12 mai 2022 | Mise à jour le 13 mai 2022
Douche froide pour les salariés. Au terme d'un long feuilleton judiciaire, la Cour de cassation vient de valider le barème Macron encadrant les indemnités pour licenciement injustifié. La CGT entend poursuivre la bataille.
C'est l'une des mesures phares du premier mandat d'Emmanuel Macron. Depuis 2017, l'indemnisation aux prudhommes pour licenciement sans cause réelle et sérieuse est encadrée par un barème légal, dit « barème Macron ». Un dispositif contesté par plusieurs organisations syndicales, dont la CGT, puisqu'il permet de plafonner les indemnités versées au salarié victime d'un licenciement abusif et de sécuriser les employeurs.
Les salariés les plus fragiles… davantage fragilisés
Depuis 2017, un licenciement abusif ne donne ainsi plus droit qu'à une indemnité d'un à deux mois de salaire brut pour un an d'ancienneté, de trois à six mois pour cinq ans d'ancienneté. « Cela fragilise notamment les salariés les plus fragiles, les jeunes qui ont peu d'ancienneté, et qui estiment que cela ne vaut même plus le coup d'aller aux prudhommes, compte-tenu des sommes en jeu », note Céline Verzeletti, secrétaire confédérale de la CGT.
En presque cinq ans d'application, le « barème Macron » a accéléré la baisse des procédures devant les prud'hommes. Un an après la « réforme », en 2018, le nombre de recours était ainsi tombé à 12 0000, soit 5,5 % de moins qu’en 2017, et deux fois moins qu’il y a vingt ans, selon le ministère du Travail (Dares) et France Stratégie (organisme dépendant du Premier ministre).
L’OIT a pourtant donné raison à la CGT, qui continue le combat
D'un point de vue juridique, si le Conseil d'État et le Conseil constitutionnel avait approuvé ce mécanisme, plusieurs conseils de prudhommes avaient estimé qu'il ne respectait pas la convention 158 de l'Organisation internationale du travail (OIT). Laquelle prévoit que le tribunal d'un pays doit attribuer une indemnité « adéquate » au salarié.
En 2019, la Cour de cassation, pour sa part, s'était déjà prononcée dans un simple avis et estimé que la « réforme » était compatible avec la convention de l'OIT. Mais cette dernière a pourtant très récemment donné raison à la CGT en jugeant que le fameux barème risquait de ne pas assurer une réparation adéquate. De quoi donner quelques espoirs aux adversaires du barème !
Il est tout de même regrettable que la justice française fasse autant fi des normes et des règles internationales. Céline Verzeletti, secrétaire confédérale
Las, la cour de cassation, à travers une décision dévoilée le 11 mai, a jugé ce dernier compatible avec la convention 158 de l'OIT et retoqué l'évaluation au cas par cas des versements d'indemnité. « C'est une bonne nouvelle pour le patronat qui se frotte les mains, et une décision catastrophique pour les salariés, se désole Céline Verzeletti. On ne lâche pas au niveau juridique, nous attendons encore la décision du Comité européen des droits sociaux que nous avons saisi », à l'instar de FO. Reste que celui-ci ne rendra pas un avis contraignant… « Il est tout de même regrettable que la justice française fasse autant fi des normes et des règles internationales », déplore Céline Verzeletti.
Les juges devront porter la muselière et les menottes
Pas plus amène, le SAF (Syndicat des avocats de France) estime pour sa part dans un communiqué que « les juges devront porter la muselière et les menottes que les ordonnances Macron leur ont imposées, à la demande du patronat ». Emmanuel Macron déclarait « je ne suis plus le candidat d'un camp mais le président de tous », à l'issue du second tour de l'élection présidentielle du 24 avril dernier. À coup sûr, le président de tous les licencieurs…