13 mai 2016 | Mise à jour le 14 février 2017
Le cinéaste Jean-Paul Le Chanois, l'historien Benigno Cacérès, le romancier Jean Cassou et bien d'autres nous racontent leurs années 1930. Une rediffusion d'émissions, de 1971 sur France Culture, qui nous replonge dans l'atmosphère bouillonnante du Front populaire.
À l'automne 1971, Dominique Desanti, femme de lettres et ancienne résistante, a la bonne idée de convier à la radio, une dizaine de témoins des années 1930. Elle leur tend le micro durant une demi-heure pour leur faire raconter leur jeunesse, leur engagement politique autant qu'artistique et le Front populaire. Alors que l'on fête les 80 ans de ce dernier, les « Nuits de France Culture » a eu la bonne idée de rediffuser ces témoignages et, du coup, de nous les offrir en réécoute.
LA SOIF D'APPRENDRE
Pas moins de dix émissions au total nous font revivre cette période trouble, bien qu'exaltante. Ravi de sentir « repousser ses cheveux » en se replongeant dans ses 20 ans, le cinéaste Jean-Paul Le Chanois évoque les touts premiers ciné-clubs où le public pouvait découvrir les films soviétiques censurés comme Le Cuirassé Potemkine.
Lui, il a dû attendre quelques années avant de voir la fin du film, la projection ayant été interrompue par l'arrivée de la police. Il se souvient encore avec l'arrivée du Front populaire du renouvellement des spectateurs, d'origine plus populaire comme des grandes heures du Théâtre ouvrier de France qui faisait de l'agit pop dans les meetings ou les goguettes avec le groupe Octobre des frères Prévert.
On écoute aussi avec bonheur l'historien Benigno Cacérès, jeune ouvrier à l'époque qui prendra plus tard les rênes de Peuple et Culture. Il nous raconte avec son accent rocailleux de Toulouse les Foyers du peuple où le populo pouvait s'instruire et prendre la parole, mais aussi les collèges du travail, mis en place par la CGT où l'on écoutait les cours de Radio Tour Eiffel. En 1971, il aimerait bien que la télé en fasse autant…
L'ENVIE DE TRANSMETTRE
Cette soif d'apprendre et de se rencontrer n'était pas que due à l'espoir soulevé par la victoire du Front populaire. Elle devenait de plus en plus présente, alors que les menaces hitlérienne, mussolinienne et franquiste encerclaient la France.
Le romancier Jean Cassou nous parle de la création du Comité de vigilance antifasciste pour la défense de la culture auquel il participa aux côtés de Malraux, d'Aragon ou de Vaillant-Couturier. Dans les quartiers ou les usines de banlieue, ces intellectuels multipliaient conférences et expositions et échangeaient tous azimuts avec les ouvriers.
À travers le témoignage de Jean Cassou, la figure de Jean Zay, en charge de l'Éducation et des Beaux-Arts, réapparaît à sa juste valeur : celle d'un grand ministre – que l'on envie aujourd'hui – avec lequel il collabora.
Nous sommes toujours dans les émissions diffusées en 1971 et Cassou de conclure à l'époque : « 1968 est la suite de tout cela », tant du point de vue de l'énergie révolutionnaire que du bouillonnement culturel. Et nous voilà sous le charme des archives…
Heure de culture française – Les 1930 par Dominique Desanti : Une série d'émissions en deux parties, rediffusée dans les Nuits de France Culture.
1re partie avec Jean-Paul Le Chanois, Benigno Cacérès, Armand Monjo, Robert Aron et Jean Cassou
2e partie avec Stanislas Fumet, Paul Vignon, Vladimir Pozner, Georges Hourdin, Jean-Marie Domenach et Gilles Martinet.