12 octobre 2017 | Mise à jour le 12 octobre 2017
Concomitantes à la réforme du Code du travail, les négociations actuelles sur un dispositif conventionnel dans la métallurgie pourraient être un cheval de Troie explosif touchant d'autres secteurs professionnels. Frédéric Sanchez (secrétaire général de la fédération des travailleurs de la métallurgie CGT) et David Meyer (qui représente la CGT métallurgie aux négociations en cours avec l'UIMM) reviennent sur les enjeux de la manifestation du 13 octobre.
Quel est l'objet de la manifestation nationale du 13 octobre ?
Frédéric Sanchez : Cette journée d'action vise à peser sur les négociations avec l'UIMM sur notre convention collective nationale, ouvertes depuis plus d'un an.
Il y a une multiplicité d'accords nationaux, territoriaux ou régionaux dans la branche. Pour nous, cette négociation doit permettre d'unifier sous un même statut l'ensemble des quelque 1,4 million de salariés de la métallurgie et aboutir à une convention collective nationale.
Concrètement, qu'est-ce qui se joue pour la vie des métallos ?
David Meyer : Ce sont toutes les garanties collectives au niveau de la branche qui sont remises en discussion. Prenons le point d'entrée des discussions actuelles sur les classifications. Plusieurs aspects sont concernés, la reconnaissance des diplômes, par exemple. Selon le projet patronal, on passerait d'un classement selon les qualifications des professionnels à un classement selon les fonctions tenues. Ceci a un impact sur les seuils d'accueil, c'est-à-dire que le salarié ne bénéficie plus d'un niveau de rémunération lié à son diplôme en entrant dans l'entreprise. Le déroulement de carrière et les primes d'ancienneté pourraient donc être remis en cause. En tout cas, ces dimensions pourront évoluer en fonction du rapport de force établi durant la conduite de la négociation.
Quels sont les objectifs de ces négociations et où en sommes-nous ?
David Meyer : Nous avons défini un agenda avec une structuration par thèmes : le périmètre de la branche et les instances paritaires ; les classifications ; le temps de travail et l'organisation du travail ; la santé au travail… ce sont quatre principaux thèmes sur les douze qui ont été définis. Or, à ce stade et après plus d'un an de négociations, le point numéro un a été mis en réserve. C'est-à-dire qu'il n'y a pas eu d'accord, et il y a blocage sur le texte. Il est donc plus ou moins « au frigo ».
On arrive en même temps au bout de la négociation sur les classifications. La méthodologie définie étant de négocier deux thèmes simultanément, nous avons entamé aujourd'hui une première réunion sur le temps de travail.
Dans ce contexte, vous avez déjà organisé plusieurs journées d'action…
Frédéric Sanchez : En effet, plusieurs actions ont déjà eu lieu en territoires devant les entreprises et les chambres patronales pour peser sur le contenu de cette négociation. En avril dernier, le conseil national de notre fédération a décidé d'appeler à une action nationale à Paris. Nous voulions élargir à d'autres fédérations CGT, mais le contexte national a bousculé cet agenda. Ceci dit, la FERC CGT et la fédération CGT des travailleurs de l'État appellent également à participer à la manifestation du 13 sous forme de délégations.
Les ordonnances ne vont-elles pas rendre caduques les négociations en cours ?
Frédéric Sanchez : C'est une question que nous nous posons. Les ordonnances donnent déjà lieu à des applications dans un certain nombre d'entreprises de la métallurgie.
Pour l'heure, l'UIMM affirme que la branche resterait la référence, mais en réalité, un certain nombre de sujets seraient négociés au niveau des entreprises. C'est-à-dire qu'on est là sur l'inversion de la hiérarchie des normes.
En ce qui nous concerne, nous allons créer les conditions pour aller au bout de la négociation afin d'obtenir une convention collective nationale pour l'ensemble des métallurgistes. D'où notre travail en direction d'autres organisations syndicales pour des démarches convergentes dans ce cadre.
Et où en êtes-vous de ce point de vue ?
Frédéric Sanchez : La délégation CGT a initié des réunions avec la CFE-CGC et la CFDT que nous tenons avant les séances plénières. Cela nous a permis de trouver des points de convergences, notamment sur la reconnaissance des diplômes de l'Éducation nationale et les classifications pour les défendre ensemble.
David Meyer : Pour être un peu provocateur, je dirais qu'avec un patronat comme l'UIMM, ce qui pourrait ne pas être obtenu au niveau des ordonnances pourrait bien l'être au niveau de la branche. Parmi ce qui relève de la branche, l'enjeu des classifications est central et constitue un signal politique fort. Il pourrait servir de référence dans l'industrie et être aussi un modèle pour d'autres branches.
Un cheval de Troie en quelque sorte ?
Frédéric Sanchez : C'est effectivement ce qui peut arriver…
Que se passera-t-il le 13 octobre et quelles suites envisagez-vous ?
Frédéric Sanchez : L'objectif est de mettre un maximum de salariés sous les fenêtres de l'UIMM avenue de Wagram à Paris, avec le dépôt des 50 000 pétitions que nous avons recueillies. Mais les négociations ne seront pas terminées et il y aura évidemment un après-13 octobre. C'est une étape dans la mobilisation et le cadre d'une négociation marathon. Pour le moment, on ne sait pas encore sous quelle forme, mais évidemment la suite va faire écho aux décisions d'actions qui se prennent ces jours-ci, notamment la journée d'action interprofessionnelle du 19 octobre et ses prolongements.
Nous avons un projet CGT pour la convention collective des métallos et nous voulons qu'il soit entendu.