29 juin 2017 | Mise à jour le 29 juin 2017
Entre l'offre de la Foir'Fouille et celle de Gifi, le tribunal de commerce de Bobigny a tranché, lundi 26 juin. La désignation de Gifi comme repreneur de Tati et des trois enseignes d'Agora distribution (groupe Eram) va permettre de sauver 85 % des emplois. Mais elle laisse sur le carreau 268 salariés.
Après des mois de lutte et d'angoisse, les salariés de Tati sont enfin fixés sur leur sort. Un sort nettement plus satisfaisant que ne le laissaient présager les offres initiales des divers candidats à la reprise de l'enseigne au vichy rose, jugées, au départ, « squelettiques, indigentes, inacceptables », par Maître Mounir Bourhaba, l'avocat du CE de Lilnat, (société détenant les magasins Tati). Sous la pression constante des salariés et de leurs syndicats (CGT, CFDT, CFTC) mobilisés à temps plein depuis plusieurs mois, Gifi et Foir'fouille, au bras de fer pour la reprise, n'ont cessé d'améliorer leurs offres respectives jusqu'à les rendre recevables par le tribunal de commerce de Bobigny.
Bien que l'objectif « zéro licenciement » porté par la CGT ne soit pas atteint, il convient de noter que huit emplois sur dix, soit 85 % de l'effectif total, sont préservés ainsi que 109 magasins sur 140, ce n'est pas rien. Autre avancée gagnée par la mobilisation constante des salariés, les conditions d'accompagnement et de reclassement (PSE) des quelque 268 licenciés sont, cette fois-ci, « de niveau très élevé pour une entreprise en redressement judiciaire », a déclaré au Figaro Thomas Hollande, l'avocat des salariés de Tati.
Réjouissance mitigée
Céline Carlen, de la CGT Commerce et Services est, elle, beaucoup plus mitigée : « La CGT ne peut que se réjouir du fait que deux acteurs se soient porté candidats à la reprise des Tati alors que l'entreprise était placée en redressement judiciaire. En revanche, on ne peut pas se satisfaire des 268 salariés laissés sur le carreau, d'où notre bataille auprès du ministère du Travail pour améliorer les conditions du PSE. » Pour ces licenciés, les temps s'annoncent en effet très difficiles, compte tenu de leur profil sociologique : femmes à très fortes anciennetés, d'âge moyen situé autour de la cinquantaine et peu qualifiées car peu formées par l'entreprise au cours de leur longue carrière. Autant de cas difficilement reclassables sur le marché de l'emploi. Or, que prévoit le PSE « de niveau très élevé » selon Thomas Hollande ? Le maintien, à hauteur de 95 %, du salaire pendant douze mois ; jusqu'à 10 000 euros d'indemnités supra-légales suivant l'ancienneté et un budget « formation/reclassement » de 8 000 euros par salarié, pris en charge par l'État. C'est mieux que rien, en effet. Mais pas non plus extraordinaire.
Veiller au respect des engagements
Au point que la CGT s'est d'ores et déjà engagée avec les Tati à suivre scrupuleusement la mise en œuvre des conditions d'accompagnement des licenciés. Elle veillera tout aussi attentivement au respect des engagements pris par Gifi, et non sans raison : « Nous soupçonnons Gifi d'avoir pour projet de se délaisser très vite d'une quinzaine de magasins, ainsi que l'y autorise le jugement du tribunal de commerce ; une étrange décision quand on sait que le principal effort consenti par Gifi, pour que sa dernière offre soit jugée recevable face à celle de Foire'Fouille, portait sur la reprise de seize magasins supplémentaires », précise Céline Carlen. À rebours de la CFDT et de la CFTC – les deux autres organisations syndicales présentes chez Tati –, qui se déclaraient « très satisfaites » de cette reprise par Gifi, Céline Carlen demeure, elle, très réservée : « Nous avons très bien travaillé avec le ministère du Travail sur ce dossier pour aboutir à ce résultat qu'il faut saluer. Mais ne nous mentons pas : nous négociions dans un contexte électoral et cela a pesé, nous avons obtenu ce que beaucoup d'autres entreprises en difficulté n'obtiendront pas demain. Il va donc falloir nous organiser et rester très combatifs. »
Tati à vendre