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AÉRONAUTIQUE

Des milliards d’aides publiques déversés sur un secteur qui licencie à tour de bras

8 septembre 2020 | Mise à jour le 8 septembre 2020
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Chez Figeac Aéro, une réorganisation avec suppression de 320 emplois sur 1 100 salariés a été annoncée lors du CSE du 27 août 2020. Tandis que des milliards d'aides sont promis pour le secteur, la CGT dénonce une décision économiquement injustifiée et avance des propositions d'avenir.

C'est le 27 août 2020 qu'était convoqué un CSE extraordinaire chez Figeac Aéro (Lot) avec, à son ordre du jour, un projet de réorganisation. Le PSE annoncé doit entraîner la suppression de 320 emplois sur le site de Figeac. 320 suppressions qui s'ajoutent aux 147 autres qui ont déjà eu lieu depuis le début de l'année au travers de CDD non renouvelés, d’intérimaires remerciés et de CDI qui ont quitté leur poste sans être remplacés.

Le motif économique contesté

« C'est le motif économique qui est avancé avec la sauvegarde de la compétitivité. Or, c'est très subjectif dans la mesure où cela se base sur des projections d'avenir. Ils se réfèrent à la baisse des cadences chez les donneurs d'ordres, et en l'occurrence Airbus, pour affirmer que l'entreprise ne dégagera pas – ou moins de marge – et ils évoquent la sauvegarde de la compétitivité. Dans le document du PSE de 130 pages, les explications sur cela ne tiennent que sur deux pages. En fait, il n'y a aucune information probante pour analyser ce qu'ils évoquent », rapporte Jérémy Gargaros, délégué syndical CGT de Figeac Aéro.

En Occitanie, forte mobilisation pour défendre l'emploi dans l'aéronautique

Un secteur qui reste florissant

Pour Jérôme Delmas, secrétaire général de l'UD CGT du Lot, l'aéronautique demeure, malgré la crise, l'un des secteurs les plus riches et les plus florissants : « Les perspectives de commandes sont inégalées dans n'importe quel secteur de l'industrie. Le carnet de commandes d'Airbus est plein pour au moins les huit prochaines années. Ce sont des perspectives économiques très intéressantes, et on est loin de pouvoir dire que nous sommes face à une crise majeure qui justifierait des suppressions d'emplois. Nous sommes dans une crise conjoncturelle mais pas structurelle. »

« Le carnet de commandes d'Airbus à fin juillet 2020 est de 7 584 avions civils. Bien sûr, des livraisons envers les compagnies aériennes ont été différées dans le temps, mais elles ne sont pas annulées », confirme Jérémy Gargaros.

« Le plan aéronautique doit être fléché »

Tandis que le gouvernement annonce plusieurs milliards d'aides au secteur aéronautique, Airbus supprime 5 000 emplois, et les sous-traitants lui emboîtent le pas.

« Nous disons que toute aide publique doit être fléchée pour l'emploi des salariés. L'investissement de l'État dans de telles subventions doit être vraiment alloué à la sauvegarde et non à des suppressions d'emplois. Et on peut tout aussi bien faire intervenir d'autres leviers tels que les trésoreries des entreprises qui ont accumulé des richesses énormes depuis des années. Airbus dispose de 35 milliards d’euros de trésorerie aujourd'hui, et pour son sous-traitant Figeac Aéro, c'est 187 millions. C'est peut-être le moment d'en investir une part pour conserver les emplois », ajoute Jérome Delmas.

Les syndicalistes ne cachent pas, en effet, leur crainte de voir l'argent versé aux grands groupes alimenter le puits sans fond des dividendes plutôt que l'emploi. Mais ils demeurent optimistes : « Le plan peut être intéressant si les employeurs ont derrière de vrais projets industriels et une volonté de maintenir les emplois », affirme Jérémy.

VIDÉO Les sous-traitants d'Airbus se mobilisent pour l'emploi dans la Somme

Sortir du fatalisme

De ce point de vue, la CGT n'est pas en reste en matière de propositions : « C'est une crise conjoncturelle. Et nous disons qu'il y a d'autres solutions que de licencier durant la période. Derrière, il y aura une reprise. Pour autant, il faut aussi diversifier les activités des entreprises dépendantes à 100 % de l'aéronautique. Nous avons des propositions de diversifications que ce soit dans les métiers des énergies, du vent et de la mer, de l'espace, de la défense et de la relocalisation de certains produits. Nous proposons des solutions industrielles et sociales, notamment sur la réduction du temps de travail, qu'elle soit hebdomadaire ou sur l'ensemble de la carrière. Chez Figeac Aéro, les contrats de travail sont à 38 heures, voire 40 heures pour les techniciens et agents de maîtrise. Passer à 35 heures permettrait de créer une centaine d'emplois. Et pour les mêmes raisons, nous revendiquons la retraite à 60 ans, voire moins pour les métiers pénibles », poursuit le délégué syndical de Figeac Aéro.

Des propositions portées régionalement

Le 9 juillet dernier, la CGT a commencé à impulser une mobilisation en Occitanie autour de projets industriels. Parmi les propositions défendues, la revendication de créer un pôle R&D dans chaque entreprise qui aurait pour but de se positionner sur l'avion du futur. Une autre idée portée par la CGT est celle de la diversification des productions, ceci afin d'éviter que la région ne dépende que de la seule industrie aéronautique.

Les syndicalistes ont aussi réfléchi à promouvoir des méthodes de production plus respectueuses de l'environnement et privilégiant des circuits courts, plutôt que les schémas industriels aberrants d'aujourd'hui. Dans l'immédiat, la CGT propose de tirer avantage de la période pour former les personnels, les amener vers de nouvelles technologies, les faire évoluer en compétence.

Prochaine étape : le 17 septembre 2020

Tout ceci ne saurait cependant être gagné sans la lutte. Jérôme Delmas rapporte la manière dont se prépare la journée nationale d'action du 17 septembre dans le Lot : « Nous tiendrons un rassemblement dans la zone industrielle de l'Aiguille, à proximité de Figeac Aéro et de Ratier Figeac. Mais aussi, avec l'ensemble du bassin d'emplois, l'interprofessionnel et les services publics, car les pertes d'emplois industriels ont aussi des répercussions sur l'emploi dans les services publics, les commerces, etc. Il n'y a aucune justification aux suppressions d'emplois dans l'aéronautique. Ces plans constituent le moyen d'exercer un chantage pour imposer des régressions sociales et supprimer des droits. S'ils  les mettent en œuvre dans l'aéronautique, c'est pour profiter de la crise et peser pour le faire ensuite ailleurs. »