26 février 2021 | Mise à jour le 26 février 2021
Comment, des conquêtes coloniales à l'exploitation des colonies puis aux guerres contre la décolonisation, les promoteurs de la colonisation ont-ils imposé, en France, un corpus d'images sur les peuples colonisés ? Un ouvrage revient sur les illustrations parues dans la presse, au temps des colonies.
Dans cet ouvrage ultra documenté, où les textes mettent l'iconographie en perspective, l'historien Alain Ruscio propose un choix très large de dessins et de caricatures qui ont, durant des siècles, contribué à façonner un imaginaire collectif en envahissant tous les supports possibles (presse, affiches, buvards scolaires, cartes postales, expositions coloniales dans la capitale et dans toute la France métropolitaine…).
Après l'introduction de Marcel Dorigny, lui aussi historien qui revient sur la naissance des stéréotypes, l'auteur, en trois grands chapitres, « Le soleil ne se couche jamais sur notre empire », (qui rappelle l'étendue de l'Empire colonial français), « Civilisateurs et indigènes », (qui met en lumière la continuité de politiques), « Des voix qui crient dans le désert », (qui revient sur la diversité des courants dénonçant l'implantation française outre-mer) puis une postface « La décolonisation tragique » montre comment les clichés ont accompagné, durant des décennies, l’autoproclamation de supériorité et de mission civilisationnelle de l'homme « blanc », qualifiant les « indigènes » de « noirs » ou « petits négros », d'êtres inachevés, inaccomplis, encore à l'état d'enfance, les « jaunes » de « fourbes », les « bruns » et « basanés », ou les Arabes, comme de potentiels mais éternels traîtres, enfermés dans leur religion, l'islam. Ce racisme assumé, qui était alors la norme, semble aujourd'hui impensable. Mais quelles traces a-t-il laissées dans la société ?