22 novembre 2023 | Mise à jour le 22 novembre 2023
Rassemblés à Paris devant le ministère de l'Intérieur ce mardi 21 novembre, les 60 vendangeurs sans papiers de champagne victime d'esclavagisme moderne ont pu obtenir gain de cause. Une réunion avec la direction générale des étrangers en France et la CGT en charge du dossier était prévue. Avec pour enjeux la régularisation rapide de ces travailleurs sans papiers et la possibilité de porter plainte contre leur employeur.
Postés à quelques mètres devant une antenne du ministère de l'Intérieur dans le 20e arrondissement de Paris, les 60 vendangeurs sans-papier de Champagne attendent les élus de la CGT en négociation avec la direction générale des étrangers en France ce mardi 21 novembre. En septembre dernier, ces vendangeurs de Champagne ont vécu l'enfer. Une affaire sordide qui se déroule à Nesle-le-Repons, une petite commune dans la Marne. Recrutés par un sous-traitant, ces 60 hommes se sont retrouvés dans des conditions de vie et de travail indignes. Victimes d'une véritable traite des êtres humains, logés dans des bâtiments insalubres, sous alimentés et sans salaire. Moussa Korera, qui a travaillé 3 semaines sur place se souvient de ce calvaire. « On était logés dans un hangar, sans toit et sans fenêtre et à peine nourris. Notre donneur d'ordre faisait régner la terreur, portant un pistolet à la ceinture et nous menaçait sans arrêt. C'était de l'esclavage. ». L'affaire est découverte par l'inspection du travail et le 15 septembre suivant, le préfet de la Marne prend un arrêté pour fermer l'établissement qui « hébergeait » les vendangeurs. Depuis lors, la CGT a repris le dossier exigeant une régularisation rapide de ces travailleurs sans papiers ainsi que la possibilité de porter plainte, invoquant la responsabilité des services de l'État de protéger les victimes de la traite des êtres humains. Dans son communiqué le syndicat dénonce que « dans les faits, le ministère de l'Intérieur et ses services se sont désengagés, renvoyant à la débrouille ces salariés vulnérables et dans une précarité extrême. ».
Enquête en cours
C'est donc tout l'enjeu de cette réunion avec à Paris au ministère de l'intérieur. Trois heures d'attente pour les 60 travailleurs, et la victoire au bout. « La situation de chacun a pu être étudiée. Les régularisations vont être enclenchées. Et tous pourront aller porter plainte contre leur exploitant. » rapporte Gérard Ré, secrétaire confédéral CGT en charge de la question migratoire. Concernant l'identité du donneur d'ordre, Gérard Ré ne préfère pas s'avancer, « l'enquête est encore cours, il y a des soupçons sur un ou plusieurs sites de vendanges. ». Pour le syndicaliste, la situation qu'ont vécue les vendangeurs de champagne, s'expliquerait par la mise en place de sous-traitance depuis quelques années dans le secteur. « Avant on faisait travailler des locaux. Le processus de sous-traitance amène ce genre de dérive sur les conditions de de travail, jusqu'à des cas extrêmes d'esclavagisme moderne ». Cette affaire de traite humaine de cette fin d'année 2023 fait lourdement écho à celle de 2020. Trois prestataires viticoles de Champagne étaient jugés à Reims pour « travail dissimulé » et « hébergement dans des conditions indignes ».