heures, exigent une organisation du travail qui permettent à toutes de concilier vie de famille et vie professionnelle. « Les plannings sont inéquitables. Moi par exemple, je fais la fermeture tous les soirs, je travaille les samedis et les dimanches matins. Et je n'ai pas trop le choix. La direction nous répond qu'on a qu'à changer de travail si on n'est pas content. Mais ma famille, mes amis, je les vois quand ? », tonne cette salariée, qui attend de signer son CDI après deux ans en CDD.
« J'habite à Poissy et je travaille essentiellement le soir. Quand je finis à 20 h 45, avec les transports en commun, je n'arrive pas chez moi avant 23 heures. À cette heure, mon mari dort, on ne se voit plus », témoigne Maria Mirabella Cosma, embauchée en contrat de professionnalisation, qui a peur que « son couple casse ». Paheerathy Sivanesan ne tient que dans l'espoir de pouvoir retrouver ses trois enfants, provisoirement placés.
« J'ai fait une demande de mutation pour me rapprocher de mon domicile, à Étampes. Actuellement, je ne fais que des fermetures, je termine à 20 h 45. Au mieux, j'arrive chez moi à 23heures et je travaille les samedis. Moralement, ce n'est plus possible. J'ai besoin de ce travail, mais comment récupérer la garde de mes enfants dans ces conditions ? »
Pour l'heure, les employées de caisse à Versailles ont obtenu de leur direction locale une révision des plannings, l'embauche de 2,5 équivalents temps plein et du mobilier neuf. La CGT entend continuer la bataille, notamment celle des élections professionnelles en octobre 2019 qui vont voir la mise en place des nouveaux Comités sociaux et économiques.
Un enjeu de taille alors que la grande distribution connaît une boucherie sociale, avec à la clé des milliers de suppressions de postes. Le 15 mai 2019, Carrefour signait un accord de rupture conventionnelle collective prévoyant 3000 départs dans ses hypermarchés. Une saignée qui s'ajoute aux 4400 départs volontaires au siège social et dans les magasins de proximité.
Derrière les miniprix : les cadences d’enfer, l’ultrapolyvalence, les bas salaires, le management brutal… Salués pour leur engagement pendant la pandémie, les salariés... Lire la suite
Au Leclerc de Saint-Pierre-lès-Elbeuf la santé des salariés passe après les profits. Lire la suite