28 mars 2022 | Mise à jour le 29 mars 2022
Le 25 mars 2022, l'espace Europe/International de la CGT organisait sous forme de webinaire un échange avec plus d'une quinzaine de syndicalistes ukrainiens de la FPU et de la KVPU, ainsi qu'avec des camarades biélorusses de la BKDP. Nous avons recueilli leurs témoignages poignants et leur appel à la solidarité qui feront l'objet d'un article dans le journal
la Vie Ouvrière-Ensemble daté de mai 2022. Nous vous livrons en avant-première pour nvo.fr celui d'Olessia Briazgounova, secrétaire internationale de la KVPU, après celui de
Natalia Levystska, vice-présidente de la KVPU, publié le 25 mars.
« La guerre dure chez nous depuis huit ans, mais depuis ce dernier mois, tout a pris une autre dimension. Cette guerre se déroule au mépris des règles internationales. L'horreur est là, il y a les pillages, les meurtres… Et il faut aussi parler des conséquences terribles de la guerre sur les femmes et les jeunes. Il faut parler des viols, de la violence faite aux femmes. Des femmes qui vivent actuellement terrées dans les sous-sols depuis des semaines. Certaines accouchent sous les bombardements, dans le métro. Autant de femmes qui, autrefois, menaient une vie paisible, normale. Tout comme les jeunes qui, auparavant, travaillaient dans les mines, les transports, les centrales nucléaires, et dont beaucoup ont aujourd'hui été tués sur la ligne de défense territoriale.
Des mères seules sont sans rien. Heureusement, l'aide humanitaire et des bénévoles sont là…
Aujourd'hui, beaucoup de gens ne peuvent plus travailler et sont privés de tout moyen de survie. Les travailleuses, quant à elles, ont énormément souffert, car elles occupaient des emplois principalement dans le tertiaire, le tourisme, dans le secteur privé, là où plus rien ne fonctionne. Des mères seules sont sans rien. Heureusement, l'aide humanitaire et des bénévoles sont là…
Comme une partie de l'économie continue de fonctionner, d'autres femmes sont toujours au travail, mais dans des conditions périlleuses, sous les bombes, les missiles. Par exemple, le train entre Lviv et Kramatorsk qui devait évacuer des civils et cent enfants a été récemment bombardé. Des employées qui travaillent pour l'équivalent de la SNCF sont mortes.
Par ailleurs, il faut aussi être vigilant sur les conditions dans lesquelles les femmes fuient les zones de guerre et arrivent dans d'autres pays. Il va falloir absolument contrôler la façon dont l'aide est apportée, le danger est grand de voir des criminels monter des réseaux d'exploitation, de traite sexuelle.
C’est du terrorisme pur et dur
Enfin, si cette guerre a pour objectif de toucher les enfants, les femmes, les civils, il faut aussi avoir conscience que la cible est également l'économie de notre pays. Marioupol, qui est quasiment rasée aujourd'hui, est une ville industrielle, tout comme Kharkiv. L'objectif des Russes est aussi de détruire nos infrastructures, afin que les jeunes Ukrainiens n'aient pas d'avenir. Car, quand on n'a pas de travail, on n'a rien à manger !
À ce sujet, il faut savoir qu'il y a d'ailleurs aussi des attaques contre les exploitations agricoles afin que l'on ne puisse plus rien semer et que cela nous conduise à une crise alimentaire. Mais si on parle de crise alimentaire en Ukraine, alors il y aura, à coup sûr, par conséquent, une crise alimentaire en Europe et en Afrique. C'est du terrorisme pur et dur et les conséquences seront mondiales ! Nous sommes très reconnaissants de l'aide qui nous est apportée et qui est cruciale pour nous. Celle-ci ne nous permettra de revenir à notre vie d'avant, alors il faut continuer d'exiger de la Russie qu'elle cesse cette guerre. »