Stéphanie, caissière d'Auchan City est réintégrée
Soulagement pour Stéphanie [le nom a été changé, NDLR], caissière chez Auchan City à Tourcoing. La procédure de licenciement pour faute grave lancée à son encontre par son employeur à été annulée. Stéphanie sera prochainement réintégrée dans un « magasin Auchan de la région », confirme un porte-parole de la chaîne.
Une bonne nouvelle pour cette mère de trois enfants pour qui le cauchemar avait commencé début juillet lorsqu’une cliente du magasin se présente à l’une des six caisses self-service que supervise Stéphanie. Une double promotion sur deux packs d’eau gazeuse et l’annulation de la vente de deux des quatre paquets de pâtes présentés par la cliente lorsque celle-ci réalise qu’elle ne peut pas payer les quatre, le passage est pour le moins confus.
Assez confus d’ailleurs pour que la direction, après examen des bandes vidéos, accuse la caissière de « manipulation frauduleuse volontaire » et invoque une « faute lourde » pour la licencier. À cela s’ajoute le fait que l’hôtesse de caisse ne s’est pas rendu compte du vol, pendant ce même passage, d’une boîte de sauce tomate. Au final, cette boîte de sauce tomate, vendue 85 centimes d’euros, sera en réalité la seule perte réelle pour le magasin.
LICENCIÉE POUR 85 CENTIMES
« Ces mesures n’ont pas été prises à la légère », explique un porte-parole du groupe Auchan interrogé sur la proportionnalité entre la sanction – le licenciement de Stéphanie – et le dommage – le vol, par une cliente, d’un pot de sauce tomate d’une valeur de 85 centimes d’euros. « Je vous laisse cette appréciation, simplement, cette sanction a été menée sur une accumulation de faits, et sur l’absence d’éléments d’explications de cette personne », poursuit-il.
Une mobilisation prend alors de l’ampleur dans la ville du Nord pour défendre Stéphanie, syndiquée à la CGT. Une pétition est signée par près de 6 000 personnes réclamant sa réintégration. Le 13 août, entre 50 et 100 personnes se rassemblent devant l’enseigne pour sensibiliser les clients du magasin et faire pression sur la direction.
« Ce n’est même pas du syndicalisme », s’exclame, en colère, Samuel Meegens, secrétaire général de l’union locale CGT de Tourcoing : « Quand vous avez une copine qui perd son boulot et qui doit nourrir trois gamins, vous ne pouvez pas rester les bras croisés ! »
D’autant plus que le climat social est lourd chez Auchan City. Cette enseigne du groupe Auchan, dont il n’existe que deux magasins en France (Tourcoing, dans le Nord, et Coignières, dans les Yvelines), est une « expérience » pour les propriétaires, dénonce Samuel Meegens, et les salariés y sont traités comme des « cobayes ». La distinction entre Auchan City et le reste du groupe permet, selon les représentants syndicaux, d’appliquer des salaires inférieurs à ceux négociés chez Auchan. De plus, les conditions de travail y sont difficiles, explique Samuel Meegens, du fait du manque de personnel, en dépit des 150 000 euros de crédit d’impôt par an reçus par le groupe et de l’achat « à l’euro symbolique » du terrain sur lequel le magasin est implanté.
DES ÉLÉMENTS NOUVEAUX ?
La direction dément le lien entre la réintégration de Stéphanie et la mobilisation syndicale, et justifie ce revirement de position par l’apparition « de nouveaux éléments » après que Stéphanie a rompu le silence et accepté de s’expliquer devant ses responsables, sans donner davantage de précisions sur la nature de ces éléments.
« C’est n’importe quoi. Quels éléments nouveaux pourrait-il y avoir ? », sourit Samuel Meegens, pour qui la direction d’Auchan refuse d’admettre le rôle joué par la CGT de peur d’apporter de l’eau au moulin des syndicalistes, dans un climat de discrimination syndicale.