L’enfant de Charlie

Poignant, drôle, profond, terrible, désespéré. On oscille entre larmes et éclats de rire en lisant cet album pas tout à fait comme les autres. L'exergue de Nietsche « Nous avons l'art pour ne pas mourir de la vérité » y résonne à chaque page où Catherine Meurisse, avec une infinie tendresse, nous parle de ses amis disparus, ce 7 janvier 2015 lors du massacre de Charlie Hebdo.

En leur rendant le plus bel hommage qui soit, celui qui consiste à nous faire rire pour éloigner la mort.

C'est une panne d'oreiller consécutive à un chagrin d'amour qui empêchera Catherine d'arriver à l'heure à la conférence de rédaction dans les locaux de Charlie où les frères Kouachi sont en train d'assassiner ses confrères, ses maîtres en dessin et en humour, ses amis.

Doublement dévastée, la trentenaire perd tous ses repères tant les traumatismes successifs sont immenses quand la douleur envahit tout. Et le lecteur pressent tout le poids de cette légèreté perdue. Alors, comment vivre ?

À tâtons, Catherine Meurisse, soutenue par quelques proches et thérapeutes, tente de se frayer un chemin vers la lumière, vers l'océan, le soleil de Rome et la Villa Médicis qui va l'accueillir quelque temps, vers la beauté salvatrice des toiles du Louvre. Rire, aimer, dessiner, se gaver d'art et de joie, n'est-ce pas la plus belle manière de dire que les morts de Charlie demeurent aux côtés de ceux qui les ont aimés ? À nos côtés…

Dessins et aquarelle, dans La légèreté, la plume de Catherine Meurisse semble empruntée au pinson de Prévert : ni gaie, ni triste, nous invitant juste à faire ensemble un petit bout de ce chemin pour goûter à nouveau le chant de l'oiseau.

La légèreté, de Catherine Meurisse.

Éditions Dargaud. 136 pages, 20 €.