Champagne pour le patronat
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Le plafonnement des indemnités de licenciement accordées par les conseils de prud'hommes aux salariés licenciés «sans cause réelle et sérieuse» seront désormais plafonnées en fonction de la taille des entreprises et l'ancienneté du salarié, ce qui réduira d'autant le pouvoir d'appréciation des juges prud'homaux sur l'étendue du préjudice réellement subi par le salarié et prouvé par celui-ci. Bernard Augier, représentant de la CGT au Conseil supérieur de la prud'homie, nous livre ses premières réactions sous forme d'un coup de gueule sur cette décision gouvernementale.
Le premier ministre Valls vient de proposer la limitation des dommages et intérêts octroyés aux salariés licenciés lorsque leur licenciement est reconnu sans cause réelle et sérieuse.
Cette décision est honteuse inadmissible et intolérable.
L’histoire retiendra que c’est un gouvernement socialiste qui s’attaque à la juste réparation du préjudice subi par les salariés injustement licenciés.
Le premier ministre a choisi son camp, celui du patronat, et remet en lumière ce texte inscrit à l’article 1783 du code civil aujourd’hui abrogé qui disait que «le Maître est cru sur son affirmation». C’est exactement ce que Valls fait en cédant aux vieilles sirènes patronales : connaître à l’avance le montant de leur forfait, leur permettant ainsi de planifier encore plus facilement le licenciement des salariés !
Ces vielles lunes ne datent pas d’hier, déjà en 1986 la fin de l’autorisation administrative de licenciement réclamée par le patronat devait servir à créer 500 000 emplois, cela n’a fait qu’amplifier le nombre de chômeurs, ou plus récemment le pacte de responsabilité et les milliards de subvention donnés aux entreprises sans aucune contrainte d'embauche !
Monsieur Valls préfère s’attaquer à la réparation du préjudice pour un salarié qui ne retrouvera pas de sitôt un emploi, plutôt que de réformer le droit du licenciement, qui ne doit plus être uniquement une réparation indemnitaire mais une possible réintégration du salarié.
Cette réintégration n’est d’ailleurs pas le fruit d’une quelconque pensée révolutionnaire, puisque le droit du travail allemand, et d’autres en Europe prévoient déjà cette possibilité, mais là je suppose que le modèle allemand n’est pas du goût, ni du gouvernement socialiste, ni du patronat qui réclame à cor et à cri depuis longtemps cette limitation des dommages et intérêts.
Faut-il une nouvelle fois rappeler que, selon les chiffres du ministère de l’économie, plus de 650 000 salariés sont jetés des entreprises tous les ans, dont seul un quart représente des licenciements économiques, le reste étant des licenciements disciplinaires ou inhérent à la personne, maladie, inaptitude etc.
Voilà à qui s’attaque le gouvernement avec ces mesures. Autant de chômeurs en puissance qui n’auront que leurs indemnités de chômage pour faire vivre leurs familles; et c’est en cela que cette mesure est honteuse pour ce gouvernement élu sur un programme qui se révèle n’être qu’une mystification de l’opinion au service d’une politique qui ne peut même pas être qualifiée de sociale libérale, le mot social étant encore trop flatteur pour la politique suivie par Hollande, Valls et consorts.
À satisfaire le patronat qui réclame une limitation des dommages et intérêts, monsieur Valls oublie volontairement que les décisions prud’homales ne sont pas le fruit de révolutionnaires qui veulent «bouffer du patron», mais par des conseillers prud’hommes en parité. Oui en parité, c’est-à-dire par des salariés et des employeurs qui considèrent que le préjudice subi par le salarié licencié doit s’apprécier justement, au regard du préjudice exposé et prouvé par le salarié.
Ce gouvernement met en place un système qui va toucher les plus fragiles en satisfaisant les plus riches, remettant en mémoire cette maxime de Victor Hugo : «C’est de l’enfer des pauvres qu’est fait le paradis des riches».
Bernard AUGIER, Représentant de la CGT au Conseil supérieur de la Prud'homie.
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