11 février 2020 | Mise à jour le 11 février 2020
À la centrale de Dampierre-en-Burly, dans le Loiret, les agents d'EDF poursuivent la mobilisation contre la réforme des retraites. Depuis vendredi 7 février, une tranche promise à l'arrêt est maintenue en production par les grévistes qui entendent ainsi pénaliser les intérêts de la direction.
Tréteaux, pneus, palettes, barbecues, thermos à café, sono et victuailles à griller, banderoles et drapeaux… Toute la panoplie de la grève est en place depuis l'aube, ce lundi matin 10 février, devant les portes de la centrale nucléaire de Dampierre-en-Burly.
Premiers arrivés, les forces de police qui, averties par la direction, se sont postées dès 5 heures du matin devant les accès au site d'EDF. Ces portes sont en effet la première cible des militants qui les transforment régulièrement en barrages filtrants pour freiner — sans les empêcher — les entrées sur le site de cette centrale nucléaire où travaillent près de 2000 salariés, entre agents EDF et sous-traitants.
Organisée par l'intersyndicale CGT, FO, Sud-Solidaires de l'Énergie, cette énième journée d'action s'inscrit dans la longue liste des mobilisations amorcées depuis le 5 décembre contre la réforme des retraites. En total désaccord avec ce projet de loi, une majorité d'agents et des salariés de la sous-traitance qui affluent vers le site se laissent bien volontiers filtrer par les grévistes : « C'est l'occasion d'échanger avec les syndicats, de s'informer sur les nouveaux développements autour du projet de loi et de prendre la température du mouvement social », indique Pascal Lambolez du syndicat FNME-CGT de Dampierre. Une température qui menace de virer à la surchauffe, et pas seulement contre le projet de loi du gouvernement Macron/Philippe.
L’arrêt de la tranche 4 attendra
C'est en effet à la direction d'EDF que s'adresse tout particulièrement la mobilisation du jour qui a pour objectif de « toucher au portefeuille ». En grève, mais actifs, les agents maintiennent depuis trois jours la production d'électricité d'une des 4 tranches de la centrale, alors qu'elle devait être arrêtée pour permettre les opérations de maintenance et de rechargement en combustible. Une grève à l'envers, où le rapport de force se construit par le maintien de l'activité et non pas son arrêt.
Bien qu'originale, cette « réappropriation de l'outil de travail » a un cout qui n'est pas négligeable : 1 million d'euros par jour de maintien de l'activité de la 4e tranche, rien que ça.
Derrière la réforme des retraites, le spectre de la baisse des salaires
Certes, la direction d'EDF peut, à tout moment, tenter de poursuivre son programme d’arrêt et de maintenance de la tranche en réquisitionnant des agents . Or, elle n'en fait rien, pour l'heure, et pour cause : « Leur stratégie consiste à miser sur l'épuisement des grévistes en lutte depuis deux mois contre la réforme des retraites, histoire de faire passer de nouvelles régressions sociales majeures comme la révision du tarif agent ou encore, la baisse drastique du taux de rémunération des heures supplémentaires » , explique un responsable syndical de Sud-Energie.
Principaux concernés et grands perdants de cette stratégie du pourrissement de la mobilisation, les agents de la conduite pour qui ces fameuses heures supplémentaires représentent au bas mot entre 40 % à 50 % de leur rémunération mensuelle complémentaire.
Une stratégie pernicieuse
Et c'est sans compter bien d'autres dommages à venir que la direction d'EDF tente pernicieusement d'imposer à ses agents en profitant de leur mobilisation conter la réforme des retraites. Exemples en vrac : la remise en cause du statut de salariés des IEG (industries électriques et gazières) qui toucherait aussi les retraités actuels ; le plan Hercule, qui parachèvera le démantèlement de l'entreprise EDF au profit de la concurrence.
Bref, entre la réforme des retraites qui réduirait à peau de chagrin le niveau de leurs pensions, la perte de leur statut, la fin ou l'abaissement sévère des compléments de rémunération, les agents d'EDF se considèrent logiquement comme les dindons d'une très mauvaise farce.
De nouvelles actions dissuasives dans les semaines à venir
Déterminés à ne plus subir, ils programment de nouvelles actions dans les semaines à venir : feux de joie et d'artifice, friteries solidaires, concerts nocturnes, basculement de foyers en heures creuses, coupures ciblées, etc. Autant d'actions qui, par effet d'accumulation, devraient, espèrent-ils, finir par peser sur l'économie. Et par dissuader leur direction, ainsi que le gouvernement, d'anéantir leurs conditions de travail et de vie.