Bonnes nouvelles" de Fukushima"
En 2001 le très beau « Au-delà des terres infinies » valait à Sôkyû Genyû le prestigieux prix Akutagawa, équivalent japonais de notre Goncourt. Ce veilleur du temple zen Fukuju, à 45 km de Fukushima -également auteurs d'essais sur le bouddhisme et d'entretiens avec des scientifiques- revient en littérature avec un bouleversant recueil de récits.
Habitant Fukushima après le séisme, le tsunami et l'accident de la centrale nucléaire Daiichi, l'auteur fut d'abord persuadé que le moment n'était pas à l'écriture de romans. Mais, explique-t-il « il s'est avéré qu'écrire des romans m'était tout aussi indispensable pour vivre que respirer, quels que soient les taux de radioactivité relevés dans l'air. »
Si « La montagne radieuse », titre du recueil, n'est qu'un tas de déchets gorgés de césium, collectés par un vieil homme qui, tel le colibri de la fable, tente de faire ce qui est en son pouvoir pour alléger la souffrance de ses contemporains, elle symbolise parfaitement l'esprit de résilience qui habite ces nouvelles.
Ici, un homme est fasciné par une mante religieuse, écho d'un bonheur lointain lui donnant la force de continuer son métier d'ordonnateur de mariages. Là, un tout petit garçon dont le père a disparu transmet à sa mère et à un policier endeuillé la force de survivre. Là encore, un chœur de grillons donne l'exemple de la solidarité en produisant un chant puissant.
Le plus petit insecte est une preuve de vie, et la nature empoisonnée semble elle aussi vouloir, malgré tout, trouver la force de renaître, de montrer à l'inconscience des hommes qu'ils passent et qu'elle demeure…
Emprunte d'une simple humanité et d'une philosophie qui n'est jamais béate, « La montagne radieuse » s'élève dans les ténèbres.
« La montagne radieuse » de Sôkyû Genyû
Editions Philippe Picquier.
160 p., 18 €.