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68%des écarts de salaires entre les femmes et les hommes sont dus à la « ségrégation professionnelle », estime l’Insee.

22 juin 2020 | Mise à jour le 22 juin 2020
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Au moyen de deux études publiées en mai, l'une sur les « conditions de vie pendant le confinement » et l'autre sur « les écarts de rémunération femmes-hommes » en 2017, l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) donne un coup de projecteur sur la situation des femmes dans notre société.

Premier enseignement de l’enquête de l'Insee concernant les « conditions de vie pendant le confinement » (réalisée par téléphone du 27 avril au 16 mai auprès de plus de 1 600 personnes de plus de 15 ans), la période a vu les inégalités sociales se creuser, les personnes aux revenus les plus modestes ayant le plus souffert.

Ainsi, 37 % des personnes dont le niveau de vie se situe parmi les 40 % les plus modestes ont été concernées par une perte de revenu lié à la restriction de leur activité (chômage technique ou partiel, arrêt de travail pour maladie ou garde d'enfant, non-renouvellement de contrat), contre 27 % parmi les 20 % les plus aisés. De plus, ces personnes ont également eu plus de difficulté à gérer le suivi scolaire de leurs enfants.

Mamans solos, garde d’enfant et perte de salaires

Les réponses obtenues  lors de cette enquête montrent également que les familles monoparentales ont été plus souvent concernées par la chute de revenu due à la restriction d'activité liée à la garde d'enfant (27 % contre 16 % pour le reste de la population).

De plus, la difficulté à assurer le suivi scolaire y a été davantage ressentie (à 48 % contre 34 % pour les autres types de ménages). Or, les femmes représentent environ 85 % des parents à la tête d'une famille monoparentale.

Par ailleurs, si l'on prend en compte l'ensemble des foyers, il s'avère que les mères ont deux fois plus renoncé à travailler pour garder les enfants (20 % contre 12 % pour les pères). Ce sont aussi elles qui les ont davantage pris en charge (83 % d'entre elles ont consacré plus de quatre heures par jour aux enfants contre 57 % des pères).

Pire ! Même quand aucun des deux parents n'a pu avoir d'autorisation spéciale pour garde d'enfants, 80 % des femmes ont passé chaque jour plus de quatre heures à s'occuper de ces derniers (52 % des hommes), et 45 % d'entre elles ont dû assurer la « double journée » professionnelle et domestique.

Même confinés, mères et pères ne sont pas égaux

La seconde étude de l'Insee, qui porte sur les « écarts de rémunérations femmes-hommes » en 2017, rappelle que, d'une manière générale, « les inégalités de volume de travail entre les femmes et les hommes en emploi sont très marquées pour les parents ayant un enfant en bas âge ou pour ceux ayant trois enfants ou plus ».

Elle montre aussi que les inégalités de salaires en équivalent temps plein (EQTP) – c'est-à-dire pour un même volume de travail – sont plus importantes entre les mères et les pères (12 % avec un enfant, 21 % avec deux et 31 % avec trois) qu'entre les femmes et les hommes sans enfants (7 %).

De même, « les inégalités d'accès aux emplois les mieux rémunérés sont beaucoup plus importantes entre les mères et les pères qu'entre les femmes et les hommes sans enfants ». Ainsi, la probabilité pour qu'elles accèdent aux 1 % des emplois les mieux rémunérés est inférieure de 60 % à celle des pères, contre 30 % pour les femmes sans enfants par rapport aux hommes sans enfants.

Le rôle du temps de travail

Certes les écarts de salaires entre les hommes et les femmes ont tendance à s'atténuer au fil des décennies. En France, en 2017, le revenu perçu par les femmes salariées était en moyenne inférieur de 28,5 % à celui des hommes dans le secteur privé – contre 42 % en 1967 et 35 % en 2002, indique l'Insee.

Selon l’étude de l’institut, l’écart qui subsiste est dû en grande partie au fait que les femmes travaillent davantage à temps partiel (30 % contre 8 % pour les hommes), les plus jeunes, les mères de jeunes enfants et les moins diplômées étant les plus concernées.

Ainsi, « plus de 40 % [de l'écart salarial entre les femmes et les hommes, NDLR] résulte des inégalités de temps de travail », révèle l'étude. Plus que les discriminations à l'entreprise, l'Insee pointe la « ségrégation professionnelle » pour expliquer les écarts de rémunérations femmes-hommes.

Calculé en EQTP, l'écart salarial moyen entre les femmes et les hommes chute en effet à 16,8 %, les femmes ayant plus de deux enfants, celles qui sont les plus diplômées et celles qui ont le plus d'expérience professionnelle s'avérant alors les plus pénalisées.

Ne niant pas l'existence de discriminations salariales entre les femmes et les hommes en entreprise, l'Insee en relativise l'impact, notant d'ailleurs qu'en 2017, à poste équivalent, pour un temps plein, l’écart de salaire se réduit à 5,3 % dans le privé.

« En fin de compte, note l'institut national de la statistique, les écarts de salaire en EQTP sont dus en grande partie à la ségrégation professionnelle : 68 % de l'écart provient du fait que les femmes et les hommes n'occupent pas les mêmes postes, c'est-à-dire une profession donnée au sein d'un établissement donné ».

Aux « héroïnes » le social,
aux hommes les meilleurs postes et salaires…

Autrement dit, les femmes continuent d'être majoritairement assignées aux métiers traditionnellement vus comme faisant appel à leurs qualités supposées intrinsèques : elles sont surreprésentées dans les professions de la santé et du social, ou encore le secrétariat.

Des secteurs moins valorisés que ceux où les hommes travaillent massivement : la construction ou encore le transport ; le métier d'ingénieur informatique étant très majoritairement exercé par les hommes. Vient s'ajouter au tableau dressé par l'Insee le fait que 22,8 % des hommes sont cadres, contre 17,5 % des femmes.

Outre l'actualisation et la mise en perspective des données, les constats et analyses des deux études de l'Insee éclairent tout particulièrement la période actuelle : une fois de plus, les louanges et autres hommages aux « héroïnes » du confinement pourraient éclipser la question des inégalités entre les femmes et les hommes au sein de la société française. À commencer, par exemple, par la faible rémunération du métier d'infirmière…