Le Medef à l’offensive contre les retraites
Les régimes de retraite complémentaire ARRCO et AGIRC vont disparaître le 1er janvier 2019 pour être remplacés par un nouveau régime unique . Une négociation entre le... Lire la suite
Recul de l’âge de départ en retraite, gel des pensions, révision du mécanisme des pensions de réversion, moindre pension pour ceux qui ont été privés d'emploi… le Medef ne manque pas d'idées pour équilibrer les régimes de retraites complémentaires, à condition qu'on n'augmente pas les cotisations, qu'on ne révise pas l'assiette et que seuls les salariés fassent les frais des suppressions d'emplois et des salaires restreints qui affectent les ressources des régimes. Il l'a réaffirmé lors de la première séance de négociations entre syndicats et patronat sur le financement des retraites complémentaires ce 17 février.
«Une partie clé de la solution», pour le patronat, reposerait ainsi sur un report de l’âge effectif de liquidation de la retraite. Certes, les bornes d’âge (âge légal de départ à 62 ans, et 67 ans pour le taux plein si tous les trimestres ne sont pas acquis avant) demeureraient, mais il propose des décotes qui entreraient en vigueur dès la génération née en 1957. «Le taux d’abattement diminuera d’année en année, pour chaque retraité concerné» jusqu’à ses 67 ans.
En clair, le droit au départ à 62 ans serait fictif. On imagine les conséquences d'une telle mesure à la fois pour les seniors, contraints de travailler tard ou de subir le chômage plus longtemps, et pour les jeunes entrant sur le marché de l'emploi.
Dans le même temps, selon les scénarios patronaux, le montant des pensions serait gelé. «Il faudra peut-être imaginer un gel temporaire des pensions jusqu’à ce qu’on se rapproche de l’équilibre technique des régimes», assène Claude Tendil, le chef de la délégation du Medef, Un gel sur trois ans à partir de 2016 «sauf reprise significative de l’inflation».
Le patronat veut aussi toucher aux pensions de réversion. En fait, il pose une condition au maintien à 60% du taux actuel de réversion après le décès d’un conjoint: que celui qui part à la retraite le premier, dans le couple, ne perçoive qu’une retraite complémentaire restreinte. Or 1,29 million de personnes perçoivent une pension de réversion et 1,6 million cumulent retraite et pension de réversion à l’Arrco, les chiffres sont de 520000 et 82000 à l’Agirc.
Quant aux droits des privés d'emploi, le Medef ne propose rien d'autre que la double peine, avec une moindre revalorisation de la période de chômage. Par ailleurs, la piste d'une fusion entre les deux régimes, Arrco (tous les salariés) et Agirc (cadres) fait également partie de la panoplie du possible pour le patronat, alors même que l'affiliation à l'Agirc, comme le rappelle l'Ugict-CGT, constitue ce qui, dans les conventions collectives, détermine le statut cadre.
Les exigences patronales provoquent quelques remous parmi les organisations syndicales, qui se sont fixé des lignes rouges. Pas question de réduire les droits à retraite ni de toucher aux bornes d'âge, affirme ainsi FO; injuste également de revenir sur les pensions de réversion, plaide la CFTC; la CFE-CGC s'inquiète de la perspective de fusion des régimes Agirc-Arrco… Quant à la CFDT, Laurent Berger considère qu'il faut «préserver les pensions des retraités les plus modestes». Il envisage comme possible d'«augmenter les cotisations». Cela «ne peut pas être totalement exclu puisque les efforts vont être demandés aux uns et aux autres», dit-il, envisageant par ailleurs l'hypothèse d’une fusion Arrco-Agirc.
Pour la CGT, il ne saurait y avoir «ni mesure d’âge ni décote» et l’équilibre de chacun des deux régimes, à préserver, est tout à fait possible si de nouvelles ressources leur sont attribuées. Une vraie politique de l'emploi, de maintien et de développement des filières industrielles comme des services publics y contribuerait largement. L'égalité des salaires entre les femmes et les hommes permettrait aussi une hausse des cotisations qui effacerait de fait tout déficit de l'Arrco, a calculé la CGT. Pour la confédération, il est urgent d'augmenter les cotisations sociales tout en les modulant.
Il s'agit d'intégrer toutes les rémunérations et de taxer les revenus financiers. À l'Agirc, les cotisations sont d'autant plus sous-dimensionnées que les salaires des cadres se sont globalement affaissés ces dernières années. Il convient d'augmenter celles-ci de 2,45%, ce qui doit peser principalement sur la part dite patronale. Mais au-delà, une révision de l'assiette permettrait de mieux tenir compte du ratio entre la masse salariale et la valeur ajoutée de chaque entreprise, pour fixer des taux de cotisation différents favorisant l'emploi et les salaires.
Des mesures efficaces, susceptibles de contribuer à un cercle vertueux pour l'emploi, les salaires et la rémunération des qualifications, et de maintenir et développer les droits des salariés que le patronat préférerait rogner.
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