5 décembre 2019 | Mise à jour le 5 décembre 2019
Dans les rues de Lille, on n’avait pas vu autant de monde depuis de longues années. Du privé et du public, nombreux étaient les salariés en grève contre la réforme Macron des retraites. Témoignages recueillis sur le pavé lillois..
Elles ne sont qu’une quinzaine et pourraient passer inaperçues parmi les 40 000 manifestants sans leurs gilets roses qui attirent le regard. Céline, assistante maternelle depuis 7 ans, brandit sa pancarte : « Stop précarité. Oui à la revalorisation de notre retraite. »
Avec des collègues des Bois-Blancs, un quartier à la périphérie de Lille, et de Lomme, commune limitrophe, elles se croisent régulièrement dans des relais d’assistantes maternelles. C’est ainsi qu’elles ont décidé de manifester aujourd’hui, rejointes par d’autres grâce à une page Facebook créée par l’une d’elles.
« On pousse des poussettes toute l’année, à un certain âge, il faudra qu’on pousse des déambulateurs. » Céline plaisante mais avoue que « la retraite, ça fait peur ». « La principale qualité de notre métier, c’est la vigilance, confie-t-elle. A 60 ans, on ne peut plus suivre les enfants de la même façon. » Sa collègue Ottilia a fait ses calculs : « Pour avoir 1 000 euros de retraite par mois, je dois travailler jusque 70 ans… »
L'avenir de nos enfants
Autre métier, autre pénibilité : Vincent Béghin assure la maintenance des voies pour Ilévia, l’entreprise concessionnaire des transports publics de la métropole lilloise. « Je travaille la nuit, dehors, raconte-t-il. Je suis à dix ans de la retraite, je devrais encore pas trop mal m’en sortir, mais je pense à nos enfants, car si à chaque gouvernement on tire vers le bas… » Pour la manifestation d’aujourd’hui, il a suivi le mot d’ordre de la CGT.
Un peu plus loin, Clément Delattre, élu CGT au CSE de Roquette, usine de fabrication d’amidon et de fécule à Lestrem (Pas-de-Calais). Il explique qu’il n’est pas facile de toucher les 2 800 salariés d’une entreprise étalée sur 2 km2.
Surtout depuis la mise en place du CSE, qui concentre le travail syndical sur une poignée de personnes. Une application a été créée pour diffuser les tracts dématérialisés du syndicat. Plusieurs bus ont été réservés pour rallier les manifestations d’Arras, le matin, et de Lille, l’après-midi. Mais il se refuse à toute prévision sur la suite du mouvement.
Précarité, non merci
Main dans la main, Margot Robert et Bruno Marinelli ont, eux, répondu à l’appel « Art en grève », qui rejette cette idée que « l'absence de protection sociale favorise la « liberté », la « créativité » ou « l’autonomie » ».
Jeunes artistes plasticiens sortis de l’école depuis deux ans, ils évoluent dans « une vaste zone grise », faite de travaux non rémunérés, « sous prétexte qu’être exposé dans une galerie est valorisant pour [leurs] œuvres ».
Peu ou pas de rémunération, de couverture sociale, de cotisations retraite, le RSA et la CMU comme seules perspectives… Ils refusent de s’y résoudre.