Une « force immense » pour une écologie populaire
Dimanche 9 mai, quelque 150 marches pour le climat ont parcouru l'Hexagone. A Paris de République à Bastille, 56000 manifestants de tous bords défilaient sous le soleil... Lire la suite
«Et 1, et 2, et 3 degrés, c'est un crime contre la biodiversité. Et 1, et 2, et 3 degrés, c'est un crime contre l'humanité ! » Ce 6 novembre, sur l'esplanade de l'Hôtel de Ville de Paris, un millier de personnes répétaient ce slogan à l'unisson. À l'occasion de la COP26 qui, du 31 octobre au 12 novembre, a réuni les « grands » de ce monde autour de la question climatique à Glasgow, en Écosse, des mobilisations étaient organisées dans une soixantaine de villes françaises à l'appel de près de 160 organisations, parmi lesquelles le collectif Plus jamais ça, auquel s'est associée la CGT. À Paris, les portraits géants des dix principaux dirigeants du monde ont été déployés au sol pour dénoncer « leurs bilans désastreux » et « les crimes contre le vivant » dont ils se rendent coupables par leur inaction. La veille, à Glasgow, plusieurs milliers de jeunes manifestaient à l'appel de la militante écologiste Greta Thunberg et de son mouvement Fridays for future, lors de la journée de la jeunesse de la COP26. Une journée censée permettre à ses représentants de porter leurs revendications devant les négociateurs internationaux. Ils réclament la « justice climatique, maintenant ! » et demandent à être inclus à l'avenir dans les discussions comme devraient l'être, selon eux, les communautés minoritaires, au premier rang desquels des peuples autochtones et, bien sûr, les pays les moins riches, sous-représentés.
Mais les jeunes ne sont pas naïfs, à l'image de leur porte-voix suédoise. Dénonçant l'échec de la conférence mondiale pour le climat, celle-ci résumait ainsi cette 26e édition : « Ce n'est plus une conférence climat, c'est un festival de greenwashing des pays riches, une célébration du “business as usual” et du “blablabla” ».
« Ces grands rendez-vous internationaux ne servent à rien, affirme Antoine, étudiant ingénieur de 20 ans, qui participe au rassemblement parisien en brandissant une pancarte “Blablabla”. Mais il faut encore essayer de faire pression sur les dirigeants. » Antoine manifeste rarement, mais il n'en est pas moins engagé, notamment comme animateur de « La Fresque du climat », un jeu participatif conçu par l'association éponyme comme un outil de vulgarisation des conclusions du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec). Des milliers de bénévoles (dont de nombreux jeunes), les freskers, sont formés à l'animation de cet outil de sensibilisation.
« Avec mes copains, on parle du dérèglement climatique. Plus que les gens nés avant nous. Mon père, par exemple, ne veut pas voir, il minimise. Il faut essayer que ces gens-là prennent conscience et agissent aussi », avance Mathilda, venue au rassemblement avec sa grande sœur. Du haut de ses 11 ans, la collégienne est d'une lucidité à mettre le feu aux joues des boomers. « On ne peut pas savoir ce qui va arriver, mais on sait que ce ne sera pas bon et, malgré cela, il y a des gens qui ne pensent qu'à eux et pas à notre avenir. » Cet aveuglement volontaire ou ce « après moi le déluge » a décidé Laura, étudiante de 21 ans, à s'engager. « Les inondations, les feux géants… On ne peut plus fermer les yeux. Mais c'est la mascarade de la loi Climat qui a été le déclencheur pour moi ». En 2020, elle intègre Youth for Climate, sorte de « premier stade d'engagement » pour nombre de jeunes, explique-t-elle. Et plus récemment, elle a rejoint Oxfam France, dont elle arbore aujourd'hui les couleurs.
« Comment va être l'avenir ? Elles vont me servir à quoi mes études ? Est-ce qu'on sera encore là ? » Comme nombre de congénères, si Laura souffre d'éco-anxiété, elle se refuse au défaitisme. À l'image de Delphine qui, elle, a opté pour la désobéissance civile non violente en intégrant Extinction Rebellion. Déjà inscrite dans la vie active, cette Haut-Savoyarde de 26 ans installée à Paris se dit éco-anxieuse. Elle oscille entre « l'envie d'agir pour faire basculer les politiques et l'idée que c'est cuit et qu'il faut s'y préparer en expérimentant des modes de vie plus résilients ». Pour autant, reconnaît-elle, « des marches, des actions comme aujourd'hui, ça booste ! Le fait de sentir un élan solidaire, une volonté commune d'agir, c'est primordial. »