Mobilisation salariale : deuxième round à Roissy CDG
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La crise du Covid-19 a tout du scénario catastrophe pour les compagnies aériennes. En quelques semaines, les flottes ont été clouées au sol, le trafic étant devenu quasiment nul à cause des restrictions de voyages imposées par les gouvernements pour lutter contre la propagation du coronavirus.
Entre les fermetures des frontières et les restrictions de circulation à l'intérieur du pays le transport de passagers est tombé progressivement à 2-3 % de son niveau habituel en France. Actuellement, Air France, la première compagnie aérienne de l'Hexagone, n'opère plus que 10 % du millier de vols qu'elle assure en temps ordinaire. Certes, dès le lundi 11 mai, jour du déconfinement, elle prévoit une augmentation du nombre de rotations entre Paris et les aéroports de Nice, Toulouse et Marseille, mais les incertitudes sur le plan sanitaire ne laissent pas supposer une reprise rapide du trafic.
De plus, la montée en charge progressive jusqu'à 30 % qu'elle envisage au mois de juillet est largement dépendante de la réouverture des frontières. Donc aléatoire. D'ailleurs, de nombreux acteurs du transport aérien indiquent d'ores et déjà que le retour à la normale ne devrait pas intervenir avant trois ans et qu'il faudrait attendre une décennie pour que l'aviation renoue avec la croissance.
Chiffres d'affaires en chute libre, dizaines de millions d'euros ou de dollars engouffrés dans la maintenance d'appareils qui ne volent pas, usagers qui disent vouloir attendre plusieurs mois avant de reprendre l'avion…
Le secteur aérien est en plein crash et, un peu partout dans le monde, des États volent au secours de leurs compagnies. Air France doit recevoir 7 milliards d'euros de prêts annoncés le 24 avril par le ministre de l'Économie, Bruno Le Maire. « Il faut sauver notre compagnie nationale », a-t-il déclaré. De son côté le gouvernement néerlandais devrait ajouter entre 2 et 4 milliards de prêts garantis pour KLM.
Ainsi, en tout Air France-KLM bénéficiera de 9 à 11 milliards d'euros. Les 7 milliards d'euros apportés par Paris se décomposeront en 4 milliards de prêts bancaires garantis à 90 % par l'État et 3 milliards de prêt direct de l'État, le tout devant être remboursé en six ans maximum. Ces mesures sont prises « pour sauver les 350 000 emplois directs et indirects qui vont avec », a ajouté Bruno Le Maire. Un dispositif d'aide que la Commission européenne a approuvé le 4 mai.
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« Ce n'est pas un chèque en blanc », a toutefois souligné le ministre. Air France doit « devenir la compagnie la plus respectueuse de l'environnement de la planète » et faire « un effort pour être plus rentable ». La première condition ne mange pas de pain : la compagnie s'est déjà engagée à réduire de 50 % son empreinte carbone d'ici à 2030, notamment via le plan de renouvèlement de sa flotte.
De même, son réseau de lignes de courte distance (moins de deux heures de vol) devait subir un plan de réduction des coûts, car, concurrencé par le TGV ou le low cost, il génère de lourdes pertes. Il pourrait aller plus loin que prévu initialement avec la fermeture de davantage de lignes (au profit du TGV) et le basculement de certaines destinations sur Transavia, le low cost filiale d'Air France. Que du bon pour la planète.
Par contre, la seconde condition fait bondir les syndicats, notamment la CGT Air France. Après la crise financière de 2008 (10 000 suppressions d'emplois via des plans de départs volontaires et l'octroi du CICE à la compagnie), « les restructurations ont fait croître la productivité de 27 % et on nous parle d'augmenter la rentabilité ! L'histoire se répète à une échelle démesurée et l'avenir promet d'être destructeur si nous n'imposons pas nos revendications » tempête l'UGICT CGT Air France dans un communiqué.
De fait, les banques ne sont pas forcément enchantées de prêter à une compagnie au bord de la faillite. Elles pourraient avoir demandé des garanties, de même que les deux nouveaux actionnaires qui viennent d'entrer au capital de la compagnie. De son côté, le ministère de l'Économie n'ayant pas assorti l'aide financière de conditions sociales, les salariés pourraient une fois de plus servir de variable d'ajustement.
Quant au directeur général d'Air France KLM, Benjamin Smith, qui se serait opposé à la renationalisation temporaire de la compagnie, il ne lui aura « pas fallu 24 heures pour [annoncer] des suppressions d'emplois », indique le syndicat. Une façon de muscler le plan de transformation de l'entreprise qu'il avait présenté en septembre dernier. Comme quoi, le monde d'après le coronavirus pourrait ressembler au monde d'avant en pire… si les syndicats ne s'en mêlent pas.
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