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EMPLOI

Le travail, premier lieu de discrimination

3 avril 2017 | Mise à jour le 3 avril 2017
Par | Photo(s) : Aleutie / Fotolia
Le travail, premier lieu de discrimination

Le 10e Baromètre du Défenseur des droits et de l’Organisation internationale du travail (OIT) révèle que le marché du travail est particulièrement discriminant. Sexe, âge, origine, couleur de peau, religion, handicap, santé, maternité… les critères sont multiples et ne surprennent pas la CGT, qui y ajoute l’action syndicale.

C’est un constat alarmant. Le panorama dressé par le 10e Baromètre de la perception des discriminations dans l'emploi, publié le 23 mars par le Défenseur des droits, Jacques Toubon, et le directeur du bureau de l’OIT pour la France, Cyril Cosme, confirme le travail en pôle position des lieux de discrimination (34 %). Encore et toujours…

Âge, sexe, origine, couleur de peau, religion, état de santé, handicap, grossesse et maternité : l'emploi arrive loin devant les relations de voisinage (8 %), l’école et l’université (8 %) ou même les contrôles de police (6 %) et la recherche d’un logement (5 %). Et ce, malgré l’image communément véhiculée par les grands médias.

C’est un constat alarmant. Le panorama dressé par le 10e Baromètre de la perception des discriminations dans l'emploi, publié le 23 mars par le Défenseur des droits, Jacques Toubon, et le directeur du bureau de l’OIT pour la France, Cyril Cosme, confirme le travail en pôle position des lieux de discrimination (34 %). Encore et toujours…

Âge, sexe, origine, couleur de peau, religion, état de santé, handicap, grossesse et maternité : l'emploi arrive loin devant les relations de voisinage (8 %), l’école et l’université (8 %)  ou même les contrôles de police (6 %) et la recherche d’un logement (5 %). Et ce, malgré l’image communément véhiculée par les grands médias

Le travail, lieu de discrimination bien connu

Les résultats de ce baromètre apparaissent d’autant plus fiables qu’ils confirment une tendance également relevée par l’activité même du Défenseur des droits : sur environ 5 200 réclamations reçues en 2016 pour discrimination, plus de la moitié concernait l'emploi. « On n’est malheureusement pas surpris, explique Serge Lenoir, secrétaire général de l’UL CGT des cantons du Roannais et membre du collectif CGT sur les libertés syndicales. Nos services juridiques et nos défenseurs syndicaux ont affaire au quotidien à des salariés qui viennent nous faire part des discriminations qu’ils subissent au travail, tant à cause de leur couleur de peau que parce que ce sont des femmes, alors qu’on vient de fêter le 8 mars. »

Les femmes, grandes perdantes

Il est impossible d’établir un profil type du discriminé dans l'emploi, les caractéristiques sociales à prendre en compte étant trop nombreuses. Mais le rapport révèle tout de même clairement que les femmes sont davantage discriminées que les hommes, à 24 % contre 5 % pour des raisons liées au sexe. La grossesse et la maternité apparaissent comme le troisième motif de discrimination cité par les femmes (7 %). « Les stéréotypes et préjugés qui freinent l’accès des femmes à l'emploi et leur déroulement de carrière sont encore aujourd’hui fortement marqués par le “risque” que constitue la maternité pour l’exercice d’une activité professionnelle », détaille cette étude. En plus des inégalités de salaire, des déroulements de carrière souvent plus lents et des temps partiels plus systématiques, les femmes subissent une sorte de « sanction sociale » d’autant plus exaspérante qu’à l’inverse le groupe le moins discriminé est celui des hommes d’âge moyen (entre 35 et 44 ans) et… pères de famille, qui ne sont que 13 % à déclarer avoir subi une discrimination.

Chômage de masse : le poids du silence

Un actif interrogé sur trois affirme avoir été victime d’une discrimination dans l'emploi au cours des cinq dernières années. Une proportion toujours aussi importante dix ans après la mise en place du Baromètre. « Sur le terrain, on a même le sentiment d’assister à une aggravation de la situation, parce que le nombre de personnes s’en plaignant augmente, réagit le syndicaliste. Mais peut-être aussi parce que, globalement, les salariés tolèrent moins l’écart entre les valeurs de la République et l’impunité qui prévaut lorsqu’elles sont bafouées dans les entreprises. Un terreau sur lequel prospère le vote Front national, aujourd’hui. » Une situation d’autant plus grave que seule une personne sur dix ose contester les cas de discrimination à l'embauche, et une sur quatre pointer celles ayant eu lieu durant leur carrière. Dans un contexte de fort taux de chômage, nombre de salariés s’estimant déjà heureux d’avoir un emploi sont amenés à endurer en silence des situations de discrimination.

Facteurs aggravants

« La loi ne nous aide pas beaucoup, ces discriminations sont difficiles à porter devant les prud’hommes tant les procédures sont lourdes et compliquées, rebondit Serge Lenoir. Les salariées, particulièrement touchées, osent d’autant moins les dénoncer qu’elles ont peur de perdre leur emploi, spécialement celles qui se trouvent coincées entre un bas niveau de qualification et la responsabilité d’élever seules leurs enfants. » Pis, « au-delà de la composition de leur famille et de leur âge, les situations de discrimination vécues par les femmes sont différentes aussi selon leur origine réelle ou supposée, détaille le rapport. Ainsi, les femmes de 18 à 44 ans vues comme noires, arabes ou asiatiques apparaissent comme un groupe social particulièrement exposé aux discriminations dans le monde professionnel. »

Les propositions de la CGT

Pour changer cette réalité, la CGT et plusieurs associations d’insertion professionnelle ont fait une série de propositions, telles que :

● la mise en place d’un registre d'embauche recensant les CV reçus avec le sexe, le nom, la date et le lieu de naissance, le lieu de résidence, le niveau de qualification et le niveau de recrutement effectué ;
● l’introduction d’une notification des droits à remettre obligatoirement au cours de tout entretien d'embauche, qui rappelle les questions que le recruteur n’a pas le droit de poser et les recours en cas de discrimination ;
● l’élaboration d’indicateurs qui permettent de mesurer l’écart sur les carrières et d’adopter des mesures de prévention dans la négociation au niveau de l’entreprise ou du groupe ;
● des actions de groupe, de façon à permettre à l’ensemble des victimes d’une même discrimination de pouvoir aller en justice pour obtenir des réparations intégrales sur les préjudices et entraîner des condamnations dissuasives.

« Un projet de loi  » égalité-citoyenneté  » devait même arriver en discussion au Sénat au mois de septembre 2016. Il aurait été le support idéal pour intégrer toutes ces mesures, et puis ça n’a pas été le cas… », déplore le syndicaliste.

Discrimination syndicale

Absentes du Baromètre, les discriminations syndicales, même si elles concernent une plus petite partie de la population, n’en restent pas moins inacceptables. « Pour notre part, nous avons été particulièrement touchés avec « les cinq de Roannes »*, explique par encore Serge Lenoir. Mais, globalement, les camarades militants subissent les foudres du patronat qui n’hésite pas à les traîner devant les tribunaux. Et au niveau des libertés syndicales, on constate qu’un grand nombre de nouveaux syndiqués, notamment dans les petites structures, ne veulent pas le faire savoir par peur de représailles de la part de leur employeur ». Et de résumer : « Ceux qui se bougent pour défendre leur outil de travail ou faire valoir leurs droits en termes de salaires, d'emploi et de conditions de travail font souvent l’objet de pressions et sont discriminés dans leur évolution de carrière ». Une constante que le gouvernement de François Hollande n’aura pas réussi à enrayer.

* Après quarante-trois mois de procédure et d’acharnement judiciaire, cinq militants CGT poursuivis pour avoir réalisé des “tags” dans le cadre d'actions collectives menées au cours de la lutte contre la réforme des retraites en 2010, et pour refus de se soumettre à des tests ADN, étaient définitivement relaxés en mai 2014. Une victoire des syndicalistes qui a relancé l’exigence d’une amnistie sociale.