26 mai 2017 | Mise à jour le 30 mai 2017
S’appuyant sur la loi du 18 novembre 2016 dite de « modernisation de la justice du XXIe siècle », la CGT a lancé ce 23 mai une action de groupe contre Safran Aircraft Engines (ex-Snecma) qu’elle accuse de discrimination syndicale contre 34 militants CGT.
Lors d’une conférence de presse, le syndicat CGT de Safran, la fédération CGT de la métallurgie, la confédération CGT et le collectif d’avocats de 34 salariés indiquent avoir «mis en demeure » l’entreprise, le jour même par voie d’huissier, de « faire cesser la discrimination » . C’est là le premier acte d’une procédure qui pourrait être longue si la direction du groupe ne met pas à profit les six prochains mois pour ouvrir une négociation afin d’en finir avec ces discriminations et de réparer les préjudices mis en évidence par la méthode élaborée par François Clerc, qui fait aujourd’hui référence devant les tribunaux.
La CGT a choisi de monter cette action avec les quatre cabinets d'avocats de référence sur la question des discriminations : Emmanuelle Boussard-Verrecchia, Savine Bernard, Slim Ben Achour et Joao Viegas.
L'entreprise peut s'en sortir par la négociation
Si les mesures de l'employeur sont insuffisantes, les requérants porteront l'action de groupe devant le TGI qui peut condamner l'entreprise à mettre un terme à la discrimination et à indemniser des préjudices postérieurs à la mise en demeure. Pour obtenir réparation intégrale du préjudice, les salarié-es devront ensuite monter des dossiers individuels devant le conseil des prud’hommes.
Cette procédure inédite concerne des hommes et femmes élu-es et mandaté-es CGT de différents sites de Safran Aircraft Engines, ouvrier·es ou technicien·nes, qui contestent leur évolution de carrière. Ce n’est hélas pas la première fois que la question est soulevée dans cette entreprise puisque dès le début des années 2000, Safran Aircraft Engines a été condamnée et contrainte de régler, dans un protocole de fin de contentieux le 23 décembre 2004, la situation de 119 syndiqués CGT. Mais pour Véronique Moreau, déléguée syndicale centrale qui figure parmi les 34, si Safran Aircraft Engines a été condamné en 2004 et si un protocole de fin de contentieux a été signé, « cela n’a pas empêché la poursuite des discriminations ».
Un cas symbole des discriminations
La confédération CGT est partie prenante à la procédure lancée par les syndicats CGT du motoriste. Sophie Binet, membre de la commission exécutive de la CGT, indiquait lors du point de presse qu’au-delà du cas Safran « des études ont montré un écart de salaires de 10 % entre les délégués syndicaux et leurs collègues à profil identique, et deux fois moins de chances de promotion de carrière ». Sophie Binet a par ailleurs affirmé que la CGT a d’autres « cas en stock », concernant d’autres entités du groupe Safran et d’autres entreprises, et ne cache pas son intention d’engager à l’avenir des actions de groupe en matière d’égalité entre hommes et femmes. « Nous voulons faire de cette action de groupe un symbole des discriminations en France, omniprésentes dans le monde du travail, qu’elles soient racistes, sexistes ou syndicales. L’objectif est qu’elle fasse des petits », prévient la responsable CGT.
Renforcer la loi
Pour la CGT, la loi « justice au XXIe siècle » n’est « pas allée au bout » en posant des « limites » à l’action de groupe. Elle réclame notamment une « réparation intégrale du préjudice », et pas seulement après la mise en demeure.
La CGT demande aussi à Emmanuel Macron et au gouvernement d’aller plus loin dans la lutte contre les discriminations en ajoutant dans les bilans sociaux un indicateur obligatoire de mesure des discriminations sur les carrières, ainsi que l’obligation pour les entreprises de tenir un « registre des candidatures » consignant les caractéristiques de tous les postulants à un poste.