Mouvements sociaux : les femmes en première ligne
Pour Michelle Zancarini-Fournel, historienne et professeure émérite à l’université Lyon 1, nous vivons un moment d’insurrection féministe généralisée. Droit à... Lire la suite
Vingt heures, près de Denfert-Rochereau, une petite équipe de colleuses s'est donné rendez-vous. Margaux, 24 ans, sort du métro, un bac de colle à la main. Le groupe se constitue peu à peu. Ce soir, c'est le premier collage pour Charlotte 25 ans et Chloé 22. Juliette, 31 ans, fait figure d'ancienne. Cette graphiste free-lance a commencé à coller dès septembre, à peine une quinzaine de jours après le lancement du mouvement contre les féminicides, et n'a pas arrêté.
En moyenne, elle y consacre au moins une soirée par semaine. Amélie, 20 ans, est, elle, entrée dans l'aventure fin novembre, juste après la grande manifestation contre les violences faites aux femmes. « J'en avais tellement marre du harcèlement dans la rue… Coller, c'est reprendre un espace public auquel nous avons droit, explique la jeune femme étudiante en photo. J'avais envie de réveiller les gens avec ces slogans contre les féminicides. »
Si, pour Amélie, Juliette ou Margaux, le collage est le premier engagement féministe, ce n'est pas le cas de toutes. Lacalla, régisseuse plateau et lumière, fait partie d'un groupe féministe radical. Chloé s'est investie dans une association qui préparait la journée du 8 mars (Journée internationale des femmes), lors d'une année d'études à Hambourg. « En Allemagne, c'est le droit au travail qui est LA question féministe, il n'est pas du tout question des féminicides. »
Changement complet de forme de militantisme, ce soir, pour Charlotte. La jeune femme a travaillé, dans le Tarn, en premier accueil dans une association de lutte contre les violences conjugales et conduit une recherche sur l'accompagnement des femmes victimes en milieu rural.
Dans une ruelle, un premier mur est choisi pour accueillir l'inscription « NON À LA CULTURE DU VIOL ». Au fil des mois, les mots d'ordre se sont diversifiés et dénoncent maintenant différentes formes de violence sexistes. Amélie a préparé chez elle les slogans qui seront collés ce soir. Les lettres peintes en noir sur une feuille A 4 sont déjà en ordre. Rapidement, il faut enduire le mur, placer les lettres et les recoller soigneusement.
Des slogans d'actions précédentes ayant été abîmés, ils sont recouverts par de nouveaux. Dans un passage, Juliette escalade une poubelle pour coller « LA PEUR VA CHANGER DE CAMP ». En écho, deux femmes longent la petite équipe et s'exclament en souriant : « Bravo ! ». Si les mots d'encouragement sont fréquents, les colleuses sont aussi confrontées à des réactions hostiles.
« Samedi dernier, nous avons été bousculées par un hipster d'une trentaine d'années venu décoller notre slogan. Il tenait des propos sexistes complètement incohérents », se souvient Margaux. Elles sont parfois aussi victimes d'intimidations policières. « Samedi, une colleuse a été conduite au commissariat et y a passé quatre heures. Les agents lui ont mis la pression pour qu'elle signe un procès-verbal », raconte Lacalla. La déambulation nocturne s'achève comme elle a commencé, dans un froid glacial. Demain, les passants qui prendront le métro découvriront ce slogan comme un cri sur les murs. « PAS UNE DE PLUS ».
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