29 mai 2017 | Mise à jour le 29 mai 2017
Le 29 mai, le tribunal de commerce de Bobigny doit statuer sur l’avenir de Tati. La CGT dénonce la mise sur le carreau de quelque 700 salariés, quel que soit le scénario des repreneurs potentiels, et pointe la responsabilité sociale du groupe Eram. La mobilisation est plus que jamais à l’ordre du jour
Mobilisés les Tati ! Lundi 22 mai et de nouveau lundi 29 mai, jour où le tribunal de Bobigny doit rendre sa décision sur l’avenir de l’enseigne, le personnel du magasin d'habillement à petits prix est appelé à se mettre en grève. C’est que les 1 720 salariés de Tati sont plongés dans l’incertitude quant à leur emploi et à leur avenir. Outre Tati Barbès, le plus connu du groupe, quelque 140 magasins au total sont répartis sur toute la France.
Depuis le 28 février, date de la mise en redressement judiciaire d’Agora distribution (Tati, Fabio Lucci, Gigastore et Degrif’Mania), filiale du groupe Eram, les salariés vivent dans l’angoisse devant ce qui ressemble à un dépeçage de l’enseigne populaire et emblématique de l’habillement bon marché.
Tati ou l’hallali économique
Les repreneurs potentiels (le groupe GiFi, l’enseigne Babou mais aussi un consortium comprenant la Foir’Fouille, Maxi Bazar, Dépôt Bingo, Centrakor, Stokomani), connus depuis la fin de la semaine dernière, se disputent qui les stocks, qui un ou plusieurs magasins, qui les fonds de commerce… sans que personne ne comprenne quelle logique commerciale sera mise en œuvre. Dans un communiqué, l’union syndicale CGT de la Fédération du commerce, de la distribution et des services de Paris s’étonne, elle, de voir que des candidats à la reprise « se déchirent pour le rachat de Tati, si, comme le répète M. Resseguier l’entreprise Tati, prétendument endettée, ne valait guère plus qu’un euro symbolique ». Rien qu’à eux seuls, les stocks de Tati auraient une valeur comptable d’environ 100 millions d’euros, et les fonds de commerce sont estimés par un expert à près de 30 millions d’euros.
Une chose est sûre : parmi ce big bazar, aucun des repreneurs ne s’engage à garder l’intégralité des salariés et des magasins. Concrètement, entre 400 et 800 emplois, selon les différents scénarios, sont directement menacés. « Le dénominateur commun de tous les magasins, c’est le fou artistique par rapport aux conditions du repreneur », note David Longeval, référent de l'union locale de Lyon, qui a participé à l’organisation de la grève des salariés de l’enseigne, lundi 22 mai, dans la région Auvergne-Rhône-Alpes.
Delphine Court, déléguée syndicale CGT à Tati Saint-Etienne, ne décolère pas : « Depuis l’annonce du 28 février sur le redressement judiciaire, on vit l’enfer. La direction nous cache tout sur la situation économique de l’entreprise. » Si Tati va si mal qu’on veut bien le dire, c’est avant tout parce que « la direction a fait des choix de gestion catastrophiques, comme par exemple le développement des franchises à l’international. Ce n’est pas aux salariés de payer les pots cassés de la politique économique des dirigeants », s’insurge David Longeval qui a organisé, lundi 22 mai, avec les syndicalistes de l’enseigne, la grève des salariés de Tati en région Auvergne-Rhônes-Alpes.
Le groupe Eram refuse d’assumer ses responsabilités
À ce grand mercato de la reprise, les salariés risquent gros. Et ce d’autant plus que le groupe Eram refuse d’assumer ses responsabilités sociales. Depuis la loi Macron de 2015, le groupe est dans son bon droit ! Des dispositions de cette loi permettent à un groupe dont une filiale est en difficulté de ne plus à avoir à financer le plan de sauvegarde de l'emploi (PSE).
En l’état, les salariés employés dans les magasins qui ne seraient pas repris toucheraient uniquement des indemnités légales et 3 000 euros pour une formation. « Si des licenciements sont vraiment inévitables, les salariés doivent pouvoir avoir un plan social à la hauteur de la capacité financière de l’actionnaire et pris en charge par le groupe Eram », estime la CGT.
Lors de se rencontre avec les représentants du personnel, le 22 mai, la ministre du Travail, Muriel Pénicaud, s’est uniquement engagée à mettre en place une antenne dédiée au reclassement des Tati au sein de Pôle emploi pour une durée de douze mois. « C’est dérisoire pour des salariés qui ont parfois trente ou quarante ans de maison et sont souvent des seniors et des femmes seules avec enfants. »
Sur le terrain, Delphine Court, la syndicaliste CGT, vendeuse au Tati de Saint-Etienne depuis quatorze ans, ne décolère pas : « En guise d’obligation de reclassement, le groupe nous propose des emplois à l’étranger, en Chine notamment… » Tati est mûr pour changer de slogan : Tati c’était les plus bas prix, c’est désormais le mépris.