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UBÉRISATION

Même après le confinement, les travailleurs « ubérisés » victimes de leur statut

2 juin 2020 | Mise à jour le 11 juin 2020
Par | Photo(s) : Gregory Chamekh / AFP
Même après le confinement, les travailleurs « ubérisés » victimes de leur statut

Des livreurs UBER EATS à Bordeaux.

Le confinement et ses suites rendent encore plus criant le besoin de protection sociale des chauffeurs VTC, coursiers à vélo et, plus généralement, de tous les travailleurs des plateformes. Alors que des syndicats CGT de livreurs à vélo opèrent déjà à Bordeaux, Lyon ou Dijon, il s'avère de plus en plus urgent de faire reconnaître les droits de ces travailleurs ubérisés.

Parce qu'ils ont continué à pédaler dans des villes à l'arrêt, les coursiers à vélo des plateformes de livraison de repas sont devenus le symbole d'un monde du travail rendu encore plus inégalitaire par les huit semaines de confinement. « Parce qu'on ne leur reconnaît pas la qualité de salarié, les dispositifs déployés face à la crise, que ce soit le chômage partiel ou les arrêts maladie, leur échappent », rappelle Stéphane Fustec, secrétaire de la CGT des services à la personne (SAP-CGT).

Si le constat vaut pour tous les « indépendants », ces travailleurs apparaissent d'autant plus vulnérables que leurs revenus dépendent souvent d'une seule plateforme. Or, ces dernières n'offrent pas de garantie en cas de chute de la demande. Si la livraison de repas a trouvé dans la crise de nouveaux débouchés, l'activité des chauffeurs VTC, par exemple, a dégringolé avec la limitation des déplacements. En témoigne la décision de la plateforme Uber de supprimer 3 700 emplois dans le monde, soit 14 % de ses effectifs.

Protection sociale : un besoin absolu

Les travailleurs qui ont continué d'exercer au pic de l'épidémie et après le déconfinement s'exposent, quant à eux, au risque de contamination, sans les protections que pourraient exiger des salariés. « Leur statut d'auto-entrepreneur fait qu'ils n'ont ni le soutien de représentants du personnel, ni les formations, ni l'environnement collectif qui leur permettraient de mieux appréhender les risques et d'y faire face », poursuit Stéphane Fustec.

Uber, par exemple, ne s'engage à rembourser les frais d'achat de gel hydroalcoolique ou de lingettes désinfectantes des chauffeurs qu'à hauteur de 25 euros. La plateforme n'accorde une aide financière, limitée à 14 jours, qu'aux travailleurs contraints, par leur état de santé, de respecter une « quatorzaine » de confinement. « Ça ne suffit pas à remplacer leur activité », rappelle Stéphane Fustec.

Regain de précarité

Avec le regain des licenciements et de la précarité attendue dans les prochains mois, le syndicaliste craint que les plateformes ne sortent renforcées de cette épreuve. « Le chômage massif contribue aux petits boulots et à la disponibilité de travailleurs malléables et corvéables », souligne-t-il.

Mais le statut de salarié apparaît encore plus légitimé. Les travailleurs des plateformes pourraient trouver de nouvelles raisons de faire valoir leurs droits. L'évolution de la jurisprudence leur est favorable. Début février, un conseil de prud'hommes a pour la première fois condamné Deliveroo pour travail dissimulé. Un mois plus tard, une décision très attendue de la Cour de cassation a reconnu l'existence d'un lien de subordination entre Uber et un chauffeur, et requalifié en CDI la relation qui les lie.

Construire syndicalement

 De quoi redynamiser le combat ? À la CGT, un collectif confédéral travaille sur le sujet des travailleurs « ubérisés » et des syndicats CGT de livreurs à vélo opèrent déjà à Bordeaux, Lyon ou Dijon. « Malgré la difficulté d'adapter notre appareil syndical à des jeunes qui nous connaissent mal, et habitués à l'autonomie, les fondations sont creusées, veut croire Stéphane Fustec. Il n'y a plus qu'à construire dessus. »