CGT et CFDT appelaient à la mobilisation, ce 3 septembre, contre un PSE qui va supprimer un tiers des effectifs de CGG, seule entreprise de services de géophysique française. Une centaine d'emplois, mais aussi la perte de compétences et d'un positionnement stratégiques, sont en jeu.
Les syndicats CGT et CFDT de CGG appelaient les salariés à la mobilisation, ce jeudi 3 septembre, devant le siège de l’entreprise à Massy (91). Leur objectif : dénoncer le PSE qui devait être présenté aux élus du CSE, ce jour-là.
Spécialiste des services de géolocalisation français – d'échographie des sous-sols, en d'autres termes –, CGG prévoit la suppression d'une centaine d'emplois, soit près d'un tiers des effectifs de l'entreprise (94 sur 364). Après avoir subi deux plans sociaux en 2016 et 2019, le site de Massy passerait ainsi de plus de 900 salariés en 2015 à environ 270. Une saignée qui signerait la mise à mort clinique du site et laisserait planer l'ombre d'une fermeture définitive à moyen-terme, selon les syndicats.
Victimes du virus et du cours du baril de pétrole
Dans le contexte pandémique qui sert souvent d'accélérateur aux restructurations déjà prévues par les directions des entreprises, le PSE de CGG porte le sceau d'une double peine. « Nous subissons la crise sanitaire conjuguée à la crise pétrolière », pose Irène Huard, déléguée syndicale CGT. « Bien sûr, nous avons enregistré une baisse de notre carnet de commandes, les compagnies pétrolières ont réduit leurs investissements et suspendu des projets avec la chute du prix du baril, détaille Michel Hacquart, délégué syndical CGT et secrétaire du SNGG-CGT (Syndicat national de la géologie et de la géophysique). Cette baisse est donc conjoncturelle, mais elle correspond également aux cycles habituels du marché de l'exploitation pétrolière. »
Convaincus, d'après leur expérience, que l'activité devrait rebondir d'ici fin 2021, les syndicats considèrent que la restructuration lancée par l'entreprise va bien au-delà de la réduction du carnet de commandes et que son but est d'opportunément augmenter les marges de profit de l'entreprise dans la période.
Recherche de cash
« La direction du groupe vise en priorité à sauvegarder la trésorerie, au détriment de l'emploi et des compétences, explique encore Irène Huard. C'est la même stratégie – purement financière – des fonds spéculatifs qui ont restructuré la dette en 2018. On pense qu'ils profitent de la crise actuelle pour poursuivre une restructuration déjà engagée en 2019 puisque nous avons suspendu des activités d'acquisition de données jugées trop risquées pour des dirigeants qui veulent faire des profits rapidement. »
Une situation encore exacerbée par des tensions internes liées à une lutte de pouvoir après le rachat de l'entreprise américaine (ex-Veritas) par CGG, en 2007, qui aurait pour conséquence de desservir le siège de Massy au profit du centre américain de Houston.
Et le projet industriel ?
Après avoir bénéficié de près de 28 millions de crédit d'impôt recherche depuis 2017, comment accepter que CGG sacrifie son département de Recherche & Développement dont 40 % des postes seront supprimés ? Comment ne pas regretter que les compétences scientifiques et techniques de pointe de l'entreprise sur l'imagerie des sous-sols ne soient pas utilisées pour développer d'autres applications que celles liées à la recherche d'hydrocarbures ?
L'enjeu est pourtant double : environnemental et industriel. « D'autant qu'elle pourrait faire appel aux prêts garantis par l'État pour passer ce creux du marché tout en faisant évoluer ses activités pour accompagner la transition énergétique », pointe la syndicaliste, pour qui cela confirme, s'il le fallait, la logique financière qui domine au détriment du projet industriel.
Intérêt stratégique national
Sous sa double casquette de premier contracteur mondial de services géophysiques et de première compagnie de géophysique française, CGG a aujourd'hui accès à toutes les réserves d'hydracarbures dans le monde – son principal concurrent, BGP, est chinois, et les autres acteurs sont principalement américains et russes.
Or, à l'heure où la crise sanitaire a fait prendre conscience des risques encourus à délocaliser et à sous-traiter à peu près toutes les productions, « on perd progressivement le seul centre d'imagerie des sous-sols en France, fulmine Michel Hacquart. C'est un véritable saccage industriel de la part des actionnaires et des dirigeants qui se sont succédé à la tête de l'entreprise. » Quid des emplois et des intérêts industriels et stratégiques à sauvegarder dans l'Hexagone…