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Film

« Petite Fille », brillant documentaire transgenre

12 décembre 2020 | Mise à jour le 12 décembre 2020
Par | Photo(s) : DR
« Petite Fille », brillant documentaire transgenre

Avec Petite Fille, disponible en replay sur Arte.fr, Sébastien Lifshitz livre un magnifique portrait de famille et un vibrant réquisitoire pour la reconnaissance des transidentités.

Dans la pénombre de sa chambre, une fillette aux cheveux mi-longs s'approche de la caméra, enfilant délicatement un déguisement de princesse. « Quand je serai grande, je serai une fille », répète Sasha depuis qu'elle a 3 ans. « Sasha est une petite fille, née dans un corps de garçon. Elle déteste son zizi et regrette de ne pas pouvoir un jour porter un bébé dans son ventre », expose sa mère, Karine, au médecin de famille, dans le Nord de la France.

La dysphorie de genre

Il écoute sans juger, mais s'avoue incompétent en matière de dysphorie de genre, un terme médical qui désigne les personnes qui ne se reconnaissent pas dans leur sexe de naissance et en souffrent. Direction Paris, l'hôpital Robert-Debré, où une pédopsychiatre spécialisée admet qu'on est loin de tout savoir, dans ce domaine, mais amène des éclaircissements et désamorce plusieurs sujets de culpabilité.

Le désir de la maman d'avoir une petite fille est-il à l'origine de la situation ? Avec la déception de voir arriver un garçon à l'accouchement ? Non. « On ne sait pas à quoi est due la dysphorie de genre, on sait à quoi elle n'est pas due. On sait que ce n'est pas au souhait d'un des parents d'avoir un enfant de l'autre genre. »

Parcours du combattant

De retour à la maison, avec un certificat médical officiel pour que l'enfant soit enfin reconnue comme une fille à l'école, les choses restent compliquées. L'équipe enseignante, qui ne s'exprime jamais dans le film, reste sur ses positions et refuse de participer à une réunion organisée par la mère pour expliquer la situation de l'enfant à l'entourage.

La nouvelle prof de danse, elle, met carrément physiquement Sasha à la porte de son cours. Les copains, à l'école, sont parfois moqueurs… Le documentaire montre l'incessant combat que mènent Karine, son mari et l'aimante fratrie de Sasha pour faire admettre son identité. Le récit fait abstraction du reste de la famille, des amis ; il se concentre sur la cellule familiale pour donner à voir son parcours du combattant.

Avec la pudeur qui caractérise son cinéma, Lifshitz montre l'épanouissement de Sasha à mesure que certains obstacles du monde extérieur tombent et qu'elle obtient le droit de s'habiller en fille à la rentrée scolaire suivante. Une petite copine viendra même jouer à la maison pour la première fois.

Geste politique

Arte a frappé un grand coup en diffusant ce documentaire en prime time, le 2 décembre dernier. « Notre objectif, et celui d'Arte, est de toucher le plus de personnes possible afin de faire évoluer les consciences », explique Muriel Meynard, la productrice. « Il y a une visée éducative. La nouvelle génération a un désir de sortir des schémas établis et du formatage très puissant de nos sociétés où l'on doit se conformer à des modèles », déclarait Sébastien Lifshitz, le 28 novembre, à l'Humanité.

« Sasha est là pour aider à faire changer les mentalités, et moi, je suis là pour l'aider, elle », confie Karine, face caméra, à la dernière minute du documentaire. Des témoignages qui confirment — s'il le fallait — la démarche politique assumée de Petite Fille.

La cohérence d'une œuvre

Cinéaste reconnu et engagé dans le combat politique pour la reconnaissance des transidentités, Sébastien Lifshitz avait notamment réalisé, en 2013, Bambi, un documentaire consacré à une vedette trans de music-hall. Dans son précédent documentaire, Adolescentes, il posait un regard au long cours sur la construction identitaire et sociale de deux amies aux parcours opposés. Petite fille, s'inscrit naturellement dans sa filmographie comme un subtil mélange de portrait de famille et de réquisitoire contre la prédétermination biologique garçon-fille.

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Petite filleDe Sébastien Lifshitz. Disponible jusqu'au 30/01/2021, sur arte.tv