Quelque chose de la mer...

C'est un film de genre fait de fantastique, de science-fiction et même d'une pointe d'horreur. C'est un conte noir fait de plans incroyables. On plonge dans l'univers d'Évolution comme on plongerait en eaux maternelles troubles. Comme on imaginerait un retour à la matrice. Car c'est là un cinéma de sensation, de sensualité avec la peur de l'inconnu, de l'inapprochable. Cette peur primale tirée de l'enfance.

Elles ont quelque chose d'étrange, ces femmes qui vivent dans une communauté au bord de l'océan, seules, avec leurs garçons, mitraillées par le soleil. Nicolas, onze ans, habite avec sa mère dans ce village isolé, sans hommes ni fillettes. Dans un hôpital qui surplombe la mer, les enfants se voient administrer un traitement mystérieux.

Chacun s'y prête comme à un passage obligé. Nicolas, lui, s'interroge. Il soupçonne sa mère de lui cacher des choses et voudrait savoir ce qu'elle fait avec les autres femmes, la nuit, sur la plage. Il découvre des choses inquiétantes, mais trouve aussi une alliée inespérée, une infirmière, une fée, une sirène, une amoureuse… ?

Dans son premier film, Innocence – réalisé en 2004 et librement inspiré de L'éducation corporelle des jeunes filles (Mine-Haha), une nouvelle du dramaturge allemand Frank Wedekind –, Lucile Hadzihalilovic explorait déjà la féminité dans une angoisse à la fois sourde et poétique. Dans un internat isolé, au milieu de la forêt, des petites filles apprenaient la danse et les sciences naturelles ou comment devenir des femmes bonnes à remplir leurs fonctions procréatrices.

Ses thèmes de prédilection – enfance, genre, désir, biologie et société – et sa puissance créatrice se confirment et se déploient dans ÉVolution, qu'on pourrait voir comme une possible suite ou variation…

C'est en tous cas, un film incroyable d'évocation et de menace. Imprégné de l'univers marin, il repose sur une réalisation et une mise en scène entièrement au service de l'expérience sensorielle. Les couleurs, les mouvements, la musique, mais aussi le casting et les jeux d'acteurs concourent à la réussite d'un film fantastique magnifique et inclassable.

Évolution, réalisé par Lucile Hadzihalilovic.

Sortie nationale le 16 mars 2016. 1 h 21.