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INDUSTRIE

Peters Surgical : des licenciements suspendus à une décision du gouvernement

9 avril 2021 | Mise à jour le 9 avril 2021
Par | Photo(s) : Google Streetview
Peters Surgical : des licenciements suspendus à une décision du gouvernement

Malgré leur rôle durant la pandémie, 60 salariés du centre de production de sondes de respirateurs Peters Surgical, à Bobigny, ont été licenciés. En l'absence de justification économique, l'inspection du travail refuse aujourd'hui le licenciement des huit salariés protégés. La direction fait appel au ministère.

C'est un scandale, à la fois industriel, moral et politique qui se profile avec l'affaire Peters Surgical, filiale du fonds Eurazeo, où huit salariés protégés sont actuellement en attente de la décision du ministère du Travail, lequel doit valider — ou pas — leur licenciement.

Des salariés dévoués

Lorsqu'au pic de la crise du coronavirus, le sous-équipement hospitalier en respirateurs s'est avéré être un problème majeur, les salariés de la petite unité Peters Surgical de Bobigny ont soudainement été sursollicités pour répondre à cette demande inattendue.

Spécialisée dans le matériel médical, leader européen du clip hémostatique, Bobigny était le seul site sur le territoire français à disposer des capacités et compétences pour produire la sonde de Motin, un dispositif utilisé pour les respirateurs.

Quasiment du jour au lendemain, la production a dû être multipliée par sept et les salariés ont dû travailler jour et nuit. Pourtant, au bout de ces mois de dévouement, ce n'était pas une médaille de la nation reconnaissante, mais la porte qui devait attendre les intéressés en juin dernier, avec un PSE et une délocalisation définitive de la production en Inde.

« Avec ces licenciements, ce qui a été réalisé en avril 2020, nous serions aujourd'hui dans l'incapacité de le refaire, si jamais nous étions confrontés à un nouveau problème d'approvisionnement », déplore Julien Faidherbe, délégué CGT de Peters Surgical.

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Un mensonge boursier

Les huit salariés protégés doivent faire l'objet d'une demande d'autorisation de licenciement auprès de l'inspection du travail. Or ici, ça ne se passe pas vraiment aussi rapidement que le souhaiterait le patron de Peters Surgical, parce qu'entre autres diverses irrégularités, l'inspecteur du travail ne peut que constater que « la cause du licenciement économique des salariés n'est pas justifiée. »

Au vu des dividendes versés chaque année par la PME à son actionnaire, on ne saurait en effet le contredire : 2,15 millions en 2016, 2,5 millions en 2017, 2,5 millions en 2018, 2,5 millions en 2019 ; une régularité de métronome…

Et des prévisions de l'ordre de 3 millions (et oui les ventes ont bien marché avec la pandémie…), pour 2020 et 2021. Quand on ajoute à cela les millions d'aides publiques qui, selon Mediapart, ont été versés pour le développement au travers la CDC et la BPI, et qu'on sait notamment qu'entre 2016 et 2019 l'entreprise a touché environ un million en CICE et crédit impôt recherche, que faut-il encore pour démontrer l'imposture?… Une gaffe peut-être encore ? Celle d'une déclaration du patron de Peters Surgical, qui rend public sur BFM Business qu'il vient de racheter une petite société allemande de son secteur : Catgut GmbH…

« De ce que j'ai vu sur Internet, cette entreprise a un chiffre d'affaires de 9 millions d'euros avec 85 salariés. On peut supposer que ce rachat est d'au moins deux fois le CA. Et j'ai vraiment un peu de mal à comprendre comment on peut se dire en difficulté économique et débourser une vingtaine de millions pour racheter une entreprise » analyse Julien Faidherbe.

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Le gouvernement au pied du mur

« Le gouvernement a parlé de réindustrialiser la France, notamment dans les secteurs critiques, que ce soit la santé, l'énergie, etc. Nous attendons donc de voir s'il veut réellement joindre le geste à la parole, ou s'il ne s'agit que de communication. Au lieu d'investir 20 millions d'euros pour un rachat, on aurait pu l'investir dans l'appareil de production. Serait-il possible de relancer le site de Bobigny ? Bien sûr, ça peut paraître incongru après un PSE, mais pour cela il faudrait que ce ne soit pas l'actionnaire qui soit aux manettes, mais peut-être l'État », explique encore Julien.

Pour mémoire, la CGT avait demandé la nationalisation de Peters Surgical en même temps que celle de Luxfer, seule usine à produire des bouteilles à oxygène sur le territoire français. Or, Luxfer devait aussi fermer en juin dernier.

Malheureusement, entre les intérêts financiers et ceux du pays, les choix gouvernementaux n'ont jusqu'à présent évolué que dans le discours, mais aucunement dans les faits. En attendant, la décision du ministère du Travail quant à l'autorisation de licenciement des huit élus protégés de Peters Surgical sera révélatrice de la volonté de défendre les dividendes ou les salariés qui luttent contre les délocalisations.

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