Les Archives nationales ne sont pas une variable d'ajustement !
Le 17 mai, au Festival de Cannes, Manuel Valls déclarait: «Cela a été une erreur au cours des deux premières années du quinquennat de François Hollande de baisser le budget de la culture. Cela a été un signe négatif. Il ne faut jamais donner de mauvais signe quand on parle de culture.»
Or, le 4 juin, la CGT-Archives, par la voix du directeur de cabinet de la ministre de la Culture, apprenait «la disparition complète des dispositions relatives aux Archives (…) du projet de loi Création, architecture et patrimoine (CAP)».
Un escamotage décidé par Matignon et qui «ferait suite aux réactions hostiles des ministères de l'Intérieur et de la Défense devant l'abaissement prévu des délais de communicabilité» (des archives publiques NDLR). Et que M. Fabrice Bakhouche, directeur du cabinet de Fleur Pellerin tente d'expliquer – un comble ! – par «le contexte actuel de l'opinion publique, après le vote de la loi sur le renseignement intérieur». Comme le souligne le communiqué de la CGT-Archives «M. Bakhouche justifie ce naufrage archivistique et culturel comme un dégât collatéral naturel de la politique répressive et liberticide du gouvernement.»
Pour le très combatif syndicat CGT des Archives, cette disparition du projet de loi CAP des dispositions relatives aux archives porte un tout autre message : «Refus d'ouvrir les fonds d'archives et d'abaisser les délais de communicabilité, refus de mettre un terme au régime des archives incommunicables, refus de mettre un terme à la privatisation de la conservation des archives courantes et intermédiaires, refus de mettre un terme à la réutilisation commerciale des archives, refus de donner les espaces nécessaires aux Archives nationales pour assurer toutes leurs missions (collecter, conserver, communiquer, valoriser)».
DÉSHABILLER PIERRE POUR HABILLER PAUL.
Car un autre coup bas, sur fond de spéculation immobilière, vise les Archives nationales : en effet, le 9 juin, la directrice adjointe du cabinet de la ministre de la Culture annonçait que le site historique des Archives, dans le Marais, était prévu pour accueillir environ deux cent cinquante agents du ministère de la Culture, délocalisés suite aux «recommandations stratégiques» du conseil de l'immobilier de l'État «qui exige de l'administration de Mme Pellerin l'abandon et la vente de tous ses locaux parisiens, excepté ceux de la rue de Valois».
Rappelons que l'ensemble des kilomètres linéaires des sites des Archives nationales, Paris, Pierrefitte et Fontainebleau (dont deux bâtiments sont inaccessibles depuis mars 2014 en raison de l'instabilité de leur structure), qui devaient pouvoir couvrir les besoins sur les trente années à venir, n'ont aucune place disponible à céder sous peine d'être immédiatement saturés et donc de ne pouvoir accomplir leurs missions.
« En réalité, les magasins d'archives à Paris sont doublement pleins: pleins des documents qui ne sont pas partis, et pleins de ceux qui n'ont pas encore eu le droit d'entrer.» Il s'agit notamment des actes notariés qui s'accumulent dans les études parisiennes et qui devraient être accueillies par le site parisien depuis des années. «Par leur nature, les archives ne peuvent pas être réduites à un vulgaire objet patrimonial. Les archives sont notre mémoire historique et aussi, ne l'oublions pas, un service public indispensable à la population pour établir et faire valoir ses droits: nationalité, carrière, succession, actes notariés, etc.»
Comme le souligne la CGT-Archives : «Hier, au nom de l'identité nationale et du projet réactionnaire de Maison de l'histoire de France de Nicolas Sarkozy, aujourd'hui, au nom de la politique immobilière liquidatrice de Valls-Pellerin, le site parisien des Archives nationales n'a jamais cessé d'être l'objet de convoitises qui n'ont absolument rien à voir avec l'archivistique, la culture ou le patrimoine.»
Mais, on le constate au quotidien, ce gouvernement n'en est plus à un reniement près…
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